07/11/2005
HUITIEME IMPENSE: L'INFLUENCE DE L'ORIENT
Avec ce huitième impensé, je m’aventure un peu. J’ose poser la question : la laïcité, cette soi-disant exception française n’aurait-elle pas bénéficié d’une certaine influence orientale qui aurait favorisé la mutation culturelle que représente la loi de 1905 ?
A moment de l’élaboration de la morale laïque, Jules Ferry trouve dans l’exemple du bouddhisme la possibilité de dissocier morale et christianisme : « Cette religion encore si vivace, affirme-t-il, a une morale, des principes, un idéal véritablement pour le moins aussi pur, aussi exquis que l’idéal chrétien le plus exigeant et le plus raffiné. (…) Dans la morale bouddhiste, on étend la charité jusqu’aux animaux et aux plantes. Cela prouve qu’une morale fondée sur la pratique la plus exigeante, la morale du dévouement par excellence, peut exister avec des dogmes qui ne ressemblent en rien aux dogmes chrétiens. Dans le bouddhisme il n’y a ni peines ni récompenses. »
Ce dernier point est à référer à l’opposition de Jules Ferry aux « dogmes » de la « religion civile » selon Jean-Jacques Rousseau où la récompense des justes et la punition des méchants dans l’au-delà permet de réconcilier morale et justice, puisque l’on constate que, sur terre, des méchants prospèrent et des justes ne sont guère socialement récompensés de leurs ‘bonnes actions’.
A noter que dans les leçons de la morale laïque, les « devoirs envers les animaux » seront enseignés à une époque où l’on y était moins sensibles qu’aujourd’hui (la Société protectrice des animaux venait de se fonder)
« Dans le bouddhisme il n’y a ni peines ni récompenses ». Des spécialistes du bouddhisme m’ont indiqué leur désaccord avec cette affirmation. Mais peu importe : l’important pour moi est l’intérêt de Ferry pour le bouddhisme, la légitimité qu’il lui donne à une époque où, certes, il y avait un attrait pour l’Orient chez des artistes et quelques intellectuels, mais où prédominaient des discours sur la « supériorité de la race blanche sur les autres races ».
Or Ferry lui pensait que l’on pouvait apprendre quelque chose de l’Orient ; preuve en est qu’avant de rendre l’instruction obligatoire il avait demandé à son ministère d’enquêter sur les pays où l’obligation était déjà réalisée dont le Japon qui venait de l’instaurer.
La volonté de prendre ses distance avec la morale chrétienne et sa « charité », ainsi que de la manière dont morale et justice se réconciliait dans l’au-delà pour la religion civile amena les inventeurs de la morale laïque à élaborer ce que l’on appela alors la « doctrine de la solidarité ». Une de ses références en fut Confucius.
La morale laïque insiste sur les « biens » que nous trouvons à notre naissance : maisons, outils, nourriture, livres, etc, bref un ensemble de « richesses » dues à un travail séculaire. Il s’agit des « bienfaits des morts », car la plupart des personnes qui ont œuvré pour obtenir un tel degré de civilisation sont décédés.
La morale laïque affectionne cette maxime : « les morts sont morts mais le bien qu’ils ont fait ne meurt pas ».
Après de semblables leçons, quand l’instituteur demande : « à qui devons nous de la reconnaissance ? » l’élèves parle de diverses catégories d’adultes (parents ; maîtres d’école, …) puis il cite les « ancêtres » : grâce à leurs « bienfaits », les morts acquièrent ce statut. Référence peut être alors faite à Confucius : on parle de « vénération des ancêtres » ; il est même parfois dit que « le culte des ancêtres » est un « culte légitime ». Dans cette optique le passé, loin de représenter quelque chose d’archaïque dont il faudrait se détourner, est le temps de l’amélioration progressive de la société, grâce au travail de ces « ancêtres » qui ont amené la société française à l’état de civilisation où elle se trouve. Les ancêtres ont été les agents du progrès.
Une citation de Confucius est mise pour clore le très populaire Manuel d’éducation morale civique et sociale signé « E. Primaire ». Un autre manuel très utilisé , celui de Dès, insiste sur le fait que la morale confucéenne estime que la règle d’or de la morale est la réciprocité et se caractérise par l’absence d’invocation d’une rétribution dans l’au-delà. La conscience du rôle joué par les ancêtres, la dette que l’on a contracté à leur égard, la considération de l’éducation comme facteur d’amélioration constante, les nécessités de la vie sociale doivent suffire à fonder la morale.
Dans la vision de l’histoire de la morale laïque on trouve une sorte de ‘confucianisme républicain’. C’est une façon d’indiquer que si morale et justice ne réconcilient pas toujours au niveau de chaque individu, cela s’effectue au niveau de la société comme ensemble collectif d’individus solidaires. Le « bien » effectué par chacun contribue à l’amélioration de la société (dont tous bénéficient) ; le « mal » contribue à sa détérioration et, au bout du compte, tous en pâtissent.
Le ‘confucianisme républicain’ cherche donc un équilibre entre la valorisation du passé et la projection dans l’avenir ; et également entre l’individu et la société.
Il faut savoir que cette « doctrine de la solidarité » n’est pas seulement enseignée aux écoliers, c’est une morale d’adultes qui est diffusée à haute dose pendant les premières années du XXe siècle. Dés lors, on ne peut que constater une affinité entre cette morale et la manière dont (comme nous l’avons vu dans ce précédents Impensés du centenaire) les débats de la séparation valorisent les « traditions respectables » et se situent dans une perspective où la liberté collective est une dimension de la liberté individuelle et non son simple prolongement ; perspective qui, nous l’avons vu, rompt avec l’universalisme abstrait républicain.
Sans vouloir majorer la chose (en faire une cause unique), il est donc possible de dire
1) qu’il y a eu une nette référence à l’Orient dans la morale laïque
2) que cette référence a contribuer à créer un climat culturel favorable aux originalités de la loi de 1905 par rapport aux lois précédentes.
Dernière précision : comment les pères fondateurs de la morale laïque connaissaient-ils Confucius ? Via les Lumières, par les écrits du jésuite italien Matteo Ricci (1552-1610) qui, le premier a attiré l’attention de l’Occident sur ce savant chinois. N’est-ce pas paradoxal que cette référence confucéenne puise aux écrits d’un jésuite, alors que les jésuites ont été les bêtes noires des laïcisateurs et que l’antijésuitisme a été leur tasse de thé!
Double leçon : la laïcité française s’est construite en partie grâce à ce que les historiens appellent les transferts culturels ; parmi les passeurs de culture on trouve ceux que l’on considérait alors aussi mal que les « intégristes » et autres « membres des sectes » aujourd’hui !
Sur la morale laïque et ses sources : J. Baubérot, La morale laïque contre l’ordre moral, Le Seuil, 1997
Sur l’antijésuitisme : (notamment) M. Leroy, Le mythe jésuite de Béranger à Michelet, PUF, 1992PS : un mot sur ce qui est en train de se passer dans certaines banlieues. Le rapport de la Commission Stasi contenait quelques excellentes pages sur les « discriminations rampantes » (p106-108) et exprimait le souhait « que la politique de lutte contre les discriminations urbaines soit une priorité nationale » (p. 116). Que n’a-t-on écouté cela !
2ème PS : petit rappel : la présentation du roman Emile Combes et la princesse carmélite, improbable amour le vendredi 11 novembre à 18H15 sur FR3 dans l’émission « Un livre, un jour ».
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31/10/2005
LA SEPARATION ET L'OUTRE-MER
SEPTIEME IMPENSE DU CENTENAIRE DE LA SEPARATION :
La loi du 23 février 2005 demande aux historiens de présenter de façon positive la colonisation ; cette loi, avec de nombreux autres collègues historiens, je l’ai dénoncée comme inacceptable (doublement inacceptable : pour son contenu et pour à sa volonté d’une histoire officielle, dictée par un politique incompétent et qui favorise, hélas, le peu de considération pour les parlementaires en prenant de telles décisions). Elle rend d’autant plus nécessaire d’insister sur un fait, qui n’est peut-être pas autant un impensé que les précédents, mais qui est (malgré tout) peu rappelé : la République était aussi Empire (colonial) et elle a fonctionné de façon différente en tant que République et en tant qu’Empire.
Mais voyons ce qui s’est passé précisément quant à la loi de 1905 à propos de l’Outre-Mer (départements algériens et colonies).
Le président de la Chambre des députés annonce, lors de la séance du 30 juin (la dernière avant le vote final), le dépôt de deux « dispositions additionnelles ». La première émane de César Trouin, député d’Oran, qui votera la loi et la seconde d’Albin Rozet, député de la Haute-Marne, qui se prononcera contre. Elles visent toutes les deux, en termes presque semblables, à renvoyer à un « décret ultérieur » (Trouin) ou à un « règlement d’administration publique » (Rozet) l’application à l’Algérie de la future loi de séparation des Eglises et de l’Etat.
