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13/08/2011

Brêves de comptoir... laïques

Aller, c'est l'été, laissez-vous aller... C'est une  valse? Non ce sont les brêves de comptoir du Blog.

La société de la com. de masse favorise les personnes qui pêtent plus haut que leur QI.

L’ignorance partagée permet d’éviter le ridicule (cf. les idioties sur la laïcité, entre autres).

On ne dit plus des sourds, mais des mal-entendants ; on ne dit plus des aveugles mais des mal-voyants, alors pourquoi dit-on encore des « philosophes républicains » au lieu de dire des mal-comprenants ?

Sarkozy a réussi le prodige de nous faire regretter Chirac. Pitié ! J’espère que jamais  nous aurons Copé qui nous ferait regretter Sarkozy

(Brève de comptoir entre intellos) : « T’as tout faux dans ton dernier article sur Ricœur. Si t’avais écouté le discours de Sarko à l’inauguration du fond Ricœur, t’saurais que ce dernier « a fait sa thèse sur le philosophe Hursell » (authentique). J’te parie que tu ne connais même pas ce philosophe. C’est pourtant un phénomène ! »

Monsieur Pichu fait les courses du ménage (c’est un « souchien » donc, par définition quelqu’un de très émancipé, féministe, et tout et tout) et il discute, à son retour, avec Madame Michu : « Figurez-vous que j’avais trouvé un très bon boucher. Il vend de la viande hallal qui est excellente et pas chère. Mais voilà, je viens je viens d’apprendre que ce boucher est musulman ! »  

Déclaration presque pas imaginaire de François Fillon : « je suis un incompris, ma déclaration contre Eva Joly, le 14 juillet, mon attaque contre une Française d’origine norvégienne, c’était juste pour mettre de l’égalité dans la xénophobie ».

Si Ségolène Royal avait été élue, en 2007, qui aurait gardé les gosses demandait Fabius ?  Si jamais  Martine Aubry est élue en 2012,  Fabius sera-t-il la première dame ?

 Pour l’UMP une femme ne peut porter un foulard lors des sorties scolaires, alors que dans les années 1950, peu après que la laïcité ait été mise dans la Constitution,  le chanoine Kir siégeait en soutane à l’Assemblée Nationale ? Oui, mais c’était un chanoine. C’était donc déjà un hommage à Sarkozy ! (Chanoine du Latran NDLR)

Pour Rousseau, l’homme  est naturellement bon et c’est la société qui le corrompt, pour le Baubérot de votre cœur, l’être humain est virtuellement intelligent, mais la société exige de lui d’être un peu con(formiste).

Et, pour finir en beauté, cette déclaration presque pas imaginaire de Marine Le Pen : "Désormais, dans le FN recentré,  tous les être humains sont frères et  il est formellement  interdit d’être raciste envers ses frères inférieurs. »

 

 PS plus sérieux: Lutter pour le droit de mourir dans la dignité ne signifie nullement vouloir qu'un médecin tout seul puisse décider de la vie et de la mort des gens malades et très âgés. C'est précisément l'absence de loi satisfaisante qui favorise ce genre de pratique délictueuse.

 

 

 

 

 

01/06/2011

Officiel: Il existe des "Eglises officielles" dans la France umpétisée

Rapidement, car j'ai 2 articles sur le feu: un qui doit être fini fin avril dernier et l'autre le 20 mai dernier! Mais, chose promise chose due, j'avais indiqué que je réagirai à certains commentaires, notamment celui de misafir sur la neutralité et celui de R. Mulot sur la laïcité sans qualificatif.

D'abord, en toute immodestie, si vous voulez vraiment approfondir le débat, sur ces 2 sujets comme sur d’autres, lisez Laïcités sans frontières, que cela ne soit pas pour rien que Micheline Milot et  moi, nous nous soyons « décarcassés » pendant 3 ans.

Bien sûr, c’est 21€. Mais « faut c’qui faut » comme dirait notre sublime Président dans son français très littéraire.

Ceci dit, quelques précisions quand même.

Le commentaire de misafir sur la neutralité montre bien à quel point l’idéologie dominante dénature la laïcité, et notamment ce que la neutralité en matière de laïcité.

Car la neutralité laïque n’est en rien ce que vous croyez qu’elle est quand vous la dénoncez. Elle en est même le contraire  

 

Je vais vous citer le juriste le plus favorable à une loi contre le voile intégral. : Guy Carcassonne, prof de droit public à Paris X. Auditionné par la Mission parlementaire, il déclare :

« La laïcité n’est pas un fondement imaginable [à une loi] ; comme vous le savez ce principe s’impose à la République, en aucun cas aux citoyens. La République peut se fixer des règles procédant de la notion de neutralité, mais elle ne peut y soumettre les consciences. Sur le plan pratique, une loi d’interdiction ouvrirait une brèche : tous les signes extérieurs d’appartenance religieuse seraient prohibés, sauf à introduire des discriminations injustifiables. »(p. 554 du Rapport publié par la Documentation française, 2010)

(Admirez le « comme vous le savez » : si ce n’est pas de l’ironie, c’est bien imité !)

Or ce que réfute Carcassonne est ce qui se passe, et n’a rien à voir avec la laïcité.

 

Car, précisément, ce qui se passe est le contrairede ce qu’indique Carcassonne :

-          on impose et veut encore plus imposer, de plus en plus, des « discriminations injustifiables » à une catégorie de citoyens, et surtout de citoyennes

-          on porte atteinte à la laïcité de l’Etat, à sa neutralité arbitrale, impartiale.

 

Le n° du 31 mai du Monde, nous apprend en effet une chose ahurissante : pour un représentant de l’Etat, un Monsieur président interministériel, ex-député UMP, il existe en France actuellement des EGLISES OFFICIELLES.

Oui, vous avez bien lu ! Il existe des Eglises officielles, une voix officielle (c’est le cas de le dire !) l’affirme, et PERSONNE NE MOUFFTE, et surtout pas des de la pensée laïque unique (« sans adjectif »).

 

Explication :

La Cour d’appel vient de rejeter  une requête de la chancellerie contre 3 aumôniers de prison bénévoles des Témoins de Jéhovah. Et le président de la Miviludes Georges Fenech de déclarer au quotidien qui le cite : « On sent bien qu’à travers leurs actions, les Témoins de Jéhovah recherchent une RESPECTABILITE D’EGLISE OFFICIELLE. »

Et il ajoute que le fait que des témoins de Jéhovah emprisonnés puissent recevoir une aide spirituelle du même type que celle que reçoivent, par exemple, les catholiques emprisonnés, « serait  la porte ouverte à toutes sortes de DISSIDENCES RELIGIEUSES dans les prisons : pentecôtistes, mormons, adventistes. »

Et la journaliste du Monde de commenter froidement : « Des aumôniers pentecôtistes travaillent déjà dans les prisons ».

Constatons que le terme de « dissidences religieuses » est le terme administratif utilisé au XIXe siècle, avant 1905, quand existait le régime des « cultes reconnus » et le Concordat avec le Saint Siège.

Situation à laquelle la loi de 1905 a mis fin en indiquant dans son Article 2 :

-          que la « République ne reconnait, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ». Le « ne reconnait » indique clairement l’abolition du régime des cultes reconnus

-          que « les services d’aumônerie » dans les lieux fermés, eux, sont destinés non pas à donner la moindre officialité aux religions, ou à revenir au système des cultes reconnus, mais « à assurer le libre exercice des cultes ».

 

M. Fenech, c’est « Monsieur Anti-Article 2 de la Loi de 1905 »

Comme il est incapable d’être partisan du libre exercice des cultes et donc de percevoir les aumôneries dans cette perspective républicaine, il est forcé de prétendre qu’il y a des Eglises officielles en France et des cultes dissidents et que les premiers ont droit à des aumôneries et pas les seconds.

 

LA LAÏCITE FENECHISEE ET UMPETISEE MARCHE SUR LA TÊTE. ELLE EST LE CONTRAIRE DE LA LOI DE 1905. ELLE EST LE CONTRAIRE DE LA NEUTRALITE.

 

Le problème, c’est que cette laïcité-là a de NOMBREUX COMPLICES, dont  certains (pas tous, heureusement) PARTISANS DE LA LAÏCITE SANS ADJECTIF.

 

Ceux-là méritent une laïcité lepénisée. S’ils continuent ils l’auront ! Le problème : ils l’imposeront à nous tous par la même occasion !

 

(La suite, demain, sur justement la dite laïcité sans adjectif et ses pièges).

 

 

30/05/2011

Le sexisme à l'Assemblée nationale

Sous le titre « Le machisme ordinaire à l’Assemblée nationale », Le Parisien/Aujourd’hui en France (30 mai 2011) nous donne une lumineuse démonstration.

