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23/02/2008

POUR UN AUDIO VISUEL SANS PUB, CONTRE LE CLERICALISME MEDIATIQUE

Au dessus des partis, des groupes de pression, des intérêts partisans qu’il est, votre Baubérot favori. Même que depuis de Gaulle, nul n’avait vu un zigoto de cette stature. Et encore, sur de Gaulle, il y aurait beaucoup à dire. Mais ce n’est pas le sujet de cette Note.

Nulle gêne donc, après avoir décrypté les frasques du président avec les princes de « l’Eglise » (elle se nomme ainsi, pourtant il en existe de multiples) et les princes d’Arabie (s’est où, dites ?), de lui donner raison, à ce président ravissant, quand il propose de supprimer la publicité dans l’audiovisuel public.

Tenez, il est tellement vertueux, intègre et tout le Baubérot, que quand il a reçu un télégramme indiquant : « Naturellement, nous ferons une exception pour votre Blog. Ce sera la seule pub. licite. » Une seule direction : la poubelle…

Et puisque la proposition est bonne, l’accueil très réservé qu’elle a reçu est profondément décevant.

Ou plutôt significatif. Un directeur de la MIVILUDES (vous savez, le machin antisectes, qui a été sous les feux de l’actualité cette semaine, et sur lequel j’ai déjà pris position : prière de s’y référer) m’avait affirmé, quand il m’avait reçu à sa demande : « je trouve beaucoup plus préoccupant la l’abrutissement répétitif, à haute dose, chaque jour, dans chaque foyer, par les publicités qui imprègnent à leur insu l’esprit des gens de façon indélébile, que l’activité des  (dites) sectes. »

Si c’est lui qui le proclame !

Il faut croire que la gauche et la quasi-totalité des journalistes sont nettement plus royalistes que le roi. On a eu la grève la plus suivie, depuis Mathusalem, dans le service public. Et les objections présentées m’ont souvent paru tirer à côté de la plaque (exprès ?).

Tout se passe comme si les faiseurs d’opinions étaient eux-mêmes tellement intoxiqués par la drogue publicitaire, qu’ils ne pouvaient plus vivre sans.

Reprenons en quelques unes (cela n’a rien de limitatif, les internautes peuvent, naturellement, en ajouter):

D’abord, le sempiternel fait du prince : Sarko qui annonce cela tout de go, et (s’indigne-t-on), le directeur de France-Télévision n’était même pas au courant. Sans parler de Machin Truc Muche et de Dupont La Joie.

Et on ajoute que le principe est posé alors que l’on ne sait pas encore comment le réaliser.

Eh bien, pourtant, je crie « bravo », 2 fois bravo. Car c’est la seule manière d’avancer.

Je vous ai déjà expliqué à quel point des rouages administratifs, bureaucratiques (j’aurais pu ajouter : politiques) sont capables de briser la moindre réforme, s’entendent pour ne jamais rien changer, pour s’encroûter de plus en plus.

Prévenir qui que ce soit, c’est s’exposer sûrement à des fuite et à voir le projet torpillé avant même d’être lancé.

Si moi, à partir de ma petite expérience du politique, je le sais, alors vous pensez bien que les journalistes ne l’ignorent nullement. Ils font seulement semblant. Faux culs !

Il ne fallait pas que la moindre personne du service public soit au parfum, c’est la seule chance de réussite.

J’ai été, il y a quelques années membre de la Commission sur la violence à la télévision. Nous avons auditionné les membres des différentes chaînes de télé. J’en ai gardé un sacré souvenir.

Les représentants de TF1 se sont faits tout gentils, tout humbles, tout petits. Style : « Oui, on le sait, on a des efforts à faire. Mais on a commencé à les faire. Et on va les poursuivre. Mieux, les augmenter. »  Etc.

Ne s’y laissait prendre que ceux qui le voulaient bien. Mais, au moins, ils admettaient être un peu merdeux.

Telle ne fut pas l’attitude des représentants des chaînes publique. Là, c’était un tout autre style, genre : « nous on est la télé propre, la télé sans tâche et sans reproche, la télé quasiment parfaite,… »

Plus que le contenu même de ce qu’ils ont dit, il y avait l’attitude, la posture, le roulement des mécaniques.

Et quand certains d’entre les membres de la Commission ont donné des exemples précis de trucs craignos, le même refrain reprenait.

Bref, ces représentants de la télé publique m’ont fait très mauvaise impression. Ils se comportaient comme si cette télé publique était différente, par essence, de la télé commerciale.

Alors, tant mieux qu’ils n’aient pas été au courant du projet de suppression de la pub.

Ma réflexion est la même quant au fait de poser publiquement (donc irréversiblement) le principe avant d’examiner les moyens pour le réaliser.

J’ai tellement entendu des ronds de cuir m’exposer que, certes, cette proposition était excellente, que d’ailleurs, si la ministre l’avait visée, il n’y avait pas à discuter, seulement à appliquer. Oui, mais, malheureusement, c’était totalement impossible pour telle et telle raison.