Aristide Briand, rapporteur de la Commission, au nom de celle-ci et du gouvernement, accepte le principe d’un tel ajout. Il affirme combiner les deux propositions dans la disposition suivante : « Des règlements d’administration publique détermineront les conditions dans lesquelles la présente loi sera applicable à l’Algérie et aux colonies »[1]. Cette formulation, est-il précisé dans le compte-rendu de séance, « donne également satisfaction à un amendement de MM.Clément, Guerville-Réache et Ursieur[2] ainsi conçu : ‘Les dispositions de la présente loi sont applicables aux colonies de la Martinique, la Guadeloupe, la Réunion et la Guyane’. »
Le ministre de l’Instruction publique et des cultes, Bienvenu Martin, et les deux députés, Trouin et Rozet, indiquent très brièvement qu’ils approuvent le texte. Aucun parlementaire ne demande la parole (alors qu’on le sait, les débats de façon générale furent très fournis); la proposition, « mise aux voix, est adoptée » sans précision donnée sur le vote lui-même. L’ajout devient alors (provisoirement) l’article 35 ter. L’ensemble de la discussion et du vote tient en moins d’une colonne des 16 pages de 3 colonnes qui forment le compte-rendu de cette séance[3].
Cette brièveté, cette absence de débat apparaît très significative du peu d’importance attachée à la question de l’Outre-mer par les députés. Les quelques minutes de la séance sont cependant révélatrices.D’abord d’un point de vue général elles apportent, s’il en était besoin, deux confirmations : d’une part, la collaboration de certains députés d’opposition à l’élaboration de la loi (Rozet sur ce point); d’autre part, le rôle prédominant de Briand, reléguant le ministre à faire de la figuration. Mais, concernant la question précise de l’Outre-mer, le télescopage de l’amendement des trois députés des « vieilles colonies » avec les deux propositions sur l’Algérie rend possible un glissement entre la demande d’application pure et simple de la loi et le fait de confier à « des règlements d’administration publique » la façon dont celle-ci sera appliquée. Ce glissement est d’autant plus net que c’est précisément un député défavorable à la séparation qui avait demandé cette adjonction. Aucun des trois députés, auteurs de l’amendement sur les « quatre vieilles colonies » ne prit la parole pour regretter ce changement dénaturant leur proposition qui visait à une application pure et simple de la loi à ces territoires.
Ainsi, en faisant mine de vouloir appliquer la loi Outre-mer, on se réservait, en fait, le droit de l’appliquer avec retard, de lui donner une application à géométrie variable, voire de ne pas l’appliquer du tout ! C’est sans doute pourquoi, au Sénat, la discussion prend un peu plus de consistance. Dans la séance du 5 décembre, Alcide Treille, sénateur de Constantine et favorable à la loi, propose un amendement de ce qui était devenu, entre temps, l’article 43, 2ème alinéa[4]: « La présente loi est applicable en Algérie ». Mais il s’agissait d’un baroud d’honneur. La loi pour pouvoir être promulguée avant les élections de 1906 devait être ratifiée par le Sénat dans les mêmes termes que l’Assemblée Nationale et, comme l’assure le dicton, le mieux était en conséquence ‘l’ennemi du bien’. L’amendement est donc vite retiré. Notons qu’il ne portait que sur l’Algérie et ne mentionnait nullement les colonies. Le sénateur de Constantine prêche pour sa paroisse en quelque sorte, il n’effectue pas une proposition générale.
Plus décidé apparaît Eugène Brager de la Ville-Moysan, sénateur d’Ile et Vilaine, encore jeune (il a 43 ans) et opposant à la loi. Il propose de remplacer le second alinéas par la phrase suivante : « La présente loi n’est pas applicable à l’Algérie et aux colonies françaises ». Il développe une argumentation où il commence par dénoncer le « pur régime d’arbitraire » auquel aboutira l’article 43 : « C’est le bon plaisir des gouverneurs qui détermine quel sera, à un moment donné, le régime relatif aux cultes qui règnera dans notre domaine colonial. », bon plaisir qui s’appliquera à «toute une catégorie de citoyens vivant sous les lois françaises ». Il démonte, ensuite, l’argumentation qui (pour lui) sous-tend la loi, « le mouvement continu des idées modernes » dont la conséquence serait « la séparation complète des deux pouvoirs ». Il s’interroge alors : « Les indigènes[5] du Congo, de Madagascar ou du Tonkin possèdent-ils un niveau intellectuel susceptible de comprendre ce progrès prétendu des idées modernes ? » (idée du « retard » mais relativisée par l’expression « progrès prétendu ») Enfin, il insiste sur le fait que « dans la plupart (des) colonies l’influence religieuse et l’influence française sont (…) deux choses qui se confondent ». Les missionnaires « sont les premiers pionniers de la devoir dire, le sénateur retire son amendement car, affirme-t-il, il n’a aucune chance d’être civilisation européenne », les « meilleurs agents de l’influence française »[6]. Mais là encore, finalement, il s’agit seulement d’un baroud d’honneur car, après avoir dit ce qu’il estimait adopté. En d’autres points, des amendements qui n’avaient pas plus de chance d’aboutir avaient cependant été mis aux voix. L’opposition ne semble donc guère vigoureuse.
Ce manque d’attention montre une idée presque consensuelle : l’Algérie et les colonies, bref l‘Empire colonial[7] fonctionne selon d’autres règles que la République. Les décisions de l’exécutif doivent, là, prendre de fait le pas sur les dispositions législatives. Le ministre Bienvenu-Martin le souligne d’ailleurs au Sénat : l’article 43 « ne contient rien de nouveau, tout au moins quant à la formule, car l’exercice du culte aux colonies a toujours fait l’objet non de dispositions législatives mais de décrets », s’attirant des « Très bien ! Très bien ! » dans les rangs de la gauche sénatoriale. Il aurait même pu généraliser davantage. Il est donc possible de conclure des débats, de la loi et des décrets qui s’appliqueront à certains territoires, de l’absence de décrets pour d’autres : « Comme le code civil, (…) la séparation avait ses frontières : la France métropolitaine (…). Outre-mer, c’était selon »[8]
Brager de la Ville-Moysan avait évoqué une « catégorie de citoyens vivant sous les lois françaises » qui seraient victime d’un « pur régime d’arbitraire », mais les habitants de l’Outre-mer étaient-ils véritablement des « citoyens » ? La seconde République, par le décret du 27 avril 1848, avait proclamé « l’abolition immédiate de l’esclavage » et avait attribué, sans plus attendre, la citoyenneté aux anciens esclaves. Siègeront à l’Assemblée des députés « de couleur » ce qui est assez remarquable pour l’époque. Si les colons maintiennent leur domination socio-économique, cette instauration du « suffrage universel » (en fait masculin, comme en métropole) permet aux Antilles, surtout sous la IIIe République, à une « bourgeoisie de couleur » de « conquérir le pouvoir politique » et de s’insérer dans des réseaux républicains, notamment francs-maçons[9].
Mais la Commission qui prépara en 1848 l’acte d’abolition de l’esclavage et refusa de transformer les anciens esclaves en « demi-citoyens, quarts de citoyens, hermaphrodites politiques », admit cependant, de « ne rien préjuger sur l’état des populations indigènes » en Algérie. « En libérant les esclaves et en les faisant entrer dans la communauté de citoyens, commente avec justesse Emmanuelle Saada, la République produit par défaut l’indigène, sujet de l’Empire colonial, soumis à son statut personnel et exclu des droits politiques. »[10] Alors même que l’Algérie devient,en 1858, un ensemble de trois départements français, les « indigènes » algériens vont avoir le statut de « ressortissants » français, de « sujet français ». Dans les années 1880, le régime de l’indigénat » consista à l’élaboration d’un ensemble législatif et réglementaire répressif et discrétionnaire[11] pour les colonies institutionnalisant la distinction entre « citoyen » et « sujet ».Comment la loi sera-t-elle appliquée ?
- en Algérie, le décret du 27 septembre 1907 imposait aux responsables des associations cultuelles d’être citoyens français, ce qui permettait de soustraire l’islam à l’application de la loi et de conserver le contrôle de ces « ministres du cultes ». De fait, ce décret affirme Emile Poulat « étouffa l’application » de la loi beaucoup plus qu’il ne la mit en œuvre. Une indemnité de fonction (temporaire, mais qui sera reconduite) remplaçait le traitement des ministres des cultes.
- aux Antilles et à la Réunion, le décret du 6 février 1911 permettra une séparation « différée et apaisée » comme le constatent aussi bien Ph. Delisle pour les Antilles que Prospère Eve pour la Réunion[12].
- à Madagascar, où une séparation de fait existait déjà et où le gouverneur Augagneur avait durement combattu le protestantisme (considéré comme favorable à l’Angleterre et à l’autonomie des Malgaches), le décret du 11 mars 1913, copie les 2 premiers articles de la loi de 1905.
Au Cameroun, le décret du 28 mars 1933 sera semblable à celui de 1913 pour Madagascar.
Dans le reste des colonies, la séparation ne va pas être appliquée et en Guyane le catholicisme, aux Comores l’islam, à Tahiti le protestantisme, seront (et eux seuls) toujours des cultes reconnus. C’est toujours le cas pour le catholicisme en Guyane. Aujourd’hui à Mayotte, le « droit personnel » musulman s’applique, avec une vérification de conformité avec les droits fondamentaux.
Pas plus que pour l’Alsace-Moselle, où le régime des cultes reconnus et du Concordat sont toujours en vigueur, les différents régimes de l’Outre-mer ne font l’objet d’un débat lors du centenaire. Ce débat obligerait, en effet, à reconnaître la grande diversité de la situation dans l’ensemble français et à préciser ce que la Constitution entend quand elle énonce que la « République est (…) laïque ». Dommage.[1] Ce qui, en fait, adoptait la formulation de Rozet et non celle de Trouin.
[2] Honoré Clément était député de la Martinique, Gaston Gerville-Reache de la Guadeloupe et Louis Ursieur de la Guyane. Tous les trois étaient favorables à la loi
[4] Le dernier article avant l’ultime qui clôt la loi par la liste des dispositions abrogées
[5] Notons l’emploi du terme de « citoyen » pour défendre l’égalité des droits et d’ « indigène » pour établir une différenciation.