Exemples :

-          Un député UMP des Yvelines déclare à une collègue PS : « Habillée comme ça, faut pas s’étonner  de se faire violer »

-          Une députée qui, devant partir avant la fin de la séance, s’entend dire par son voisin : « avec qui vas-tu tirer un coup ? » ou « je te donne ce document si tu baises avec moi »

-          La ministre Chantale Jouanno affirme qu’elle ne peut porter une jupe  « sans entendre dans son dos des remarques salaces »

Etc, etc.

 

Et Sandrine Mazetier[1], députée PS de Paris de résumer le climat qui règne à l’Assemblée Nationale » : « une forme de paternalisme, d’infantilisation des femmes que je n’avais jamais rencontrée auparavant ».

 

A quand une « Journée de la Jupe » à devant l’Assemblée Nationale. Cela vaudrait le coup, non ?

En tout cas, bravo Messieurs : vous êtes vraiment qualifiés pour voter des lois visant des musulmanes au nom de la « dignité de la femme » et de l’égalité des sexes !

 

En avant-première mondiale le (peut-être) prochain titre du  Canard Enchainé :

Après DSK, l’affaire Tron : c’est l’UPM qui en tire une tronche !

 


(Prochaine Note: demain)

[1] Peut-être est-ce pour cela qu’elle semble avoir été parfois mal à l’aise dans la Commission sur le voil intégral (cf. le compte rendu des auditions publié par La Documentation française)

14/09/2009

Le Grand Orient et les femmes (suite et fin)

Chers Amis,

J’ai reçu tellement de réactions intéressantes à ma dernière Note sur le GOF et les femmes que je continue, quitte à ce que la fin des Notes sur « Vivre libre » soit encore retardée.

De toute façon, vous allez le constater, cela pose, autrement, la question de la liberté/libération.

Ne serait-ce que parce que plusieurs personnes m’ont dit (en substance) : «ta note est très bien. Mais tu devrais faire plus attention le GOF est puissant. C’est très risqué de t’en prendre à lui. »

Même si c’était le cas (normalement les gens du GOF doivent, selon leur propre conception de la démocratie, accepter la critique, non ?), qu’importe.

La liberté a un prix et ce n’est ni la 1ère fois, ni la dernière, que je m’en acquitterai.

Je vais donc aggraver mon cas. Car l’actualité versatile a déjà oublié cet événement, qui pose cependant plusieurs questions de fond.

 

Si beaucoup d’internautes m’ont dit s’être « délectés », « régalés », etc…quelqu’un a trouvé que je virai trop « au style Canard Enchaîné ».

Sauf que, justement, dans le dit Canard, il n’y a pas un mot sur ce refus des Francs-maçons du GOF d’initier les femmes.

Autrement dit, le slogan de mon blog pourrait être :  « Le Blog où vous trouverez ce qui n’est pas dans Le Canard Enchaîné », ou quelque chose d’approchant. La formulation peut être améliorée…

Et puis, j’annonce la couleur : « Notes amusantes et savantes… »

 

Le Blog avait commencé par être plutôt savant, et la savanterie, ou même une savantissime savantitude (clin d’œil à Ségolène) y revient de temps à autre.

Depuis que la Samaritaine a disparu, c’est dans le Blog que l’on trouve tout (et le reste).

Mais un Blog n’est pas un article dans une revue scientifique à Comité de lecture.

Et tenter de vivre libre, c’est peut-être justement d’avoir plusieurs facettes, de regarder la réalité de plusieurs manières, avec plusieurs formes de pensée.

 

Bon, tentons, maintenant, après avoir remercié toutes celles et ceux qui ont fait des éloges (et je n’y suis pas indifférent , étant très vaniteux!), de dialoguer avec celles et ceux qui ont fait des remarques.

Cela complètera la Note précédente, car c’est vrai que l’humour, c’est bien, mais c’est une sorte de coup de gueule, qui n’est pas exhaustif, loin de là.

Je reprends donc les divers arguments qui m’ont été présentés, en les résumant sans (j’espère) les déformer :

 

1ère Remarque : « les hommes ont bien le droit de se retrouver entre eux, de temps à autre. Cela n’est pas choquant en soi ».

OK. J’avoue que ce genre de regroupement unisexe, personnellement je n’en vois pas l’intérêt.

Je comprends facilement que des femmes ait éprouvé (éprouvent encore dans certains pays, groupes, situations) le besoin de parler entre elles de la domination masculine et quelles sont les meilleures manières de s’en libérer.

 

Mais, d’une part, les hommes n’ont pas, globalement, à se libérer d’une domination des femmes, même si, telle femme peut dominer tel ou tel homme (domination sociale d’un côté, domination individuelle de l’autre, ce n’est pas la même chose)

D’autre part quand le GOF a été créé, au XVIIIe, ce n’est certes pas pour cette raison que la maçonnerie a été réservée aux hommes.

 

Cela est d’abord du à la façon dont, justement, les femmes étaient marginalisées et considérées comme des mineures, des être humains non libres.

Les francs-maçons «  doivent être hommes de bien et loyaux, nés libres et d'âge mûr et discrets, ni serfs ni femmes ni hommes immoraux et scandaleux, mais de bonne réputation. »

Retenez bien cela : la franc-maçonnerie a, historiquement, été réservée aux homme à partir d’une conception de la femme comme n’étant PAS NEE LIBRE.

 

 Ensuite, et la fin de la phrase le montre, la mixité aurait immédiatement provoqué les plus folles rumeurs (débauches, etc : il y a eu ce genre d’accusations, même avec un GOF exclusivement masculin).

Donc la seconde raison de réserver l’initiation maçonnique aux homme : l’idée que MIXITE = IMMORALITE.

Dés ce moment là d’ailleurs, les femmes de l’aristocratie purent participer à certaines activités : l’appartenance à une haute classe sociale compensait en partie « l’infériorité » due au fait d’être femme.

On n’en n’est plus là naturellement.

Et le recours à l’histoire, à la tradition, voire aux textes fondateurs, est analogue à l’argument : les femmes ne peuvent pas être prêtres, car Jésus n’avait que des disciples hommes.

 

Remarque 1 bis : « pour discuter de problèmes de « masculinité » être entre hommes n’est pas inutile, et on ne discute pas assez de la masculinité »

Je suis tout à fait d’accord sur la 2ème partie de la remarque.

Les hommes ont cru qu’ils étaient à la fois le masculin et le genre humain ; qu’ils représentaient la normalité.

Donc ils ne se sont guère posé l a question de l’identité masculine dans une humanité qui comporte deux genres.

OK, mais là encore le faire entre hommes uniquement me semble très appauvrissant. Attention à la substantialisation identitaire. Ce qui est intéressant c’est l’aspect relationnel de l’identité.

Toutes les questions posées par le mouvement queer vont contre cette substantialisation.

 

Mais, bon, je suis tolérant, et admet tout à fait que puisse exister des choses dont, non seulement, je ne vois pas l’intérêt, mais qui me choquent. Seulement je ferai, à mon tour remarquer

1) que se retrouver entre mecs de façon informelle, de temps à autre, et avoir, dans la longue durée une organisation unisexe, ce n’est pas du tout la même chose. Ah non, pas du tout.

2) que le GOF ne s’est pas particulièrement fait remarquer par une réflexion poussée sur la « masculinité », mais en revanche, il débat et prend parti sur la plupart des sujets de société, où on ne voit pas en quoi ce peut être intéressant de discuter « entre hommes ».

3) que les gens qui mettent en avant ce genre d’arguments le considèrent eux-mêmes comme très insuffisant puisqu’ils l’accompagnent de 2 autres (indiqués ci après) :

 

Remarque 2 : « il existe des loges féminines et « même » (délicieux même !) une obédience mixte : Le Droit humain. »

Yes, I know.

Mais c’est par transgression, et pour protester (déjà) contre le machisme de ces Messieurs, qu’avec Maria  Deraismes (une grande et belle figure trop méconnue), le processus de création du Droit Humain s’est enclenché dans les années 1880.

L’idée au départ était de rendre mixte toute la franc-maçonnerie.

Récupérer, plus d’un siècle plus tard, ceux que l’on a mis dehors, prendre argument de leur existence pour continuer à ne pas changer, cela ne me semble pas d’un progressisme échevelé, non ?

Et le fait est que certaines femmes veulent adhérer au GOF. Pour plusieurs raisons, et notamment parce que ce qu’il dit et ce qu’il fait est ce qui a le plus d’impact.

 

Mais même si je désapprouve, même si comme individu je ne comprends pas (comme sociologue, je cherche à tout comprendre, mais c’est une autre histoire), je peux arriver à admettre, à tolérer.

Encore une fois : la tolérance ne se mesure pas à l’anecdotique mais à ce qui vous choque.

 

Remarque 3 : « que voulez-vous, il y a toujours une distance entre ce que l’on dit et ce que l’on fait ! »

Là, on en arrive au cœur du problème.

Et le terme de « distance » est totalement inapproprié. Le GOF n’est pas dans une « distance », dans un « écart » entre l’idéal et le réel : il est dans un double discours permanent.

Cela, même l’ancien Grand Maître l’a, d’ailleurs, fait remarquer.