[7] Et le terme d’Empire, naturellement, est hautement significatif.
[12] Cf pour Ph. Delisle, l’article cité note 9 et son livre L’anticléricalisme dans la Caraïbe francophone, Karthala, 2005 et pour la Réunion, P. Eve, la laïcité en terre réunionnaise, Océan-Editions, 2005.
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24/10/2005
1905 ET LES TENUES OSTENSIBLES
SIXIEME IMPENSE DU CENTENAIRE DE LA SEPARATION :
Savez-vous que, dans les débats parlementaires de la loi de séparation, s’est posé le problème de ce que l’on appelle aujourd’hui « les tenues religieuses ostensibles » ? Sans doute non, car on se garde bien de l’indiquer. Pourtant, le 26 juin 1905, l’Assemblée Nationale a discuté d’un problème de nouveau d’actualité, celui de la « tenue religieuse », ou plus exactement du « costume ecclésiastique.
Je ne vais pas faire l’inverse de ce que je reproche à la commémoration dominante, c'est-à-dire que j e vais pas ‘plaquer’ sur 2004-2005 ce qui c’est fait alors, en disant c’est pareil et en faisant de l’attitude adoptée alors la norme obligatoire pour l’attitude à adopter aujourd’hui. Mais quand même, entre le rien et le tout, il y a la connaissance. Il me semble important de savoir comment les laïques de 1905, dont on magnifie d’autant plus facilement la loi que l’on garde secret beaucoup d’aspects de son élaboration, ont abordé, lors de la rédaction de la loi, le problème des tenues religieuses.
Je vais donc me borner à vous donner les principaux points du débat parlementaire sur la question. Libre à chacune et à chacun de faire ou non des rapprochements avec l’actualité. Le but de ce blog est de favoriser le débat et non de prôner une orthodoxie quelconque, fut-elle non-conformiste. Vous pouvez d’ailleurs estimer qu’il a de l’analogie entre le problème de la tenue religieuse tel qu’il s’est posé en 1905 et celui des signes et tenues religieuses tel qu’il est posé aujourd’hui (analogie = ressemblances et différences). Pour ma part, position personnelle, je pense que l’analogie est forte. A vous de juger.
Le 26 juin 1905 s’engage donc le débat sur le « costume ecclésiastique » suite à un amendement de Charles Chabert, député radical-socialiste de la Drome, ainsi conçu :
« Les ministres des différents cultes ne pourront porter un costume ecclésiastique que pendant l’exercice de leurs fonctions ».
Une remarque immédiate s’impose : l’amendement à une portée générale mais en fait c’est une seule religion qui est visée : le catholicisme. Et de fait les débats vont se focaliser sur le port de la soutane. C’est cet habit qui est visé (rappelons aux ami(e)s du blog qui ne le sauraient pas que la soutane est une grande et ample robe noire que les prêtres catholiques portaient alors sur leurs vêtements habituels. Cette robe noire les faisaient d’ailleurs traiter de « corbeaux » par les anticléricaux. Après Vatican II, la plupart des prêtres ont abandonné la soutane ; on ne voit plus guère aujourd’hui en soutane que des prêtres traditionalistes ou intégristes.
Seconde remarque : il y avait déjà eu un mouvement de maires (70 à 75 selon les débats de la Chambre) qui avaient tenté d’interdire le port de la soutane dans leur commune. Mais l’arrêté de l’un d’eux avait été cassé au motif qu’il comportait « des appréciations complètement en dehors du droit conféré aux maires » et donc se trouvait entaché « d’excès de pouvoir ». L’affaire n’avait donc pas été tranchée quant au fond. La soutane étant une robe, elle était accusée de contrevenir à la « dignité masculine » et, de plus, de permettre une attitude hypocrite : encore dans les années 1950 un ouvrage à succès s’intitulait : La soutane devant l’amour.
Voyons maintenant les principaux arguments développés par Chabert :
- la soutane n’est pas une obligation pour les ecclésiastiques : jusqu’au VIe siècle ceux-ci s’habillaient comme tout le monde et actuellement (=1905) en Suisse, en Angleterre, en Amérique les prêtres ne la portent pas ce qui n’empêche pas la religion catholique de s’exercer librement.
- la soutane est donc une tenue plus cléricale que religieuse : d’ailleurs la Révolution l’avait interdite et la loi qui avait ratifiée le Concordat en avait limité le port. Ce n’est que par excès de tolérance que cette limitation est tombée en désuétude : de napoléon à la monarchie de Juillet, on préférait « l’habit à la française » au « costume ecclésiastique romain ». Le port généralisé de la soutane est lié à la montée de l’ultramontanisme. Commentaire : il faut savoir que ce terme d’ultramontanisme signifie au XIXe siècle, un catholicisme étranger, intolérant, fanatique, obscurantisme, à l’opposé du bon catholicisme « gallican », à la française, bien de chez nous.
- la soutane est « une prédication vivante, un acte permanent de prosélytisme ». C’est « une manifestation confessionnelle » permanente dans l’espace public. A ce titre elle porte atteinte à l’ordre public car elle induit des « manifestations diverses » soit « de sentiments religieux parfois même fanatiques » soit de « sentiments absolument contraires ». Elle porte à faire croire que les prêtre sont « autre chose et plus que des hommes ». C’est pourquoi interdire le port de la soutane en dehors des lieux de culte loin d’être une manifestation d’intolérance, est « une œuvre de paix, d’union, d’honnêteté, de logique, d’humanité ».
- la soutane rend le prêtre « prisonnier », « prisonnier de sa longue formation cléricale, prisonnier de son milieu étroit, prisonnier de sa propre ignorance ». La « soutane modifie la marche de celui qui la porte, son allure, son attitude et par suite son état d’âme et sa pensée ».
- la soutane est un signe de soumission « d’obéissance (…) directement opposée à la dignité humaine ». Pourquoi « les évêques tiennent si fort à ce que leurs prêtres portent la soutane » ? Pour 2 raisons. D’abord « afin que les prêtres ne puissent échapper à la surveillance de leurs supérieurs » ; ensuite « afin de maintenir comme une barrière infranchissable entre eux et la société laïque ». Sans soutane, le prêtre « échappe à son supérieur, s’évade de cette tyrannie monstrueuse de tous les instants. »
- il faut donc interdire la soutane, si on est « soucieux de la liberté et de la dignité humaines ». Si vous « ôtez sa robe » au prêtre, vous lui permettrez de « respirer, lever la tête, causer avec n’importe qui (…). C’est ainsi que vous lui ferez faire un pas immense, que vous libérerez son cerveau ». En « l’habillant comme tous le monde » faisons de « cet adversaire de la société moderne, un partisan de nos idées, un serviteur du progrès. De ce serf, de cet esclave, faisons un homme ».
- les prêtres eux-mêmes attendent de l’Etat républicain qu’il les libère de la soutane : « j’ai reçu, affirme Chabert, des confidences intimes » et s’il y a des prêtres qui ne veulent pas quitter leur habit, « un plus grand nombre d’entre eux –et ce sont les plus intelligents, les plus instruits- ATTENDENT AVEC ANXIETE CETTE LOI QUI LES RENDRA LIBRES ». Chabert ajoute qu’il pourrait citer des noms (et même des noms d’évêques). Bref, des « prêtres parmi les plus honorables et les plus convaincus (…) qui se consoleront de voir votée la loi de séparation, si en même temps vous supprimez la robe sous laquelle ils se sentent mal à l’aise ».
A différentes reprises, Chabert est applaudi « sur divers bancs à gauche et à l’extrême gauche » tandis qu’il y a des « exclamations et bruit à droite ».
A cette interprétation de la tenue religieuse comme habit de soumission et de ce devoir de l’Etat républicain et laïque d’émanciper, par la loi, les prêtres de la soutane, Briand répond que c’est à la suite « d’une délibération mûrement réfléchie » que la Commission a estimer que ce serait encourir les reproches « d’intolérance » et même de « ridicule » (« applaudissements et rires au centre et à droite ») «que de vouloir, par une loi qui va « instaurer dans le pays un régime de liberté » d’imposer aux prêtre « l’obligation de modifier la coupe de leurs vêtements ». Et il poursuit : « Votre commission, messieurs, a pensé qu’en régime de séparation la question du costume ecclésiastique ne pouvait se poser. CE COSTUME N’EXISTE PLUS POUR NOUS AVEC SON CARACTERE OFFICIEL. (…) LA SOUTANE DEVIENT, DES LE LENDEMAIN DE LA SEPARATION, UN VETEMENT COMME LES AUTRES, ACCESSIBLE A TOUS LES CITOYENS, PRETRES OU NON ».
Résultat des courses : l’amendement Chabert est repoussé par 391 voix contre 184.
Prochainement sur le blog : le septième impensé : La Séparation républicaine n’est pas celle de l’Empire (colonial)
En attendant, deux livres récents fort intéressants sur d’anciennes colonies devenues DOM :
- Prosper Eve, La laïcité en terre réunionnaise, origine et originalité. Océan éditions, 2005.
- Philippe Delisle : L’anticléricalisme dans la Caraïbe francophone, Un « article importé » ?, Karthala, 2005.
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18/10/2005
LE CINQUIEME IMPENSE DE LA COMMEMORATION
Quand Emile Combes avait défendu le Concordat le 26 janvier 1903, il avait déclaré ceci : « J’aspire comme vous tous, du côté gauche de cette Chambre, à l’époque que je voudrais prochaine, que je voudrais immédiate, mais que la constatation de l’état présent m’oblige à ajourner à quelque temps, où la libre-pensée, appuyée sur la doctrine de la raison, pourra suffire à conduire les hommes dans la pratique de la vie ». Le propos est clair, et il est étonnant que les historiens de la séparation n’aient pas plus insisté sur ce fait : la séparation est perçue comme l’avènement d’un temps où la vie sociale française se déroule sous l’égide de la libre pensée. C’est cela la séparation, pas autre chose.
Et le plus remarquable est que personne alors, ni à la Chambre, ni dans la polémique et la campagne de presse qui fait rage jusqu’au 4 février (cf. mon roman où je raconte en détails cette déclaration de Combes et ses suites) n’écrit des propos tels que : « mais la séparation, ce n’est pas du tout cela, c’est l’Etat dégagé de tout caractère religieux et garantissant le libre exercice des cultes, étant religieusement neutre, ne prenant pas partie entre la religion et la libre-pensée, qui luttent ainsi à armes égales pour convaincre les gens de la vérité de leurs propos ». C’est en substance ce que va dire, ce que va répéter Briand, tout au long de la discussion parlementaire au printemps 1905. Mais en 1903, personne ne défend la conception de la neutralité religieuse de l’Etat comme fondement de la séparation. L’Etat républicain émancipe de la religion, il n’est pas religieusement neutre.Au contraire : quand, quelques semaines plus tard, Francis de Pressensé (le futur père de l’article 4 modifié, l’accommodateur par excellence en 1905) présente le premier projet de loi consistant de séparation, ce projet commence par un Préambule qui dénonce « les ennemis jurés de la liberté, les disciples du Syllabus, les héritiers de la plus formidable entreprise d’asservissement intellectuel, les complices des plus odieuses tentatives d’oppression morale et politique ». Nous sommes bien dans une perspective où la séparation prend sens dans un combat contre le catholicisme. Et le projet de Pressensé est contresigné notamment…par Jaurès et Briand.
La séparation est là, l’aboutissement de la Révolution, c'est-à-dire que son projet de « régénération », de création d’un « homme nouveau » (cf. les travaux de Mona Ozouf), en arrachant cet homme nouveau à ses traditions, ses habitudes, son passé qui l’insère dans le « fanatisme » et la « superstition » pour le mettre dans les « lumières » de la raison (et de la science, ajoute le XIXe siècle). Certes, ce projet là, ce n’est pas la laïcité de Jules Ferry, qui déclarait « je suis l’élu d’un peuple attaché à la République et attaché à ses processions » et…prenait son parti de ce double attachement. Mais justement, le thème de la « laïcité intégrale » prône la rupture avec la laïcité ferryste dont les accommodements lui semble autant de compromissions.
L’idée de la séparation comme accomplissement de la Révolution va perdurer durant les débats de 1905. C’est la conviction profonde des Républicains séparatistes. Et ils n’ont certes pas complètement tort : d’une part parce que la séparation est beaucoup plus dans la logique des principes laïques, tels qu’ils ont été formulés de 1789 (Déclaration des droits) à 1791 (Constitution) que la Constitution civile du clergé (1790) où, à fortiori, les cultes révolutionnaires de 1793 ; d’autre part parce que la Révolution a tenté elle-même une séparation en 1795. Mais cette séparation là, elle ne l’a pas réussie car elle n’a pas pu désimbriquer le politique et le religieux (retour de la répression en 1797) et elle n’a pas voulu renoncer à des tentatives de fabrication d’un homme nouveau, en rupture avec l’ancien (culte décadaire, théophilantropie,…).
Jaurès lui-même, quand il défendra l’article 4 modifié (par l’ajout Pressensé), le fera en se réclamant (paradoxalement mais significativement) du radicalisme révolutionnaire : « Toute notre histoire proteste contre je ne sais quelle tentation de substituer les compromis incertains et tâtonnants du schisme (il s’agissait en fait de ne pas empêcher le développement d’un « catholicisme républicain » qui se séparerait de Rome) à la marche délibérée de l’esprit vers la pleine lumière, la pleine science et l’entière raison ». Mais, comme toujours il ne faut pas être dans le premier degré : l’inflation lyrique de Jaurès a précisément pour mission de flatter la gauche républicaine dans le sens du poil, au moment où on l’amène à accepter un accommodement réclamé par le centre et la droite.En fait, la séparation qui est construite du travail de la Commission aux débats de la Chambre est, de plus en plus, une séparation qui diverge profondément de l’optique révolutionnaire. Certes, il y a rupture des liens concordataires, certes, il y a la construction d’un régime nouveau. Mais, contrairement à la Révolution, le nouveau se construit en tenant le plus grand compte de l’ancien.
Il est remarquable de constater que la Chambre du Blog des gauches, se met à parler positivement des traditions et des coutumes ! Un partisan de la séparation (E. Flandin) déclare qu’il faut faire très attention au sort que l’on réserve à la « vieille église » car aussi bien les croyants que « beaucoup parmi ceux qui depuis longtemps ont désappris le chemin de l »église, qui ne verraient pas sans un sentiment pénible troubler des habitudes séculaires et profondément respectables » (séance du 8 juin). On prend conscience que l’église, le cimetière sont à la fois des lieux où on adore Dieu et où on entretient un certain rapport avec les morts.
Jaurès lui-même affirme : « Je ne méconnais pas que des millions de citoyens (…) sont attachés à la religion traditionnelle et au culte traditionnel » et qu’il y aurait « injustice et violence si nous adoptions une seule disposition qui fit réellement obstacle à la liberté de conscience et à la liberté de culte » (21 avril). Et Briand affirme de son côté : « Beaucoup de catholiques français désirent n’être pas troublés dans leur traditions, dans leurs habitudes, veulent garder la liberté (…) d’exprimer leurs sentiments religieux. Vous n’avez pas le droit de les brimer, d’inquiéter leur conscience » (25 mai). Et l’on pourrait multiplier les citations.
Point n’en est besoin ; il suffit de constater que le 27 juin contre le député radical (et protestant) Eugène Réveillaud, la Chambre refuse de maintenir les dispositions de l’article 45 de la loi de germinal an X (1802, celle qui avait établi le système du Concordat et des « cultes reconnus ») limitant le droit de faire des processions (ce qui montre d’ailleurs que, séparée de l’Etat, la religion peut se déployer plus librement dans l’espace public). On ne saurait être plus « ferryste », moins révolutionnaire ou dans l’état d’esprit de la « laïcité intégrale » » !!!
QUEL PARADOXE : cette Chambre élue en pleine exacerbation du combat des deux France, cette Chambre représentant le progrès contre la tradition, a fini par faire la louange des "traditions et des habitudes respectables", a pris grand soin de ne pas les heurter ! Mais ce paradoxe est signifiant : c’est justement grâce à cela que cette Chambre a construit un NOUVEAU DURABLE. Ses mesures antérieures, celles qui ne tenaient compte ni des « habitudes » ni des « traditions », les mesures anticongréganistes n’ont pas duré plus de 10 ans. De même la séparation opérée par la Révolution n’avait durée que 7 ans. Pour « achever » ce que la Révolution n’avait pas réussit à faire, pour l’ « accomplir », il fallait, d’une certaine manière, faire le contraire (au niveau de la méthode, de l’état d’esprit). DONC LA LOI DE SEPARATION EST, A LA FOIS, L'ACCOMPLISSEMENT DE LA REVOLUTION ET SON CONTRAIRE.12:45 Publié dans LES QUINZE IMPENSES DE 2005 | Lien permanent | Commentaires (1)
03/10/2005
LE QUATRIEME IMPENSE DE LA COMMEMORATION
LES AUTEURS D’UNE LOI DE LAÏCITE LIBERALE
SONT D’ANCIENS PARTISANS DE LA LAÏCITE INTEGRALE
Non seulement la laïcité de la loi de 1905 n’est pas celle de Combes comme certains le soulignent,[1] mais les auteurs de la loi : Aristide Briand et ses deux soutiens principaux : Jaurès et Pressensé, ont été « combistes » et même, pour Jaurès, « ultra-combiste ».
En fait , il est plus rigoureux de ne pas seulement utiliser le terme de « combisme », mais d’employer également un autre terme d’époque, celui de « laïcité intégrale », terme que ,significativement, on a tendance à oublier aujourd’hui.Par exemple, en 1903, Francis de Pressensé -celui précisément qui va emprunter à la culture politique anglo-saxonne la formule de l’article 4, formule qui éloigne la laïcité de 1905 de l’universalisme abstrait dit « républicain » (cf le « troisième impensé du centenaire)- dépose un projet de loi de séparation co-signé par Briand et Jaurès. Ce projet commençait par une virulente attaque contre le catholicisme:
« Les (catholiques sont) les ennemis jurés de la liberté, les disciples du Syllabus, les héritiers de la plus formidable entreprise d’asservissement intellectuel, les complices des plus odieuses tentatives d’oppression morale et politique »
Les dispositions du projet soumettent les futures associations formées pour l’exercice d’un culte à des dispositions nettement plus restrictives que celles prévues par la loi de 1901 sur les associations. Les édifices religieux loués aux ex-cultes reconnus (catholicisme, judaïsme, protestantisme) pourront aussi servir à « célébrer des fêtes civiques nationales ou locales » ce qui peut faire craindre le retour à des pratiques antireligieuses de la révolution, Par ailleurs, il est interdit de rattacher un diocèse à la juridiction d’un « évêque ayant son siège en pays étranger », or le pape est l’évêque de Rome. Etc . [2]
On est a l’opposé du propos que Briand martèle dans la discussion de la loi de séparation en 1905 : il faut faire une loi « acceptable » par l’Eglise catholique. Or Briand est l’ancien collaborateur du journal très anticlérical La Lanterne. et, au départ, il ne semble pas moins anticlérical que Pressensé et Jaurès.