D’un côté, il se veut le meilleur défenseur de la laïcité, un farouche partisan des « valeurs républicaines »…. Pour les autres.

De l’autre, il invoque, pour ce qui le concerne, la « tradition ».

Une tradition qui, quand elle a été créée signifiait (il faut le redire) que les femmes n’étaient pas considérées comme des individus libres et que la mixité était synonyme d’immoralité.

Pour ce qui le concerne, il est toujours, implicitement mais structurellement, lié à ces 2 croyances, qui sont le contraire de la laïcité et des dites valeurs républicaines d’aujourd’hui.

 

Le pseudo argument de la « distance » déborde de beaucoup le cas du GIOF nous est seriné par tous les rrrépublicains, quand on les pousse un tantinet dans leurs retranchements.

Même Dominique Schnapper l’utilise, et précisément pour excuser et fortement minimiser le fait qu’en France les femmes aient voté un siècle après les hommes.

Alors que cette différence d'un siècle est liée au fait même que l'être humain femme n'était pas considérée comme un individu abstrait. Seul l'homme (blanc) était perçu ainsi.

 

Et après cela, nos rrrépublicains chéris affirment, sur toutes les chaînes de télé et de radio, complaisantes et complices, non seulement que l’égalité homme-femme mais que la mixité  constituent les valeurs centrales de la laïcité.

Ils s’indignent en choeur de ce qu’il existerait des minorités religieuses ou culturelles qui ne respecteraient pas scrupuleusement cette laïcité-mixité.

Ils ont ainsi des tas de sujets où nos rrrépublicains ne se privent pas de traiter de traître à la laïcité tous ceux qui n’en ont pas la même conception qu’eux.

Et sous le prétexte que « la laïcité républicaine » (sic) ne saurait tolérer le moindre adjectif, ils font passer leur conception de la laïcité (souvent entachée de beaucoup d’ignorance) pour LA laïcité.

 

Les gogos s’y laissent prendre car la société dominante marche à fond dans la combine :

lors de la Commission Stasi une femme membre de cette Commission, avait proposé qu’une loi rende illégal, en France, les associations non mixtes.

Elle prétendait qu’elle en connaît une (naturellement musulmane !) exclusivement réservée aux hommes.

Je n’ai d’abord rien dit, pour observer ce qui allait se passer. Eh bien l’idée a paru raisonnable à beaucoup. Il a fallu faire remarquer qu’alors la Commission Stasi allait proposer d’interdire le GOF.

Qu’est-il arrivé : on est immédiatement passé à l’ordre du jour.

Ce qui devait être interdit, au nom de la laïcité, une minute avant était, miracle !, devenu chose la plus normale qui soit dans la RRRRépublique.

 

Tous les gens qui prônent la tolérance ajoutent : oui mais, attention, il y a de l’intolérable ». Eh bien, mon INTOLERABLE à moi-même personnellement, il est là.

Il est dans le système triangulaire qui fonctionne très bien dans notre douce France :

 

Il est chez ceux qui fonctionnent ainsi :

-         1.No body étant perfect, j’ai bien le droit de ne pas faire ce que je dis. D’ailleurs, je suis laïque par essence, par définition.

-         2.Cela n’empêche en aucune façon d’être un chevalier du bien (enfin le bien validé par l’audimat !) ; ceux qui disent autre chose que moi doivent aller rôtir en enfer : ce sont des antilaïques, au mieux d’horribles hérétiques

-         3.D’ailleurs, ma légitimité sociale reste intacte ; je suis et reste un grand défenseur de la laïcité socialement reconnu, es qualité et tout et tout

 

Je connais beaucoup de maçons, même parmi ceux qui ont peut-être voté pour le maintien d’un GOF unisexe, ou qui sont membres d’autres loges unisexes qui ne sont pas dans le 2 et dans le 3.

Parce qu’ils ne se croient pas laïque par essence, parce qu’ils ne court-circuitent pas le débat par du terrorisme intellectuel.

Je l’ai indiqué d’ailleurs dans ma Note précédente, ce qui à faire à un internaute que j’avais « réussi le tour de force d’une charge nuancée » !

Avec ceux là, OK, j’ai un sérieux désaccord : ce n’est pas grave. Au contraire, presque : pas de pensée unique, pas de clonage intellectuel.

J’ai d’ailleurs dédié cette Note précédente à un maçon qui était pour le maintien du GOF exclusivement masculin, mais qui n’était certes pas dans une orthodoxie laïque et ne craignait pas le débat.

 

Mais les ORTHODOXES DE LA LAÏCITE , ceux qui font exactement le contraire de ce qu’ils disent et surtout qu’ils veulent imposer aux autres.

Ceux qui, en plus, ne sont pas socialement ridicules, et puent la bonne conscience, ceux là sont des gens extrêmement dangereux.

Plus menaçants pour la laïcité que les « intégristes » religieux puisqu’ils l’emprisonnent..

Et si la laïcité française à mauvaise réputation, est internationalement peu attractive, ils en ont une large part de responsabilité.

***

Appendice : Remarque 4. un sociologue qui connaît bien la maçonnerie m’a fait remarquer qu’il y avait peut-être une raison « valable » à la décision du GOF : son caractère initiatique.

Il existe 2 grands types de ritualisation initiatique : les féminines et les masculines.

Et donc, poursuit mon ami, on peut invoquer une raison « anthropologique ». Cependant, ajoute-t-il, « la plupart des loges affiliées au GO ont des réunions qui ressemblent plus à des réunions de club politique qu’à des réunion de société initiatique ».

Cette remarque m’a beaucoup intéressée. Elle induit plusieurs commentaires :

 

-          on peut constater qu’au départ, la maçonnerie n’a pas prévue une double initiation divergente, féminine et masculine.

-          d’ailleurs, exception confirmant la règle, au XVIIIe, une femme a été initiée comme un homme : elle avait réussi à surprendre les « secrets » des maçons (en faisant un trou dans le mur !). Ces derniers, aimablement, lui ont donné le choix : l’initiation ou la mort. Devinez ce qu’elle a choisi, cette coquine !

-          dans la décision prise il y a quelques jours de ne pas initier les « dames » au GOF, la « raison anthropologique » n’a pas été invoquée

-          l’invoquer poserait le très intéressant problème : existe-t-il des invariants anthropologiques ? Si oui, lesquels ?

 

On sait que le grand combat de Benoît XVI et de l’encadrement épiscopal du catholicisme consiste précisément à affirmer haut et fort qu’il y a des invariants anthropologiques et qu’il ne faut pas les transgresser.

     Ce n’est pas parce que l’Eglise catholique le dit que c’est forcément faux. Mais, ce n’est pas forcément vrai non plus.

     Il s’agit d’un débat essentiel (dont le blog pourra reparler).

On y retrouve l’ambivalence dont parlait les Notes : « Vivre libre» entre ordonnancement du monde et ordre établi.

Mais je ne poursuis pas cette piste, aujourd’hui. Je dirai seulement ceci :

Pour que le GOF ne soit pas dans une hypocrisie structurelle, dans un double discours constant, il devrait s’obliger à dire qu’il a la même position de principe que l’Eglise catholique, … avec des conséquences internes analogues. Ou alors, il doit vite se reprendre et changer.

Sinon, en tant qu’organisation en tout cas, il n’a plus de crédibilité laïque.

***

PS : Muriel, ce que vous demandez, dans votre commentaire de la Note du 6 septembre, relève typiquement de l’accommodement raisonnable, tel qu’il est compris dans la laïcité québécoise

Je vous renvoie à mon ouvrage : Une laïcité interculturelle, Le Québec avenir de la France ? (L’Aube, 2008).

 

2ème PS de dernière minute : Rodet, il me semble avoir une entourloupe dans votre commentaire car si l’info donnée par la presse était complètement fausse, le GOF aurait protesté, et il a les moyens de se faire entendre.

Ce qui m’intéresse, ce n’est pas ce qu’il n’y a pas d’écrit dans les statuts, c’est la réalité du fonctionnement.

Oui on non, il y a-til eu refus à56% d'initier les femmes?

Oui ou non, l'ex grand maître, J.-M. Quillardet a-t-il déclaré: "On apparaît en contradiction avec nos propres principes de laïcité, d'égalité, d'universalité" (Le Monde, 6-7/9/09)

 

 

06/09/2009

Le Grand Orient : OUI aux Loges-piscines exclusivement réservées aux Hommes.

Après leur très brillante interprétation de Tartuffe, les Frères jouent à la COMEDIE FRANCAISE, deux nouvelles pièces en alternance : La paille et la poutre  (d’un certain J-C) et Heureusement que le ridicule ne tue plus (d’après Labiche)

 

(Note à la mémoire de mon ami Bruno Etienne)

 

Oui, c’est inhabituel, du jamais vu dans le Blog : 2 Notes en 2 jours, et deux « Grands bêtisiers de la laïcité » en 8 jours

Mais je reviens d’un séjour sur Mars et, là, surprise, j’ai eu la parfaite illustration de ce que j’indiquais dans ma Note d’hier : « Vivre libre II ; L’anticléricalisme nécessaire. »

 

La planète Mars se divise en 2 parties : Lutèce d’un côté, Province de l’autre.