Autre paradoxe : c’est la Chambre qui a soutenu Combes jusqu’au bout, la Chambre qui a refusé les demandes d’autorisation des congrégations, qui a voté l’interdiction de l’enseignement aux congréganiste, c’est cette Chambre là qui élabore la loi de 1905, dans un climat totalement différent.
Je restitue, dans mon roman, les débats parlementaires et c’est fascinant de constater à quel point les échanges sont vifs, dévient même parfois en pugilat de 1902 à 1904 alors que, une fois le principe de séparation adopté, l’élaboration de la loi s’effectue dans un climat de dialogue, d’écoute, de respect mutuel.
Plus encore, des adversaires du principe de séparation contribuent à l’élaboration de la loi. Le plus important est Alexandre Ribot, républicain du centre, adversaire très déterminé de Combes, et qui peut presque être considéré comme un des co-auteurs de la loi, vu à quel point il a été tenu compte de ses remarques.
Mais d’autres qui sont de centre droit comme Aynard ou franchement de droite comme l’abbé Gayraud peuvent également, à plusieurs reprises, retirer les amendements qu’ils proposent car les modifications qui sont apportées au texte leur donnent satisfaction. Inutile de préciser qu’Aynard et Gayraud étaient des anti-Combes acharnés !
Le 9 juin, alors que l’on va vers la fin des débats à la Chambre commencés le 21 mars ils se termineront le 3 juillet) Briand peut déclarer : Je me félicite que tous nos collègues de tous les partis soient intervenus loyalement dans cette discussion pour essayer de faire triompher leurs vues et je m’honore d’avoir accepté certaines modifications sous l’influence de leurs arguments, quand ils étaient décisifs. J’ajoute que je serai heureux, lorsque la loi sera votée, qu’elle portât la signature non seulement de ceux qui, dés le début, se sont montrés favorables au principe de la séparation, mais aussi de ceux qui, après l’avoir combattue, se sont efforcés ensuite de l’améliorer »
Et à Ribot en particulier, Briand déclare : « Vous voyez vous-même, monsieur Ribot, que vous avez prise sur cette Assemblée et pourtant vous avez souvent, depuis le début de cette législature, taxé la majorité de jacobinisme étroit et irréductible » Effectivement de 1902 à 1904, le jacobinisme avait été « étroit ». L’œuvre de l’assemblée en 1905 prouve qu’il n’était pas « irréductible ».
Dix jours plus tard, Maurice Allard, tout comme Briand socialiste et libre-penseur, mais toujours partisan, lui, d’une « séparation conforme au vieux programme républicain, c'est-à-dire d’une séparation qui désarmât l’Eglise, qui tendit à diminuer sa malfaisance politique et sociale », constate, désabusé et amer, que –contrairement à ce qu’il « croyait », « cette majorité n’existe pas » (pour réaliser une telle séparation). Du coup, il retire son amendement et tous ceux qu’il avait encore en réserve. Il faut dire que, depuis le 10 avril, les amendements qu’il présente sont régulièrement battus à plat de couture !
Cela ne veut pas dire que la séparation soit l’œuvre du centre et de la droite. Quand ceux-ci tentent de pousser très loin leur avantage, Briand et la Chambre, en général, ne les suivent pas. Inversement, on sent poindre à différentes reprises une méfiance du centre et de la droite. Par exemple, dans ce qu’il sera finalement l’article 34, il est question de ne pas « outrager » ou « diffamer » un « citoyen chargé d’un service public ». Protestation, dépôt d’un amendement de l’abbé Lemire, qui demande un peu vivement à Briand, « Ou avez-vous été cherché cette expression ? », pensant qu’il y a là une entourloupe. Briand répond, très calmement : « Dans la loi de 1881 ». Rassuré, Lemire retire son amendement.
Malgré ces nuances, il existe incontestablement un changement structurel, entre les débats de 1902-1904 et ceux de 1905. Poursuite d’une laïcité intégrale d’un côté, élaboration d’une loi de laïcité libérale de l’autre (l’adjectif libéral est largement utilisé, ce qui montre qu’à l’époque personne n’avait peur des adjectifs et il ne régnait pas le petit terrorisme intellectuel (si l’on peut dire !) de ceux qui, maintenant, voudrait que « laïcité » soit le seul terme de la langue française pour lequel il soit interdit d’accoler un adjectif !)Nous verrons avec le prochain impensé les raisons de ce changement, occupons nous maintenant de la façon dont beaucoup, lors de cette commémoration, contournent le paradoxe de partisans de la laïcité intégrale devenus les auteurs d’une loi de laïcité libérale. (Et le paradoxe se redouble quand finalement, lors du vote final ceux, à gauche, dont les amendements ont été repoussés votent la loi, tandis qu’au centre et à droite beaucoup de ceux dont les amendements ont été pris en compte ne la votent pas)
Deux discours dominants sont tenus aujourd’hui :
- selon certains, la loi de 1905 était une manifestation d’anticléricalisme, une loi de combat qui n’est devenue qu’avec le temps une loi d’apaisement. La loi n’aurait pas été libérale dès le départ, les accords de 1923-24 avec le pape, la jurisprudence, les évolutions de ces dernières décennies l’auraient libéralisée.
- d’autres célèbrent la loi comme libérale, respectueuse de la liberté de conscience et de culte mais ne disent rien sur son contexte. Ils rejettent dans l’impensé toute la lutte anticongréganiste ou, au mieux, la minimisent fortement.
La seconde position pourrait faire croire aux ‘Français moyens’ qui ne sont pas forcément des spécialistes de cette époque (litote !) à une séparation quasi-consensuelle, s’effectuant dans la concorde (sous entendu : qu’on était bien entre « Français de souche », la laïcité et le judéo-christianisme, cela s’harmonise merveilleusement). Les conflits seraient arrivés avec l’islam. On pose tout le temps la question : « l’islam est-il (théologiquement, philosophiquement) compatible avec la laïcité », sans se rendre compte que lorsque la loi de 1905 a été élaborée, il semblait clair à tous que le catholicisme n’était pas (théologiquement et philosophiquement) compatibles avec la laïcité.
La première position a le mérite de rappeler le contexte, mais le grand tort de faire comme si la loi de séparation était un reflet de son contexte, alors que, précisément, ce qui est marquant dans la loi de séparation, c’est la façon dont les législateurs ont su se dégager de la perspective de la « République menacée » et de la poursuite d’une « laïcité intégrale » qui rendait religieux le rapport à la laïcité. Certes le virage s’est poursuivi ensuite et ses effets ont été rendus peu à peu visible, mais il est bien pris dès 1905. Et cette première position veut nous faire croire soit que la laïcité de 1905 a été « trahie » ensuite (position laïque dure pendant longtemps et assez marginalisée aujourd’hui) soit (position beaucoup plus répandue maintenant) que la position du pape interdisant aux catholiques français de se conformer à la loi et de former des associations cultuelles était justifiée, nous faire croire que c’est grâce à ce refus que la laïcité serait devenue libérale.20:25 Publié dans LES QUINZE IMPENSES DE 2005 | Lien permanent | Commentaires (0)
23/09/2005
La SEPARATION, CRITIQUE DE L'UNIVERSALISME ABSTRAIT
LE TROISIEME IMPENSE DU CENTENAIRE :
Nous avons vu (cf les fiches sur Emile Combes et celle sur le premier impensé du centenaire) que le processus de séparation s’emboîte sur la politique d’anticléricalisme d’Etat mais que la campagne effectuée dans le quotidien républicain Le Siècle comme avec le projet rédigé par la Commission (président : Ferdinand Buisson, rapporteur : Aristide Briand), il s’éloigne de cet anticléricalisme d’Etat.
Reprenons un instant la campagne du Siècle, Raoul Allier, son artisan, propose la formule : « L’Eglise libre dans l’Etat politiquement à l’abri de ses menaces »[1]. Il ne semble donc pas rompre avec la rhétorique de la ‘République en danger’ mais, en fait, il la subvertit. Jusqu’alors cette rhétorique conduisait à demander des mesures de plus en plus dures ; chez Allier la République se met elle-même en danger si elle adopte une loi de séparation non libérale, qui brime l’exercice du culte. En effet seules les associations créées à cette fin pourront être réprimées : personne ne pourra empêcher les catholiques de former des associations lois de 1901 qui pourront être politico-religieuses et hostiles à la République. Implicitement, Allier montre qu’une démocratie donne toujours, dans une certaine mesure, à ses adversaires la liberté de la combattre en restant dans un cadre légal. Rien ne serait donc plus néfaste qu’une loi qui laisserait (en fait) « substituer entièrement un danger » en donnant « l’illusion d’y avoir paré ».
Par ailleurs, si l’Etat, après la séparation, continue à « intervenir sans cesse dans la vie des Eglises par le retrait ou l’octroi de faveurs arbitraires », de telles pratiques peuvent, par contre coup, favoriser un jour, « une réaction politique, un gouvernement clérical », ce pouvoir clérical « aura été armé par la République pour opprimer à son aise les consciences ».
Allier demande donc la liberté pour tous et l’égalité de traitement entre les religions et les « associations antireligieuses » mais n’en reste pas là. Il espère également que la séparation produira des divisions au sein du catholicisme français et défend avec persistance, les droits d’éventuels groupes futurs catholiques dissidents, catholiques républicains. Il revient « sans cesse » sur ce sujet : si la loi est libérale et que le pape la refuse, qui sait si les paysans « ne se grouperaient pas autour d’un prêtre décidé à marcher avec ses fidèles plutôt qu’avec Rome ? ». Il ne faut rien faire, selon lui, qui gène une telle possibilité. Il faut penser non seulement aux « minorités religieuses (…) qui existent aujourd’hui » mais aux « autres » qui peuvent surgir « demain », aux possibles « fractures » et « schismes dans le catholicisme ».
La séparation que prône Allier est libérale[2], sans être pour autant favorable à la prise en considération de l’unité hiérarchique catholique. De même, le projet élaboré par la Commission parlementaire fait indéniablement preuve de libéralisme, tout en rendant possible la création d’associations cultuelles catholiques qui se sépareront de Rome et des évêques. N’est-ce pas d’ailleurs logique : après la séparation, il ne revient plus à la République de garantir l’unité de l’Eglise catholique, comme elle le faisait sous le Concordat.
Les évêques estiment, au contraire, indispensable que la séparation prenne en compte cette organisation « monarchique « (l’abbé Gayraud, au Parlement). Ce problème va donc se trouver au cœur des débats parlementaires. Francis de Pressensé, député socialiste et Président de la Ligue des droits de l’homme, propose alors un ajout à l’article 4, article capital car il fixe l’attribution des biens.
Cet article 4 modifié impose une condition aux associations cultuelles qui se verront attribuer les biens des “ établissements publics du culte ” : elles doivent “ se conformer aux règles générales du culte dont elles se proposent d’assurer l’exercice ”. Cela signifie implicitement que les associations catholiques devront respecter l’autorité des évêques sauf à se trouver matériellement et symboliquement pénalisées par la République. Cet ajout est accepté par le rapporteur de la Commission Aristide Briand et par Jean Jaurès ; il est par contre combattu par Ferdinand Buisson (le président de la Commission).On peut trouver heureux que Briand l’ait emporté sans sombrer dans le risque d’écrire l’histoire des vainqueurs. Certains tombent dans ce travers tel Jean-Paul Scot qui traite d’adeptes d’ « un anticléricalisme intolérant » les adversaires de cette adjonction.[3] Cela permet de maintenir dans l’impensé l’enjeu du débat qui n’est rien moins que l’universalisme abstrait républicain.
La victoire des « accommodeurs » contre les « républicains » :
On peut multiplier les citations qui montrent que l’enjeu est bien là : Jean-Marie Mayeur et, Yves Bruley en ont donné d’importantes, facilement consultables[4]. J’en ajouterai deux peu connues et fort intéressantes. D’abord, une citation du député radical du Loiret, Alfred Vazeille . Pour lui, si on s’en tient « sur le terrain des principes laïques », il ne faut pas considérer « l’organisation actuelle » de l’Eglise catholique : « Ce que nous devons considérer, ce sont des citoyens catholiques qui nous réclament et à qui nous devons le reconnaître, le droit de s’associer en vue de l’exercice d’un culte. » Et il insiste : « ce sont les citoyens catholiques, (c’est) la collectivité des individus catholiques groupés en association qui a droit (au) patrimoine (cultuel catholique) ; ce n’est pas tel ou tel évêque envoyé par Rome »[5].
Ensuite, une citation de Ferdinand Buisson lui-même : avec la séparation, « l’Etat ne connaît plus l’Eglise en tant qu’entité ou que hiérarchie officielle, en tant que personne publique. Plus de Concordat, plus de traités entre ces deux pouvoirs. Mais l’Etat connaît des citoyens français catholiques et, ayant (…) le sens des réalités, il envisage uniquement ces bénéficiaires auxquels il attribue la jouissance gratuite et indéfinie de toutes les églises. (…) M. Gayraud craint que ce ne soit un acte incompatible avec l’esprit monarchique de l’Eglise. Je l’ignore, mais je n’ai pas besoin de le savoir : je sais seulement que c’est le régime de la France. Nous nous bornons à appliquer aux catholiques la loi qui règle le contrat des associations pour tous les Français, la loi de 1901. (…) Voila notre crime ! Voila la machination de schisme tant de fois dénoncée. »[6]
Cette perspective possède une grande cohérence interne : avec la séparation, il n’existe plus de « cultes reconnus » (article 2 de la loi) et donc la République « garantit le libre exercice des cultes » (article 1) à ses citoyens, non à des groupements intermédiaires. « Le projet de loi, écrit Lanessan, dans le quotidien Le Siècle, avant la modification de l’article 4, ne détruit pas plus la hiérarchie des Eglises qu’il ne supprime les relations entretenues aujourd’hui par les fidèles de chaque Eglise avec leurs pasteurs. C’est à ces derniers qu’il appartiendra de maintenir l’autorité dont ils jouissent sur les adeptes de leur religion. S’ils sont habiles, ils seront respectés et obéis ; s’ils ne le sont pas, ils seront abandonnés ou négligés. L’Etat n’aura point à s’en occuper. »[7].
Un tel discours est incontestable sur le plan de « l’idée républicaine »[8] : la liberté collective est le prolongement de la liberté individuelle, c’est pourquoi la Constitution de 1791 « garantit (…) la liberté à tout homme d’exercer le culte religieux auquel il est attaché ».[9] C’est aussi la perspective de la loi sur les associations et à laquelle Waldeck-Rousseau était particulièrement attaché.
Mais ce discours est inacceptable pour la hiérarchie épiscopale, pour Rome qui craint encore plus le « schisme » et le développement d’un catholicisme républicain que la perte du budget des cultes. Aussi Briand ne répond pas aux arguments de ses interlocuteurs, il martèle comme un leitmotiv que la loi doit être « acceptable » par l’Eglise catholique. C’est le but du fameux ajout à cet article 4. Pressensé explique à la Commission : « J’ai pris un article qui figurait dans la législation de certains Etats américain et l’article appliqué récemment par la Chambre des Lords dans une affaire qui a fait grand bruit en Ecosse et dans toute l’Angleterre. »[10] Là, en logique avec la conception anglo-saxonne de la démocratie, le pouvoir politique avait respecté la constitution des Eglises séparées de lui. La représentation de la liberté est, dans cette culture politique, différente : la liberté collective n’est pas un simple prolongement, elle constitue une dimension de la liberté individuelle.Ce mode de raisonnement est étranger à la tradition républicaine française. La loi de séparation comporte, dans son article le plus important (« La séparation est faites s’écria Jaurès quand il fut adopté »), un élément de la culture politique anglo-saxonne transplanté dans la culture politique du républicanisme français.
Pourquoi les historiens français minimisent en général cet aspect alors que, cette dernière décennie, plusieurs historiens ont insisté sur l’importance des « transferts culturels » et la nécessité de ne plus penser dans le seul cadre de l’histoire nationale ?
La séparation ne s’effectua pas sans un conflit interne entre partisans d’une séparation libérale. Ceux qui recherchaient un ‘accommodement raisonnable’[11] avec l’Eglise catholique l’ont emporté sur ceux qui privilégiaient la cohérence avec l’idée républicaine[12]. Pourtant le pape interdit à des évêques, prêts à élaborer des statuts d’associations cultuelles canonico-légales[13], de se conformer à la loi de 1905. Après avoir eu quelques velléités de soutenir les mouvements qui entendaient organiser malgré tout des cultuelles catholiques, le gouvernement y renonça rapidement La plupart du temps, cela découragea en amont les tentatives. Il se produisit cependant quelques cas révélateurs comme celui de Saint-les Fressin et Torcy (Pas-de-Calais) où le Conseil d’Etat donna raison à l’évêque qui avait désavoué le desservant (qui est là depuis 1899) parce qu’il avait créé une cultuelle conforme à la loi et attribua les deux églises à un nouveau desservant qui, lui, ne créa pas d’association cultuelle, par obéissance à sa hiérarchie[14].
L’aspect pacificateur de la loi de 1905 aboutit donc à un paradoxe : au nom de cette loi, la République donne raison aux prêtres qui refusent d’appliquer cette loi contre les prêtre qui voulaient s’y conformer.
Vous voyez que je n’avais pas tort, il y a quelques jours (cf la Note Contre le National universalisme et pour une laïcité critique) de vous dire qu’il ne fallait pas laisser son esprit critique au vestiaire quand on étudie la laïcité. Qu’on en soit content où qu’on le regrette (tous les jugements de valeurs sont possibles et permis sur cette question), il n’empêche : la séparation de 1905 n’a réussit qu’en articulant l’universalisme dit républicain et la conception anglo-saxonne de la liberté[2] Il n’hésite pas à protester contre des mesures qui toucheraient le seul catholicisme (cf. 69-73).
[9] Titre Ier
[12] On peut aussi dire que Briand, Jaurès, Pressensé se rattachant à une culture syndicaliste et socialiste étaient davantage prêts à admettre que la liberté collective est une dimension de la liberté individuelle que Buisson et Clemenceau parties prenantes de la culture radicale. N’oublions pas que la loi Le Chapelier est une loi réprimant les corporations.
[13] Ils avaient approuvé par 59 voix contre 17 le projet de statut présenté par Mgr Fulbert-Petit, archevêque de Besançon.