Il existe des loges-piscines de Francs-charpentiers regroupées sous le nom de Grand Orient  dans les deux régions. Et certaines m’ont invité à débattre de la laïcité.

Il existe chez nos amis francs-charpentiers du GO 2 sortes de réunions :

-         les fermées réservées aux seuls membres, aux gens normaux, à des hommes;

-         les ouvertes, plus laxistes (un peu comme la « laïcité ouverte », si vous voyez ce que je veux dire) où d’autres humains (moi par exemple, et même quelques femmes) peuvent venir.

Naturellement, les réunions avec Bibi étaient des réunions ouvertes.

Et à chaque fois, il y avait 2 intervenants : un Franc du collier et moi.

 

En Province, j’ai parlé notamment dans la ville de Festival, invité par une loge-piscine intitulée « La Cane de Jeanne ». Ce fut un débat super-intéressant dans une atmosphère extrêmement conviviale, avec des remarques et questions fort pertinentes

Bref, tout se passait très bien, quand … cherchez la femme : l’une d’entre elles demanda : « Pourquoi je ne peux pas adhérer à votre loge-piscine ? »

Le big chef expliqua que les Francs-charpentiers avaient des loges-piscines réservées aux femmes, où celles ci pouvaient s’ébattre librement entre elles. Il existait même, en cherchant bien, quelques loges-piscines mixtes. C’est dire la largesse extrême de la fraternité charpentière !

Mais, allez savoir pourquoi, les femmes ne sont jamais contentes, et celle-là, dépitée, cita Brassens : « C’est vous que je préfère ».

 

Dans la conversation plus perso qui suivit, mes sympathiques Francs-charpentiers m’expliquèrent que cette femme avait raison ; qu’il était stupide de perpétuer une tradition qui faisait sens au XVIIIe siècle, mais plus du tout maintenant.

Ils me rassurèrent en m’indiquant que les choses étaient train de changer et que très prochainement l’usage exclusif de leurs loges-piscines aux hommes serait aboli.

 

Quelques temps après, c’est à Lutèce que la loge-piscine « Le Cadet de mes soucis » m’invita. Là, le débat fut plus sportif.

Ma conception de la laïcité fut jugée accommodante, donc mollassonne, flasque, voire avachie.

 Il fallait tenir ferme, comme le chène face au roseau, les valeuuuurrrrs  rrrrrrépublicaines, dont la laïcité-mixité était le plus beau fleuron.

Je compris mieux pourquoi, il était plus qu’impératif pour eux de changer le règlement de leurs loges-piscines.

 

Je dois dire de plus qu’un débat sportif n’est pas pour me déplaire. Par ailleurs, j’aime beaucoup la façon dont les francs-charpentiers débattent :

aucune manifestation en pour ou contre, aucun applaudissement ni murmure. Bref, on tente de brider toute réaction sommaire, émotive ; de privilégier la raison rationnelle

Cela change des « débats » télévisés.

Cela rejoint ma propre conception de la rationalité et du débat démocratique.

 

Cependant à Lutèce, quelque chose m’a gêné aux entournures : toutes les interventions provenant de la salle avaient abondé dans le sens de mon contradicteur franc du collier. En soi, rien de répréhensible,

… sauf qu’à la fin de la séance, pas mal de francs-charpentiers sont venus chaleureusement me remercier de mon intervention. Tellement chaleureusement, et parfois avec des commentaires très élogieux, que cela dépassait les nécessités de la politesse. Comme si j’avais parlé pour eux, par procuration.

Diable, pourquoi ne s’étaient-ils pas exprimés en séance ? La parole franc-charpentière serait-elle moins libre que je ne l’avais cru ?

Il y aurait-il implicitement une orthodoxie laïque ?  Du moins au Cadet Rousselle lutécien.

Car cela contrastait complètement avec la liberté de ton qui avait régné à Festival où des avis divergents s’étaient exprimés dans la réunion elle-même.

 

En tout cas, j’attendais confiant le résultat de la consultation sur la mixité des loges-piscines. Nul doute que, massivement…

Et le résultat vient de tomber : un score à faire rêver Nicolas Sarkozy lui-même : 56%.

Oui, mais 56% contre la mixité !

La proposition (il faut dire extraordinairement révolutionnaire !) : laisser chaque loge-piscine être mixte ou pas, selon son franc désir, ne fut pas retenue.

 

Merdre, on veut rester entre mecs dans nos loges-piscines ont voté ces Messieurs. C’est pour’ pas avoir d’emmerderesses dans nos pattes qu’on a choisi le G.O. On s’rait plus chez nous sinon !

Même certains ont dit au journal Le Monde (6-7 septembre) : vous savez, les gonzesses, on leur donne la main, elles vous bouffent tout le bras : « Si nous initions des dames[1], rien ne dit qu’elles ne postuleront pas au conseil de l’ordre et deviennent, pourquoi pas, grande maîtresse ! ».

C’est vrai çà, les femmes ne savent plus rester à leur place et donc « l’identité » (également invoquée auprès du Monde) du G.O. ne s’en relèverait pas.

 

Il y a même un frère qui m’a demandé, très inquiet, s’il était vraiment vrai qu’en France le Parlement acceptait des « députés dames ».

Honteux, j’ai du me résoudre à lui répondre (comme en Bretagne) : « dame, oui. ». « Quand même moins du seuil fatal de 5%? » a-t-il interrogé, franchement apeuré cette fois, mais gardant espoir.

Il y en a 17% ai-je confessé très piteusement.

17% !!!. « M’alors, les valeurs républicaines sont foutues ! » Là, il est tombé dans un coma profond qui depuis pèse d’autant plus sur ma conscience qu’un médecin femme a ignoblement profité de cet état comateux pour tenter de le soigner.

J’aurais du lui annoncer cette très triste nouvelle avec beaucoup plus de ménagement.

Et surtout le rassurer en lui indiquant que la France est quand même dans la queue de peloton en la matière. Non mais, les valeurs républicaines sont toujours fièrement debout !

 

Un autre m’a dit : « Tout fout l’camp sur votre planète. Il paraît que, dans un pays d’Orient, un [vrai] fou voulait avoir 3 femmes ministres dans son gouvernement. Trois femmes, vous vous rendez compte ! Des gens un peu moins déraisonnables ont réussi à en larguer deux. Mais il en est quand même resté une. Quel laxisme ! Heureusement, nous ne sommes pas l’Orient, nous sommes le Grand Orient. »

 

 

Un troisième franc-charpentier est intervenu : « En plus, en 2008, il y a eu l’initiation sauvage de 6 femmes[2] au sein de 5 loges-piscines, tout comme il y a des ordinations sauvages de femmes prêtres. On va-t-on bon Dieu ! Chez nous, cela devient exactement comme chez les cathos»

Et comme, timidement, je faisais remarquer que de très mauvais esprits, limite  blasphémateurs, allaient justement dire, que leur critique de la religion… je fus interrompu de façon péremptoire : « Rien n’a voir avec cet obscurantisme moyenâgeux.  Nous sommes les Lumières,  nous n’avons que trois siècles de retard. »

 

Je bats ma coulpe : j’ai eu quelques instants de doute. Mais, finalement, je fus complètement  rassuré.

Pour deux péremptoires raisons :

-         d’abord, Le Monde indique les réactions recueillies auprès des francs-charpentiers: ceux-ci récusent tout « sexisme », le Grand Maître rejette, d’un revers de manche, toute accusation « d’attitude rétrograde ». Ouf, des idiots comme moi auraient pu s’y laisser prendre.

-         Ensuite non seulement mes amis du GO ne sont pas sexistes, mais ils n’ont aucune féminophobie. De cela je peux en témoigner : dans le repas qui a suivi ma prestation à Lutèce, il y avait plein de femmes : aux cuisines, pour servir les plats, pour débarrasser les tables.  C'est dire!

Je n’aurai donc aucune raison d’éclater de rire (ou de me mettre en colère) quand l’un d’entre eux prétendra me donner une leçon de laïcité !



[1] Des "dames" ! Donc parler d"'emmerderesses" et de "gonzesses" relève, bien sûr, du fameux "droit à la carricature". Les francs-charpentiers ne disent même pas les greluches, les meufs, les nénettes, les mémés, les rombières, les tombeuses, les nymphos, les bobonnes, les mégères non apprivoisées,... Non ils usent d’un terme hyper galant, voire désuet. Ils ont le respect et tout et tout. Ils sont trop choux ces francs-charpentiers !

[2] Et Richard Antony de chanter : « Dis moi, fille sauvage… ». Oui, je sais, la référence date, mais dés années 1970, pas du XVIIIe siècle 

30/08/2009

Philippe Val, médaille d’or du Grand Bêtisier de la laïcité.