19:30 Publié dans LES QUINZE IMPENSES DE 2005 | Lien permanent | Commentaires (3)
17/09/2005
LE SECOND IMPENSE DU CENTENAIRE
La LAÏCITE DE 1905 N’EST PAS UNE « EXCEPTION FRANCAISE »
(Catégorie: Les quinze impensés du centenaire)
(Résumé: nous avons vu, il y a une semaine, le premier impensé: la divergence entre la poursuite de la "laïcité intégrale", les années précédent 1905, et la démocratie. Vous trouverez le récit de ce 1er impensé dans la Catégorie "Les quinze impensés du Centenaire", à la suite de celui-ci. Voyons maintenant le second impensé, celui qui est lié en la croyance en un "laïcité exception française")
***
Si la poursuite de la « laïcité intégrale » au tournant du XIXe et du XXe siècle peut être qualifiée d’ « exception française » (encore que, ultérieurement, la Révolution mexicaine, avec la Constitution de 1917, et la laïcisation kémaliste à partir de 1924 s’en rapprochent dans une certaine mesure), cela n’est pas le cas de la démarche de la Commission parlementaire de séparation des Eglises et de l’Etat, et surtout de son rapporteur Aristide Briand. Qu’on en juge.
Dans son Rapport à l’Assemblée Nationale, Briand estime « indispensable d’examiner quel est le régime légal adopté dans les autres pays ». Il ne peut le faire que brièvement mais estime qu’une « vue d’ensemble » suffit pour « faire comprendre la continuité de cette évolution qui, par des degrés successifs, conduit les nations de l’antique régime théocratique à celui de la complète laïcité. » Rappelons que nous sommes alors en 1905, c'est-à-dire il y a un siècle.
Briand a ici une perspective porche de celle de Buisson quand ce dernier théorisait pour la 1ère fois la laïcité (cf le début de mon ouvrage Laïcité 1905-2005 entre passion et raison). Mais, plus explicitement que Buisson, il va donner un panorama fort intéressant de différents pays. Il les classe dans une typologie très significative.1èr groupe : les pays qui sont encore dans une « phase quasi théocratique » où l’Etat, « étroitement uni à (une Eglise), reconnaît la prédominance d’une religion sur toutes les autres et n’admet que des institutions sociales conformes au principes de cette religion. » Il s’agit de l’Espagne et du Portugal pour l’union avec l’Eglise catholique, de la Russie , de la Grèce, de la Roumanie, la Bulgarie, la Serbie pour l’union avec des Eglises orthodoxes et de la Suède et de la Norvège pour l’union avec des Eglise luthériennes.
Là existent encore une « religion d’Etat, au sens ancien de l’expression, comme ’religion dominante’ ». Mais même dans ces pays, des évolutions se font sentir : ainsi, « les principes de société moderne ont du être proclamés dans les textes constitutionnels » de l’Espagne et du Portugal. Cependant la liberté de culte y est encore limitée.
2ème groupe : de nombreux pays ont atteint, affirme Briand, « le second stade, celui de la demi laïcité : ils proclament les principes de la liberté de conscience et de la liberté des cultes, mais considèrent néanmoins certaines religions déterminées comme des institutions publiques qu’ils reconnaissent, protègent et subventionnent ». Ainsi en Prusse et dans les autres Etats allemands, en Autriche « il n’y a pas une ‘religion dominante’, une religion d’Etat exclusive de toute autre ; mais plusieurs religions ont un caractère officiel tout à fait semblable à celui des cultes reconnus » de la législation française d’alors.
Briand met donc la France du régime Concordat-cultes reconnus parmi les pays qui sont dans une demi laïcité. Je ne connaissais pas encore ce rapport d’Aristide Briand quand j’ai élaboré, dans les années 1980 « ma » théorie des seuils de laïcisation (rapportés, sous différentes formes dans mes ouvrages depuis 1990, notamment dans le « Que sais-je ? » et dans l’ouvrage cité plus haut). Je suis frappé de constater que ce que je qualifie de premier seuil de laïcisation correspond fort bien à cet état de « demi laïcité » dont parle Briand. Je comprends mal que les philosophes qui estiment que cette théorisation est une sorte de trahison de la laïcité puissent se réclamer de Briand. Mais il ne s’agit pas de leur seule contradiction !
Briand parle aussi de la Belgique, des Pays-Bas, de la Hongrie, de l’Italie, de l’Equateur pour ce groupe de « demi laïcité ».
3ème groupe : « dans quelques pays d’Europe et surtout dans plusieurs grandes républiques américaines apparaît le troisième terme de l’évolution » indique Briand et il précise : « L’Etat est alors réellement neutre et laïque ; l’égalité et l’indépendance des cultes sont reconnues ; les Eglises sont séparées de l’Etat »
En fait, dans les 3 pays européens cités, Irlande, Grande-Bretagne et Suisse, pour les deux derniers la séparation n’est pas complète. Il y a toujours des Eglises officielles mais, et c’est là-dessus que Briand focalise son attention, « on rencontre à côté des Eglises officielles, des Eglises libres séparées de l’Etat ; et (…)l’Eglise catholique est au nombre de ces Eglises libres », à côté d’Eglises protestantes libres.
Donc le régime de séparation est, en fait, « faiblement et incomplètement mis en pratique en Europe ». Mais il est, « au contraire, largement adopté dans le Nouveau Monde ; le Canada (…), les Etats Unis, le Mexique n’en connaissent point d’autres. On le rencontre encore dans la jeune république de Cuba, dans trois République du Centre Amérique et enfin dans le plus important des Etats de l’Amérique du Sud : les Etats-Unis du Brésil ».
La aussi, il est très intéressant de constater que Briand estime que la séparation existe de fait au Canada et que ce pays est laïque. La perspective de Briand est donc proche de celle que développe Micheline Milot dans ses divers travaux (cf son ouvrage Laïcité dans le nouveau monde, Brepols, 2002 et ses contributions dans les 2 ouvrages collectifs que j’ai dirigés : La Laïcité à l’épreuve, religions et libertés dans le monde, Universalia, 2004 et De la séparation des Eglises et de l’Etat à l’avenir de la laïcité, l’Aube, 2005). De même, on lira (toujours dans La laïcité à l’épreuve) la contribution de Roberto Motta sur le Brésil.
Sur les Etats-Unis, Briand a un jugement nuancé. Il indique que « le principe de laïcité et de la neutralité de l’Etat est consacré dans la constitution fédérale » américaine. Mais ajoute que les Etats-Unis ont une « conception spéciale de la laïcité » où il y a « séparation juridique, mais une véritable union morale entre l’Etat et les Eglises » et développe, à partir de là de fort intéressantes remarques.
Notons que l’Amérique, perçue de manière moins nuancée que ne le fait Briand, sera le grand pays de référence des débats de la séparation. Partisans (Jaurès notamment) de la séparation et députés réservés à son égard citent laudativement l’Amérique, les premiers comme un exemple à suivre, les seconds pour déplorer que la séparation qui se prépare en France ne laissera pas (selon eux) la même liberté aux Eglises que la séparation américaine.
Notons aussi, que la séparation française ne va pouvoir réussir qu’en empruntant une disposition essentielle à la législation américaine : nous y reviendrons quand nous traiterons du fait que la séparation de 1905 a pris ses distances avec la logique de « l’universel abstrait républicain » (français)Sur les Etats-Unis, cf. notamment les travaux d’Isabelle Richet et la contribution de Fabienne Randaxhe dans De la séparation…à l’avenir de la laïcité.
Ce qui plait le plus à Briand est la laïcité mexicaine (elle est alors plus libérale qu’elle ne le sera de 1917 à 1992) : « Le Mexique, écrit-il, possède la législation laïque la plus complète et la plus harmonique qui ait été jamais mise en vigueur jusqu’à ce jour (…) : il connaît réellement la paix religieuse » et l’Eglise catholique est toujours forte, elle « ne parait pas avoir souffert du régime légal assez strict mais non oppressif dans lequel elle vit. »
Sur le Mexique : cf. la contribution de Roberto Blancarte dans De la séparation…à l’avenir de la laïcité.
On peut donc constater que l’esprit du principal auteur de la loi de 1905 est à l’opposé d’une « laïcité exception française ».
Nota Bene : on trouvera les 15 pages du rapport Briand sur le site de la Ligue française de l’enseignement : www.laicite-laligue.org
AINSI, POUR BRIAND, comme pour Buisson d’ailleurs, IL N’Y A PAS UN (voire deux ou trois) PAYS LAÏQUE(s), ET LES AUTRES QUI NE LE SERAIENT PAS. IL EXISTE, au contraire, DES PAYS PLUS OU MOINS LAÏQUES, DES PAYS EN TRAIN DE DEVENIR PLUS LAÏQUES QU’ILS NE L’ETAIENT AVANT. LA LAÏCITE EST UNE MARCHE.
IL EXISTE également chez Briand DES FACONS DIFFERENTES DE VIVRE LA LAICITE. (cf. la laïcité américaine comme forme un peu « spéciale » de vivre la laïcité).
Et vous aurez remarqué que sous propos sous entend une DEFINITION NON SUBSTANTIVE DE LA LAÏCITE, et plus encore UNE DEFINITION TRES LARGE OU LE PLURALISME S’AVERE UN CRITERE DECISIF (ainsi il peut exister, par exemple, des « demi laïcités » avec un système de « cultes reconnus »).