Vous toutes/tous qui avez pleuré à chaudes larmes parce que la France n’a pas obtenu de médaille d’or aux Championnats du monde à Berlin, séchez vos larmes. Désormais, un Français a obtenu celle du Grand Bêtisier de la Laïcité.

Je m’étais un peu relâché et le Blog n’avait plus décerné cette médaille depuis plusieurs années, malgré les nombreuses occasions qui s’étaient présentées.

En cette fin de vacances, j’ai décidé de pallier à cette fâcheuse erreur et j’ai convoqué sous l’Arc de Triomphe, un Grand Jury, pluraliste, paritaire, et tout et tout, composé de Moi-même personnellement, de E. J.. Rotbébau, de Naej Torébuab et de Jehan Beleros.

Un jury magnifique.

Mes vieux potes et mes vieilles potesses qui surfent sur ce blog (ainsi que l’étudiante de Paris IV qui fait son master sur l’équipe du Semeur) savent, qu’en souvenir de ma jeunesse folle, j’y aurais volontiers associé Calvin Augineau[1]. Malheureusement, il a déjà quitté cette vallée de larmes

 

Bref, après délibération, ce jury a élu, par bulletins ultra secrets(d'Etat), à l’unanimité plus une voix, Monsieur Philippe Val.

M. Ph. Val, ex-directeur de Charlie-Hebdo (pas celui de la Grande époque, l’autre, la pâle imitation…) a été nommé, via Carla et consort, directeur de France-Inter. Comme planait l’ombre du Seigneur Sarko Ier lui-même dans cette nomination, tout un chacun craignait le pire.

Or, nous apprend Le Monde (29/08/2009) « A France-Inter, l’arrivée de Philippe Val n’a pas été suivie du ‘coup de balai’ redouté. »

Reste notamment Stéphane Guillon, qui se complait dans des plaisanteries pipi-caca-boudin (et il n’est plus étudiant, lui !), qui s’est notamment moqué à l’antenne du physique de Martine Aubry

(signe de l’hyperpuissance de ce genre de mec, de la mollesse du féminisme en France[2] et du déclin des politiques : pratiquement pas de protestation et Martine Aubry a du prétendre que cela l’avait fait rire !).

Donc nous subirons toujours Guillon for ever. Tant mieux pour lui !

Mais Ph. Val a quand même pris une « toute première décision » : il a « renvoyé Frédéric Pommier, le titulaire de la revue de pesse de 8h30, qui aurait eu un penchant à trop citer Siné Hebdo, l’hebdomadaire concurrent [et dissident] de Charlie-Hebdo ».

Un crime qui mériterait assurément la prison, voire la torture, mais comme nous ne sommes pas (encore ?) en Iran, cela a été juste un simple renvoi.

Un renvoi dans dans une relative indifférence (sauf quand même l'intersyndicale de Radio-France et quelques articles mais rien qui passe en boucle et suscite un mouvement d'indignation, or cela aurait naturellement été le cas si une mesure semblable avait frappé Guillon. Il faut dire que les plaisanteries de Ph. Pommier n’étaient pas dégueu, mais un tantinet subtiles, elles).

 

Petit rappel pour celles et ceux qui auraient vécu ces dernières années au fin fond de la Sibérie : Ph. Val s’est voulu le champion du monde, médaille d’or toutes catégories de la liberté d’expression, au moment des caricatures dites de Mahomet.

Bravo, Philippe Val, ça c’est du GRAND ECART. Le French cancan, à côté, c’est TOTALEMENT du flan !

La liberté d’expression, c’est excellent  vis-à-vis des musulmans. Pour le reste, c’est selon son bon plaisir...

Quel ART du DOUBLE JEU, Quelle MAESTRIA dans le DOUBLE DISCOURS! On en reste pantois, et très admiratif.

 

Ph. Pommier faisait très bien son travail. Grâce à sa revue de presse, on savait quel canard acheter, en plus des habituels. Et quand on lisait l’article au complet, on constatait qu’il en avait dit l’essentiel, malgré sa forte contrainte de temps.

Bref Ph. Pommier faisait ce que l’on appelle, en journalisme, du « travail propre ».

Un grand Merci Monsieur Pommier. Et bravo pour votre probité professionnelle.

 

Ph. Pommier a commis une faute professionnelle : il n’a pas pratiqué l’autocensure. Il a commis le blasphème suprême en citant Siné-Hebdo.

D’où l’œuvre de salubrité publique de M. Val, qui méritait bien sa médaille d’or au beau pays des droits de l’homme.

Avec en plus, une certaine dose de mépris comme cerise sur le gâteau.

 

PS : la suite de : Vivre libre n’est pas une mince affaire (Note du 24 août) dans quelques jours.

2ème PS: oui, je sais, je date un peu: Le Monde rappelait une mesure datant d'avant les vacances. Mais que voulez-vous, alors mon illustre jury était occupé ailleurs et ensuite, le temps de le convoquer et de demander au soldat inconnu l'autorisation de tenir une réunion tout près de lui....

 



[1] Pour les autres (qui excuseront, j’espère, ces quelques lignes incongrues pour eux), Le Semeur (qui était l’organe des étudiants protestants) avait, les années précédant « Mai 68 », mis en émoi le protestantisme français en publiant des articles jugés très contestataires et en proposant un abonnement à pris réduit aux « couples tentant l’union libre » (c’était avant Mai 68, vous dis-je, donc faisait hurler à l'époque). Mon pote, Daniel Joubert, signait ses articles Calvin Augineau, et mon propre pseudo était d’aussi mauvais goût (Luther Interruptus).

Pourtant, ayant relu dernièrement certains des articles publiés, suite à une demande d’étudiante en master, j’y ai trouvé une critique globale de la société  et des pouvoirs (politiques et religieux) dont bien des éléments restent, plus de quarante ans plus tard, toujours valides. Cela joint à une défense du pluralisme qui n'était pas très dans le ton de l'époque.

[2] Au Québec, par exemple, des propos aussi sexistes ne seraient jamais ainsi passés comme une lettre à la poste (d’autrefois !)

06/08/2008

LES FAUX CULS DE LA LIBERTE D'EXPRESSION ET LA TURQUIE

Oui, je sais maintenant, l’actualité c’est la Chine, les Jeux Olympiques avec leur double aspect politique et sportif. La tentative, avortée pile poil, d’interdire le parti Justice et Développement par un coup d’Etat judiciaire, est devenue une vieille histoire. Et un blog se doit d’être réactif, son intérêt est de pouvoir suivre l’actu. pas à pas.

Eh bien non, ma conception d’un blog est qu’il est un lieu de liberté. Il est possible de réagir au quart de tour à un événement imprévu, mais qui prend sens dans un ensemble qui fait que l’analyse est déjà prête. Il est possible aussi de ruminer un événement, d’en parler alors que cela ne semble plus de saison, parce que l’on a à dire quelque chose qui ne semble pas avoir été dit.

Sur le Chine et le Tibet, pour le moment en tout cas, je n’ai à dire que vous ne pouvez pas lire ailleurs. Seulement vous recommander, si vous êtes alors quelque part entre Poitiers et Limoges, Angoulême et Guéret (ou, où que vous soyez, si l’envie vous prend) de venir assister, le samedi 23 août à 16 heures à la Conférence que donnera Raphaël Liogier sur Chine et Tibet: histoire, politique, spiritualité

à Villefavard (Haute-Vienne, canton de Magnac Laval, à 10 Km de la N20) et, pourquoi pas, rester le lendemain pour le concert avec l'ensemble de cuivres de Paris (tout renseignement complémentaire sur ces questions: 0555766992).

Directeur de l’Observatoire du religieux et prof à Sciences-Po Aix, Liogier est un spécialiste de ces questions. Je crois avoir déjà recommandé son ouvrage  A la rencontre du Dalaï-lama (Flammarion), qui fait suite à d’autres, notamment Etre bouddhiste en France aujourd’hui (Hachette Pluriel). Il donnera des clefs historiques, culturelles, religieuses et politiques permettant de comprendre l’antagonisme entre la Chine et le Tibet et chacun de ces 2 pays.

Par ailleurs, Villefavard est un des rares villages de France a posséder une salle de conférences et de concert qui peut contenir plus de monde que le nombre d’habitants de la commune : 300 places contre 180 habitants !

Et, avec son acoustique merveilleuse, son architecture originale (c’est une ancienne ferme modèle, transformée pour son nouvel usage), son exposition (cet été sur l’architecture), son jardin japonais, et le cadre bucolique du village, elle vaut le déplacement.

Venez, vous ne serez pas déçus.

 

Mais, pour le moment, petit retour sur la Turquie. Le parti AKP a été condamné par la Cour Constitutionnelle  à reverser à l’Etat 12,9 millions d’€. Il a évité l’interdiction (de peu, 6 juges sur 11 l’ont prononcée ; il fallait 7 voix). Le quotidien Le Monde (1er août 2008) nous a appris les griefs contre l’AKP accusée « d’activités anti laïques » (pourquoi ne l’a-t-il pas fait avant ?).