Avec la séparation, la France va passer d’un stade de « demi laïcité » à une laïcité plus conséquente qui, affirme Briand, vivent déjà plusieurs pays, notamment des deux Amériques. A chaque fois donc la France n’est pas seule de son espèce. LA MANIERE D’ENVISAGER LA LAÏCITE EST DONC DECONNECTEE DE L’EXPERIENCE FRANCAISE ; ELLE EST D’EMBLEE INTERNATIONALE ; BIEN DIFFERENTE DE LA VULGATE ET DU NOMBRILISME D’AUJOURD’HUI.
LA COMMEMORATION DU CENTENAIRE A INTEGRE LE FAIT QUE LE « PERE » DE LA SEPARATION EST BRIAND ET NON COMBES. ON LOUE BRIAND DE SON LIBERALISME, MAIS L’A-T-ON VRAIMENT COMPRIS ?(Bientôt je vous expliquerai pourquoi, après avoir été parmi les historiens qui ont contribué à mettre en valeur la figure de Briand et à dire que la laïcité de 1905 n’était pas celle du « petit père Combes », j’ai estimé nécessaire de remettre en avant la figure de Combes (et de lutter contre son actuelle diabolisation ou mise à l’écart) dans mon roman : Emile Combes et la princesses carmélite, improbable amour (l’Aube) qui, rassurez-vous paraît bientôt (le 14 octobre)
22:55 Publié dans LES QUINZE IMPENSES DE 2005 | Lien permanent | Commentaires (0)
09/09/2005
Le premier IMPENSE du CENTENAIRE
LES QUINZE IMPENSES DU CENTENAIRE
DE LA SEPARATION DES EGLISES ET DE L’ETAT
C’est sous cette forme un peu provocante que va être repris et continué le feuilleton sur l’histoire de la séparation qui, dans la 1ère moitié de 2005 a raconté le ministère d’Emile Combes et les débuts de la discussion parlementaire de la loi. Rassurez-vous, cette nouvelle manière de procéder va permettre d’intégrer certains grands moments de cette discussion parlementaire dont nous n’avons pas encore parlé, notamment ceux sur l’article 4 (mais aussi d’autres). Cependant, l’été et des débats auxquels j’ai participé m’ont rendu plus incisif et le blog se prête bien à un propos qui s’éloigne un peu du récit chronologique pour montrer en quoi des enjeux idéologiques présents vont à l’encontre d’un discours plus objectif. Cela ne signifie pas que l’on serait dans une situation semblable à celle d’il y a un siècle. Ne faisons pas de la contre-idéologie ! Simplement : il y a des choses qu’on ne veut pas savoir. Et, donc, même quand on ne peut pas les nier, on les rejette le plus possible dans l’impensé. Alors, allons y gaillardement donc, sans prudence excessive.
Accrochez les amarres, cela va swinguer !
Le blog de jeanbauberotlaicite.blogspirit.com va vous permettre de ne pas vivre une commémoration aseptisée ou glorifiant un national-universalisme franco-français.Vous en avez de la veine !
PREMIER IMPENSE : LE CONFLIT LATENT ENTRE LA POURSUITE DE LA « LAÏCITE INTEGRALE » ET LA DEMOCRATIE A PARTIR DU THEME DE LA « REPUBLIQUE MENACEE ».
Je ne vais pas (trop) me répéter : dans les précédentes Notes (Catégorie : Emile Combes, dans plusieurs Notes qui se déroulent à l’envers –c’est ça le blog !- comme les passages sur l’anticléricalisme de Combes, le projet de séparation déposé par Combes et le passage sur le « renversement du thème de la République en danger » ainsi que dans la Catégorie : Les débats sur la séparation, le passage sur « Anticléricalisme d’Etat et séparation »), vous avez déjà les matériaux nécessaires pour illustrer cette thèse.
Simplement, j’insisterai sur le fait qu’à l’époque on déclare explicitement rechercher la « laïcité intégrale », ce qui signifie la fin des accommodements concernant la laïcité scolaire opérés par Jules Ferry, la lutte contre les congrégations, la revendication du monopole de l’enseignement public laïque. Mais la « laïcité intégrale, comme l’horizon, s’éloignait à chaque mesure laïque qui prétendait l’approcher. Et de plus en plus de personnes estimaient que l’on s’éloignait des chemins de la démocratie.
Décrivons cet engrenage. Un laïque incontestable comme Goblet, l’auteur de la loi de 1886 laïcisant le personnel de l’école publique, va dire que la politique anticongréganiste (qui vise à interdire tout enseignement aux congrégations religieuses) porte atteinte aux « droits de toute une catégorie de citoyens » sans, pour autant être véritablement efficace face à « l’esprit clérical »[1]. Buisson, qui préside la Commission parlementaire sur les congrégations, veut contrer cette objection d’une atteinte aux droits de l’homme. Il établit alors une distinction entre la « congrégation » et le « congréganiste » (qui retrouverait ses droits une fois « sécularisé » par la disparition des congrégations). Cette distinction est fortement critiquée. Les congréganistes contraints et forcés de séculariser ne changent pas d’état d’esprit, bien sûr. L’enseignement qu’ils vont donner peut toujours être considéré comme contraire aux idéaux républicains.
L’engrenage se précise : le peu d'fficacité des mesures prises demande de les compléter par de nouvelles mesures telle l’interdiction de l’enseignement aux congréganistessécularisés là où ils l’exerçaient précédemment. Mais, Combes, lui-même reconnaissait qu’il était impossible « après avoir dit à un homme : "défroque-toi" de le frapper ensuite comme défroqué. » D’où l’idée de ne poursuivre que les « sécularisations fictives » et d’établir par un règlement d’administration publique, une nouvelle catégorie, celle des « sécularisés sincères »[2]. Cette disposition, qui nécessitait de scruter les consciences, ne pouvait pas, bien sûr, être mise en œuvre sans quitter le cadre de la démocratie. Elle sera demandée mais pas appliquée.
Une telle mesure aurait-elle, d’ailleurs, été suffisante ? Le directeur du journal Le Siècle Lanessan (qui va accueillir la campagne en faveur d’une séparation « libérale » de Raoul Allier dans son quotidien) ne le pense pas. « Les évêques et le clergé séculier pourront se mettre légalement à la tête de la réorganisation de l’enseignement que donnent aujourd’hui les congrégations. La loi nouvelle (interdisant tout enseignement aux congrégations et qui sera promulguée le 7 juillet 1904) leur en reconnaît le droit, et, comme ils disposent déjà du pouvoir de sécularisation des membres des congrégations, ils auront sous la main les maîtres nécessaires »[3]. Il n’est pas le seul de cet avis.
Il faut donc instaurer, selon les partisans de la « laïcité intégrale », le monopole de l’enseignement public, mesure que le sénateur Gustave Rivet, parodiant Combes, appelle le « monopole nécessaire ». Tout enseignement privé, congréganiste ou non, sera alors interdit. Le parti radical réclame cette mesure, dans son congrès de 1903. Le professeur Lintilhac, un des chefs de ce parti, affirme que « l’Etat ne doit concéder à (quiconque) la possibilité d’élever les futurs citoyens contre la cité ». Mais, même adopté, ce monopole de l’enseignement public laïque n’aurait pas suffit. L’engrenage aurait continué : on commençait déjà à dénoncer les « cléricaux latents » de l’enseignement public (ceux qui enseignaient Voltaire en ricanant un peu) et, de fait, même avec le monopole rien n’empêcherait, remarquait Buisson (pour le combattre), des candidats « cléricaux » de se présenter et de réussir les concours, à moins d’exercer un « contrôle odieux ou sur les opinions ou sur les origines des candidats ».[4]
Buisson, partisan de l’interdiction de l’enseignement aux congrégations se montre donc l’adversaire du monopole de l’enseignement public. Au fur et à mesure de l’engrenage, des républicains incontestables abandonnent donc l’utopie de la « laïcité intégrale » se rendant compte que ses chemins s’éloignent de ceux de la démocratie.Clemenceau adopte une position analogue à celle de Buisson. Il prononce un discours célèbre: « Pour éviter la congrégation, nous faisons de la France une immense congrégation. (…) Nos pères ont cru qu’ils faisaient la Révolution française pour s’affranchir ; nullement, c’était pour changer de maître. (…) Aujourd’hui où nous avons détrôné les rois et les papes, on veut que nous fassions l’Etat roi et pape. Je ne suis ni de cette politique ni de cette philosophie. »[5].
Mais tout cela ne doit pas faire oublier que la loi du 7 juillet 1904, maintenant perçue comme le summum de l’anticléricalisme d’Etat, a semblé trop timide à toute une tendance républicaine[6]. Le personnage de Combes ne mérite ni l’excès d’honneur de ceux qui le croient ‘père’ de la loi de 1905[7], ni l’indignité de ceux qui lui font une réputation de « sectaire » et d’ « esprit borné ».En effet, on assiste maintenant à une opposition moraliste entre un « mauvais » Combes et un « bon » Briand. Cela permet de faire l’économie de ce qui s’est réellement passé entre 1902 et 1905. Comme nous allons le voir dans le second impensé du centenaire, Ce n’est pas Combes (qui a conduit, mais aussi limité l’anticléricalisme) c’est tout un ensemble de républicains qui ont estimé que la « République (était) menacée » et qu’il fallait prendre des mesures de plus en plus radicales pour la défendre.
(à suivre)[7] Il n’en reste pas moins qu’il en a mis en route le processus, avec prudence et une habileté certaine et qu’ensuite il usa de son influence au Sénat pour faire aboutir la loi.
20:10 Publié dans LES QUINZE IMPENSES DE 2005 | Lien permanent | Commentaires (2)