 

Je cite :

« L’acte d’accusation, plutôt disparate, était une longue liste d’extraits de discours ou de faits rapportés par la presse turque, plus ou moins vérifiés selon l’AKP. Chaque déclaration , favorable à la libéralisation du voile, une majorité des cas, est dûment répertoriée. »

Le Monde cite des exemples. Je les reproduis tous, pour qu’on ne m’accuse pas d’avoir trié et mis les plus anodin. Il y en a 5.

Le premier : une des fondatrices du parti a répondu « peut-être » à la question : « les fonctionnaires doivent elle être autorisées à porter le foulard ? »

Pire qu’un blasphème n’est-ce pas ? Pire, certainement, puisque normalement les laïques sont contre les lois antiblasphèmes !

Un autre cadre aurait dit : « on empêche les gens qui veulent avoir une apparence pieuse de participer à la vie active ». Un troisième : « un psychiatre serait capable de leur expliquer convenablement que le régime n’est pas en danger parce qu’on se voile. » Un quatrième : « demander à une femme d’ôter son voile équivaut à lui demander d’enlever sa culotte. » Enfin, la der des der : « Certains ont pris le voile qui se trouve sur la tête de nos jeunes filles pour se le mettre sur les yeux »

(Là, je suis dévoilé comme un dangereux antilaïque car il m’est arrivé d’écrire des choses équivalente sur les gens qui ont un tchador dans la tête)

Je trouve cela extrêmement significatif. Rappelez-vous, lors des caricatures contre Mahomet ou des citations tronquées de Rodinson par Redeker, pour pouvoir insulter l’islam, comment les chevaliers héroïques de la liberté d’expression sont montés sur leurs blancs chevaux pour la défendre avec vaillance. Ils n’ont pas hésité à prendre des risques inouïs, comme celui de publier les dites caricatures

Le Monde nous apprend, à ce sujet, que le n° de Charlie Hebdo qui les a reproduites s’est vendu à 500000 exemplaires et a rapporté, en une semaine, au directeur de la publication, également actionnaire, plus d’argent que vous et moi en gagneront en plusieurs années de travail.

Cela ne signifie nullement que ce directeur ne soit pas « sincère », mais les sociologues vous diront que, par le plus grand des hasards naturellement, on est souvent sincère dans un sens qui va en faveur de ses propres intérêts ! Le non conscient sociologique, cela existe.

Bref, pour les caricatures comme pour Redeker, que ce soit Charlie, France-Soir, le mari d’Ariel (BHL, pour les incultes du show biz), d’autres intellos de mes deux, la LICRA (dont le responsable s’était fendu d’un ouvrage intitulé Contre l’obscurantisme), tous ces modernes Zola n’avaient pas de mots trop forts, de paroles trop enflammées, pour défendre la liberté d’expression outragée.

Peu importe, selon eux, ce que Redeker avait pu écrire, peu importe le contenu des caricatures, la liberté d’expression, nous ont-ils rappelé, est un principe absolu, qui ne se divise pas, avec lequel on ne transige pas et que l'on défend, même pour des paroles qui expriment le contraire de sa propre opinion, etc, etc.

Magnifique posture. Belles envolées. Ah comme cela faisait chaud au cœur d’appartenir à un Occident aussi lumineux, aussi ferme sur les « valeurs universelles ». Avec des défenseurs aussi sublimes, la liberté d’expression avait devant elle des lendemains qui chantent. Et même des lendemains enchantés.

Certes, il y avait bien eu une minuscule fausse note : dans une tribune du Monde, un pseudo spécialiste de la laïcité, un ignoble traître à toutes nos belles valeurs, un sans foi ni loi républicaines, bref un moins que rien, avait rappelé que, dans l’adage attribué à Voltaire, celui-ci commençait par prévenir qu’il n’était pas d’accord avec les idées dont, ensuite, il défendait le droit à l’expression.

Et qu’ayant refusé d’émettre semblable réserve, les signataires du manifeste en faveur de Redeker n’étaient peut-être pas aussi voltairien qu’ils ne le prétendaient.

Mais qu’importe une goutte d’eau pernicieuse dans le bleu azur de l’Océan.

Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

Et tout à coup patratra  Où sont ils aujourd’hui nos preux chevaliers ? Nos princes de la liberté d’expression ? On les a, certes, entendus dénoncer les limitations par la Chine de l’accès à Internet. Mais, sur la Turquie, silence absolu dans les rangs.

Des laïques ont voulu interdire un parti politique qui, à 2 reprises, a gagné démocratiquement des élections. Ces laïques ont raté de peu cette interdiction, mais ils ont réussi à faire condamner l’AKP par la Cour Constitutionnelle.

Imaginez 2 secondes que l’inverse se produise: un parti au pouvoir menacé d’interdiction et fortement limité dans sa liberté d’expression, parce que certains de ses cadres auraient tenus des propos considérés  trop critiques envers l’islam, ce serait à qui crierait le plus fort !

L’AKP a été condamné, a failli être interdit à cause des propos que j’ai rapportés. Propos avec lesquels on peut être en désaccord, ce n’est pas le problème. Le problème est que les pénaliser est une atteinte manifeste, incontestable à la liberté d’expression.

En condamnant effectivement le parti à une lourde amende (même si elle n’a pas été jusqu’à l’interdire), la Cour a donné un signal ; continuez à tenir de tels propos, et nous vous interdirons. Censure préventive.

.C’est vraiment le moment de reprendre l’adage voltairien : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je dépendrai votre droit de le dire. »

Les merveilleux défenseurs de la liberté d’expression sont à la plage, sans doute. Ayant coupé tout contact avec l’information, ils ne savent pas l’ignominie subie par leur belle dame, et combien elle se trouve maculée par leur propre camp.

Sinon, vous pensez bien que leur réaction aurait été immédiate et, à la mesure de l’événement, terrible, grandiose. France Soir, Charlie Hebdo auraient immédiatement reproduit les propos incriminés en se déclarant solidaires. Certes, cela n’aurait sans doute pas induit une vente de 500000 exemplaires pour l’hebdomadaire.

Mais, précisément, quelle belle occasion de démontrer que la défense de la liberté d’expression n’a rien, mais vraiment rien à voir, avec une opération commerciale!

La liberté d’expression ne se divise pas, ce sont eux-mêmes qui le proclament haut et fort.

C’est une cause sacrée !Or, pas un seul de ces charlatans de la liberté d’expression n’a protesté. Non, pas un seul.

 

Et le pire, c’est que non seulement ils sont ignobles, ces médaillés olympiques du double jeu, du double discours, ces souilleurs de la liberté d’expression dont ils se servent au lieu de la servir, mais en plus ils s’avèrent d’une bêtise extrême.

Car je suis persuadé qu’ils ne se sont même pas rendus compte que hier, sois disant d’une sensibilité extrême à la liberté d’expression, ils s’en foutent plus que royalement aujourd’hui. Au contraire, ils approuvent, par leur silence, la censure contenue dans la condamnation. Peut-être même certains auraient trouvé l’interdiction justifiée. En tout cas aucun n’a protesté face à son éventualité.

Leur bêtise crasse, leur cerveau vide de pensée et pleins de stéréotypes leur permet de n’avoir absolument aucune mauvaise conscience. Et bientôt vous allez les retrouver, encore et toujours, fiers d’eux mêmes et de leur belle âme, chevaliers blancs de la liberté d’expression, dés il s’agira d’un contenu qui leur plait.

Et une fois de plus les gogos, les gogols de l’intellect applaudiront, ravis. Et tout ce petit monde communiera dans le « refus de l’obscurantisme ».

Pour un sociologue, c’est absolument  fascinant. Pour un citoyen, c’est à pleurer de honte.

Attention, la bêtise crasse, est une maladie très contagieuse. Le stéréotype social est un virus qui traîne dans toutes les poubelles. Il peut détruire l’intelligence de façon quasiment irréversible. Il a déjà atteint de nombreuses personnes sans qu’elles ne présentent le moindre symptôme apparent. La contagion peut se faire par la bouche, les oreilles, les yeux, les mains…. Bref, tout ce qui permet de communiquer.

En revanche, on peut se prémunir de ce très dangereux virus par un remède de cheval (légitime puisque sa survie comme être véritablement humain est en jeu). Oui, il est possible de se prémunir EN CRACHANT SON MEPRIS.

PS : Cela fait plusieurs semaines que je souhaite présenter l’ouvrage Les filles voilées parlent (La Fabrique), d’autant plus qu’en France et à l’étranger (encore avant-hier lors d’une Université d’été d'une Université de Madrid) on me pose des questions sur les suites de la loi de 2004.

Mais l’actualité (Conseil d’Etat versus femme en burka ; Turquie) a fait différer cette présentation. Et, comme en août, il est un peu difficile de ce procurer les livres qui ne sont pas de purs produits de consommation, je ferai une Note sur cet ouvrage à la rentrée.

Prochaine Note (sauf imprévu) : Espérance de vivre contre espérance de vie.

 

RAPPEL : les 2 prochains numéros du Nouvel Observateur  comprendront un supplément gratuit de 96 pages : 7-13 août : l’islam de M. Amir Moezzi et P. Lory et 14-20 août : le christianisme de J. Baubérot.

23/12/2006

L'ATTRISTANTE BÊTISE D'UNE COMMISSION PARLEMENTAIRE

Le beau pays de France se distingue d’autres démocraties par l’existence d’une Mission interministérielle, rattachée au Premier Ministre, chargée de combattre les « sectes », ensuite les « dérives sectaires ». Le changement de terme a d’abord correspondu à un changement d’orientation. Après les « dérives » d’Alain Vivien, qui se prenait pour Saint-Just et faisait alliance avec les pires communistes chinois, et devant (notamment) les avis provenant du Ministère des affaires étrangères indiquant à quel point l’image de démocratie française était atteinte, et vraiment pas seulement Outre-atlantique, on semblait décider, il y a 2 ou 3 ans, à faire preuve d’un peu de raison.

 

Un peu de raison, qu’est-ce à dire ? Il est nécessaire d’aller un peu au fond des choses, de réfléchir à ce que signifie vivre en société. Donc, excusez-moi d’avance, prenez votre mal en patience ; je vais faire une assez longue digression.

Toute société a ses marges, c'est-à-dire comporte en son sein des personnes qui pensent et vivent de manière différente de ce qui est la pensée habituelle, normale donc normée, dépendante de normes sociales : même une société dite pluraliste est contraignante  en matière de pensée : et 50, 100 ans après, on affirme souvent à propos d’une personne qui, bien que novatrice sur certains sujets, avait des préjugés sur d’autres : « il avait les idées de son temps », sur ce point, il n’était pas original mais «partageait les préjugés de son époque ». 

Mais ce n’était ni le « temps » ni « l’époque » qui imposait en soi ces préjugés, cette pensée stéréotypée, c’était la société du temps qui se l’imposait à elle-même. Une société, pour pouvoir fonctionner à besoin de l’existence d’idées communes, de pensée communes, engendrant des comportements communs. Elle a besoin, pour exister de façon relativement stable d’une pensée fixe, donc plus ou moins figée, de pré-jugés (au sens strict) communs. Si tout  le temps et de tout côtés s’opèrent des mises en question cela devient vite invivable. Idées fixes,  routinières, stéréotypes, etc autant de schèmes sociaux nécessaires à la vie commune. Cela n’a rien de honteux et je ne suis absolument pas dans la condamnation moraliste : on bénéficie du fait de vivre en société, il ne faut pas l’oublier. Mais le prix à payer, c’est forcément que les pensées communes ne sont pas très intelligentes, c’est le moins que l’on puisse dire. En fait, soit elles sont prosaïques et neutres  quant à l’intellect, soit elles abêtissent.

 

De même que les théoriciens du contrat social ont montré que l’être humain aliénait une partie de sa liberté pour pouvoir exister en société, de même l’être humain aliène une partie de son intelligence, de son libre examen, de sa liberté de penser pour qu’un petit dénominateur commun, une pensée rabotée et robotisée, puisse faire exister du lien social. OK, mais, merde, point trop n’en faut dans cet abandon. Et comme les gens sont différents, certains en abandonnent beaucoup (il semble, à les lire, que certains Parlementaires soient dans ce cas : ils ont fait le don admirable à la société de la plus grande partie de leur intelligence et sont devenus, par amour pour autrui sans doute, des handicapés du bulbe). D’autres veulent moins aliéner de leur personnalité, et les refus d’abandon sont plein de périls : cela peut aller jusqu’à la folie. Folie géniale d’un Antonin Arthaud,  risque d'une folie plus ordinaire, apparente ou masquée de beaucoup d’autres.

En effet, il ne s’agit pas de dire que la société est bête et que plus  l’individu est asocial plus il est intelligent. Non c’est beaucoup plus complexe et dialectique.

 

D’abord, parce qu’on a aucune garantie que c’est bien son intelligence que l’on refuse d’aliéner. Cela peut être plein d’autres choses.

Par ailleurs, le lien social est fait de bêtise ET d’intelligence sédimentée : une société dispose d’une certaine intelligence collective, rencontre d’intelligences individuelles. Elle en a besoin pour sa survie. Le lien social est un ensemble multiple. La société demande donc à nombre  d’individus qui la composent d’être intelligents sur des points précis. Nous historiens, on qualifie cela de « production des élites ». Et le processus de démocratisation correspond à une société de plus en plus complexe et donc qui a besoin, pour survivre d’avoir de plus en plus de membres relativement intelligents. Mais comme l’intelligence produit des idées non-conformes, cela risque de tirer la société à hue et à dia, de la déstabiliser. D’où mille et une stratégies pour produire des individus ayant, dans la mesure du possible, une intelligence fonctionnelle, contrôlée. On parle d’esprit d’initiative, par exemple. 

La société sait faire preuve aussi d’une intelligence d’anthropophage : elle trie a posteriori dans la marginalité, dans les non-conformismes d’hier ce qui, au bout du compte, lui sert. Car elle ne peut être immobile, avoir des idées définitivement figées. Elle a besoin, pour progresser ou simplement ne pas s’enliser, de se nourrir de ce qu’elle a condamné. Combien de penseurs, de novateurs, d’artistes,… ont été célébrés et magnifiés après leur mort, alors qu’on leur avait fait les pires vilaineries leur vie durant ! Et ceux que l’on célèbre ainsi après coup, n’étaient nullement des anges. Ils pouvaient même être insupportables de leur vivant. En effet, penser, créer, avoir des valeurs ou des idées différentes des idées communes est non seulement difficilement vivable pour soi-même, mais c’est très souvent encore plus insupportable pour les autres.

 

Bref, je ne plaide aucune cause. Je ne donne raison à personne. Je tente seulement de réfléchir sans trop céder à l’obligation d’être bête qui, aujourd’hui, n’est pas seulement le fait du matraquage des medias de masse, mais tend à être politiquement imposée. Quand des Parlementaires votent des lois qui vont contre la scientificité de la démarche historienne, je me demande de plus en plus comment faire consciencieusement mon métier, comment tenter d’être intelligent dans un tel contexte. Quand je constate la production sociale d’un (pseudo) anticonformisme stéréotypé (ce qu’est devenu Charlie Hebdo par exemple), de (pseudo) contestataires célébrés par gauche et droite réunis, j’ai une grosse colère qui monte en moi. Je la maîtrise, je la dompte, car la colère n’est pas forcément bonne conseillère. Mais je ne me couche pas devant l’abêtissement, et je réécoute Brassens dans ma tête : « Quand on est con, on est con » chantait-il. Et s’il n’a pas précisé : « Qu’on soit Parlementaire  ou …. » mais on peut facilement le déduire de sa chanson.

 

Vous êtes toujours là ? Merci. Je reprends : donc toute société à ses marginaux, ses non-conformistes multiples; des gens un peu étranges ou très bizarres. Cela, dans tous les domaines, et pas seulement sur le plan religieux. Des gens dont certains sont insupportables. Des gens qui peuvent choquer. Ils n’ont pas forcément raison pour autant, loin s’en faut. Ils peuvent s’enfermer dans leur marginalité, dériver à tout va, dans leur rejet de balises sociales, devenir dangereux même (ce n’est pas exclu, et nous allons en reparler) etc. Mais ce que l’étude de l’histoire m’a appris c’est que la société puisait pour bouger, pour changer, dans l’ensemble des marginalités. C’est que certains de ces non-conformismes, certaines de ces marginalités se révélaient à terme très utiles socialement, c’est que la société au bout du compte se nourrit de gens qu’elle a flingué.

 

Chaque système social a sa bêtise propre. Et décrypter celui de la France d’aujourd’hui est finalement l’objet de ce blog car la laïcité, c’est aussi l’utopie d’un vivre-ensemble le plus intelligent possible et le combat pour ce vivre-ensemble là. Pour faire bref, la pente dominante d’aujourd’hui consiste à refuser de plus en plus des démarches de connaissance, une pensée de raison, cela alors même que l’on prétend le contraire. Je m’en expliquerai plus à fond dans des Notes prochaines, mais le seul exemple des lois qui impose une mémoire contre la démarche historienne en est déjà un exemple probant. Un autre est la non répercussion sociale en France de débats philosophique contemporains. Nous y reviendrons. Un troisième exemple est donné par la commission parlementaire sur les dites sectes qui a rendu son rapport cette semaine (« L’enfance volée. Les mineurs victimes des sectes »). Je vais maintenant vous expliquer pourquoi.

 

Pour cela, je reviens au début mon propos : durant le bref moment où la MIVILUDES (la Mission contre les « dérives sectaires ») avait décidé de faire preuve d’un peu de raison, elle avait aussi compris, à sa manière, que toute société a ses marges, qu’une société démocratique ne combat pas ses marges a priori, qu’elle hiérarchise et cherche à distinguer ce qui lui semble présenter un danger de ce qui est étrange, bizarre, mais finalement (grosso modo) pas plus dangereux que les comportements moyens. Pour cela, elle  voulait ne pas rester englobée par le discours militant anti-secte (comme c’était le cas du temps de Vivien) et estimait pouvoir s’enrichir un peu, apprendre de discours de connaissance. Vous vous demandez pourquoi je vous raconte cela, un peu de patience, vous allez le savoir.

 

Dans la perspective que je viens d’indiquer donc, une série de conférences avaient été organisées et diverses institutions scientifiques (dont la mienne, l’Ecole Pratique des Hautes Etudes) avaient été mises à contribution. Quelques rencontres préalables avaient eu lieu. Au cours d’une de ces rencontres, la question des enfants était venue sur le tapis. La personne de la MIVILUDES que j’avais en face de moi m’avait affirmé que d’après l’ensemble des informations dont elle disposait, il y avait environ 150 enfants en danger pour cause de « dérives sectaires », et qu’avec le concours des services sociaux une action était entreprise pour faire face à cette situation, qui prenait place parmi beaucoup d’autres causes qui faisaient que le nombre global d’enfants en danger en France se trouvait, naturellement, beaucoup plus élevés. Selon un rapport publié ce mois ci (décembre 2006) par l'Observatoire national de l'action sociale décentralisé, il y en aurait 97000, une bonne part venant des désunions matrimoniales. Faut-il interdire le divorce pour autant? 

 

Environ 150, aller mettons 200 enfants pour avoir un chiffre rond (sur 97000, 1/500e). Grâce aux Parlementaires de la dite Commission, on passe de 150-200 à…. 60000 à 80000 enfants. Quel admirable tour de magie. Quel dommage que ces parlementaires-magiciens soient incapables de faire, non pas l’équivalent, mais le dixième de ce tour de magie pour le remboursement de la dette ou la lutte contre la vie chère !

Un autre petit problème cependant, un magicien doit être assez habile pour que l’on ne comprenne pas que lest son truc. Or là, les parlementaires de la Commission se montrent particulièrement lamentables. Leur tour de passe passe est tellement grossier que même un mal-comprenant  (il faut que je soit politiquement correct de temps à autre, non ?) peut facilement le saisir. Sont « victimes » a priori tous les enfants (les mineurs en fait) « élevés dans un contexte sectaire ».  Autrement dit : la marginalité sociale elle-même est devenue suspecte, en tout cas en matière religieuse.

 

Mais je voudrais dire à la Commission qui si on passe d'un danger réél à un danger virtuel, même en adoptant (par hypothèse d'école) son raisonnement, ce sont  alors les millions d'enfants qui vivent en France qui se trouvent en danger : Alain Bazot (Président de l'UFC-Que Choisir) nous prévient: par un article intitulé: "L'enfant roi, cible des publicitaires. Le boniment des annonceurs de l'agro-alimentaire est dangereux. Il favorise l'apparition de l'obésité."  (Le Monde, 16/12/2006)Là, nous ne sommes plus dans les marges, mais au coeur même de la société.

 

 Toute une batterie de mesures est proposée par la Commission dont le sens général consiste renforcer l’emprise d’institutions dont beaucoup d’analyses ont montré qu’elles se trouvent en crise (pour prendre un seul exemple : nos parlementaires devraient profiter de la « trêve des confiseurs » pour lire l’ouvrage de François Dubet : Le déclin de l’institution, Seuil), crise dont j’ai parlé ici à plusieurs reprises (là encore, cela ne signifie pas leur condamnation, loin s’en faut, mais qu’on ne peut plus être dans le schéma où les institutions avaient toujours raison). Cette batterie de mesures va dans le sens d’une société de surveillance généralisée de tout ce qui bouge, de tout ce qui n’est pas conforme.

Mais comment en serait-il autrement puisqu’on ne hiérarchise pas, que l’on ne compare pas et que l’on traite tout autrement les marges et le commun.

 

Vous me connaissez, la difficulté ne me fait pas peur. Au contraire, quand un raisonnement rencontre une difficulté, c’est là que cela devient le plus intéressant. Car, ou vous vous êtes planté, et alors il n’y a pas d’offense à changer d’avis. Ni vous ni moi ne sommes le pape. Et même le pape,… rappelez-vous dernièrement Benoit XVI, il a fait quelque peu machine arrière…

Donc la difficulté, ce sont les transfusions sanguines. C’est le seul argument sérieux face aux Témoins de Jéhovah, car pour le reste. Un mec actuel de la MIVILUDES (qui a été normalisée depuis, j’ai oublié de vous le dire. Et normalisée pour crime de recherche d’intelligence : pensez elle commençait à dialoguer avec des universitaires de l’EPHE, de l’EHESS, etc. Hou là là, gravissime…) a déclaré un jour que les enfants des Témoins sont « tristes » parce que les Témoins sont contre les fêtes organisées en classe (qui d’ailleurs, parfois, ne sont guères laîques,…). Comme s’il n’y avait pas mille et une façon d’être joyeux. Comme si on pouvait émettre un jugement aussi global, sans dire une énormité. Cela,  sans parler de la tristesse des enfants de ce type quand ils se sont rendus compte que leur père aurait très bien pu être épinglé dans la chanson de Brassens citée tout à l’heure.

 

Bref les transfusions sanguines. C’est vrai, OK, c’est un problème. Plus ambivalent qu’il en a l’air.

D’abord parce que dans les sociétés plus intelligentes que la nôtre, qui ne foncent pas broum broum dans la répression, le refus des transfusion des Témoins a conduit a mener des recherches sur les substituts à de telles transfusions et des recherches sur les autotransfusions, recherches qui ont fait progresser  la science.

Ensuite, parce que des médecins eux-mêmes ont mis un petit bémol à leur opposition depuis l’affaire du sang contaminé, affaire qui a montré (à tous ceux qui ne veulent pas le voir, mais les exemples abondent) que le danger n’est pas seulement du côté des marges et qui a fait mourir des transfusés.

Enfin, ce problème se pose bien sûr partout et donc, plutôt que se montrer autiste, la France ferait mieux de s’informer davantage sur la façon dont il est abordé ailleurs, même peut-être (mais j’en demande beaucoup) de se concerter. Je ne dis pas que l’aspect conflictuel aura forcément disparu, je dis que d’une part il pourra être réduit, de l’autre que plus on diabolise, et l’on croit résoudre le problème de façon incantatoire, plus on sert la soupe aux éléments intransigeants d‘un groupe et l’on bloque la situation.

 

La militance antisecte en France est actuellement le résultat de 3 tendances : des laïques plus durs que purs qui sont en fait antireligieux mais ne peuvent déblatérer contre les jésuites ou les curés et donc se défoulent sur des groupes marginaux ; des laïques qui, sur l’islam ont compris des choses, mais que leur antiaméricanisme obsessionnels et leur méconnaissance de la question font que de fait, ils se montrent guère différents des premiers sur la question ; des catholiques qui ont avalé plein de couleuvres avec l’œcuménisme et que leur religion n’était pas forcément la seule vraie, etc que eux aussi ont besoin de se défouler.

J’oubliais, il y a aussi certains protestants luthéro-réformés, qui veulent dégouliner de respectabilité œcuménique et qui, anciens « hérétiques » normalisés veulent être plus clean que les clean, inodores et sans saveur. Mais, il faut savoir aussi que, quand même, le président de la Fédération protestante ne mange pas de ce pain là et à courageusement protesté contre la bêtise de la dite Commission parlementaire (il a indiqué à la fois son « désaccord profond » avec les Témoins et le fait qu’il a été « scandalisé » par l’attitude de la commission faisant fi de la loi et de la jurisprudence concernant les Témoins. Cf. Le Monde, 28 novembre 2006)

 

Le plus drôle c’est qu’il a été précédé par…une ancienne présidente de UNADFI, c'est-à-dire de la « principale association antisecte », qui estime que l’on s’est engagé « dans une chasse aux sorcières » et que ce que fait la MIVILUDES, « ce n’est pas sérieux », demande que « des travaux sérieux (soient) entrepris », « qu’on prenne le temps de la réflexion et qu’on évite les amalgames » (Le Monde, 17 novembre 2006)

En toute laïcité, j’ai envie de dire « Alléluia » : les gens peuvent évoluer, devenir plus intelligents. Tout n’est pas perdu. Joyeux  Noël!

PS du 2 janvier: devant le nombre de commentaires dont beaucoup, certes, contiennent des choses intéressantes, mais dont certains comportent des attaques perso qui font que blogspirit me rappelle que je suis responsable du contenu des commentaires, et n'ayant pas le tempsde trier, je me vois contraint d'enlever les différents commentaires, en priant les internautes qui ont écrit des choses intéressantes de bien vouloir m'excuser. Merci d'avance et bonne année.