Et au début, je m’y suis laissé prendre. J’ai travaillé pour pouvoir résoudre les problèmes pratiques que l’on me posait.

Tout guilleret, je retourne voir mes ronds de cuir et leur expliquer comment résoudre les difficultés qu’ils avaient soulevées.

Alors là, ils me regardent d’un air très très malheureux, et leurs yeux me disent : mais enfin, pourquoi nous persécutez-vous ainsi ! Pour un peu, ils seraient allés se plaindre à la Ligue des droits de l’homme.

Oui c’était les yeux de victimes envers leur tortionnaire. Rassurez-vous, je ne parle pas d’expérience. Sauf que, une fois, j’ai tué un lapin. Et que, manque d’habitude, j’ai du m’y prendre à deux fois et le lapin m’a regardé, d’un air de gros reproche, à peu près comme mes ronds de cuir.

Sauf que lui, il avait une bonne raison !

Bref, je n’ai pas tardé à comprendre qu’existe une sorte de gens qui haïssent les solutions et adorent les problèmes. Et dont toute l’intelligence subtile s’aiguise à effectuer de très brillantes démonstrations prouvant que les problèmes sont insolubles.

Ce n’est pas très difficile, car il y a un truc. De même que des journalistes vous disent que l’objectivité n’étant jamais absolue, l’objectivité n’existe pas (on ne la rencontre pas chez eux, effectivement,…). De même, il suffit de vouloir des solutions parfaites, pour pouvoir prétendre qu’il n’existe aucune solution.

Elles sont toutes critiquables, contestables. Donc, ne bougeons pas notre petit doigt.

Ce que je trouve d’ailleurs admirable dans la question précise de la suppression de la télévision dans l’audiovisuel, c’est que tout le monde dit : la gauche en rêvait depuis 20 ans. Et tout le monde trouve normal que la gauche n’ait aucune idée pour réaliser la chose.

Comme si le rêve devait surtout rester tel, ne jamais se réaliser.

On a de la chance : avoir à la fois un président bling-bling et une gauche complètement zin-zin ! C’est sans doute cela la fameuse « exception française » que le monde entier, que dis-je, le système interplanétaire, nous envie.

Ah, comme c’est chouette d’être français.

Vous comme moi, nous payons une redevance. Et nous avons eu Ardisson et Fogiel. D’accord on a trouvé un prétexte pour les balancer. C’est déjà ça. Mais on nous a imposé Stéphane Bern et tant que les recettes publicitaires sont indispensables, elles font plus ou moins la loi.

Alors, il n’est pas tombé de la dernière pluie, votre Baubérot bien aimé. Il ne s’imagine surtout pas que la fin de la pub soit une solution miracle. Ce n’est certes pas suffisant. Mais c’est nécessaire.

Et arrêtons les questions stupides

Style : mais avec quoi on va remplir les moments jusqu’à présent occupés par la pub ? Celle-ci nous rapporte 850 millions d’€. Il nous en faut 1 milliard 2, avec les trous dus à l’absence de pub.

N’importe quoi, pourquoi pas 4 milliards 9 que la Société Générale se ferait un plaisir de vous avancer !

Avec quoi, vous allez remplir les moments où vous ne livrerez pas des parcelles de cerveau disponible?[1] Ben, peut-être en faisant passer à 22h30 les rares émissions intéressantes qui sont actuellement à 23H30 – minuit, Ducon (comme dirait Bigard, vous voyez, moi aussi je sais être bling-bling !).

Eh puis, il y a les archives de l’INA. Des milliers et des milliers d’heures. Vous savez, du temps où la télé était intelligente. Ou elle n’avait pas de pub ! Ou Lévi-Strauss, Raymond Aron et d’autres s’y exprimer. Du temps heureux où BHL ne sévissait pas encore.

Rassurez vous, il y avait aussi de très bons divertissements : Jean-Christophe Averti, cela valait bien la Star’Ac ! Je suis sur que bien des jeunes adoreront. Et pour les… moins jeunes[2], cela aura un délicieux côté, madeleine de Proust.

Et soi jamais la loi vous interdisait de puiser dans les archives de l’INA (je n’en sais rien), eh bien modifions la loi que diable. La télé publique c’est notre télé, et on a le droit, nous et nos représentants, d’en faire ce que nous voulons.

Que mille fleurs s’épanouissent, que mille projets fleurissent. Que l’inventivité, la créativité se libère. Il y a, dans ce spectacle affligeant, une initiative heureuse : celle de Télérama qui dit : chiche et propose à ses lecteurs d’imaginer une télé sans pub.

Tant que nous y sommes, une première idée : que les journalistes de cette nouvelle télé ne parlent plus jamais de nous comme des « anonymes » : nous sommes des « personnes », à la rigueur des « gens », pas des êtres sans nom et sans visage, Messieurs-dames, les nouveaux cléricaux.

Quand certains voulaient un monopole de l’Etat sur l’enseignement, Jules Ferry, ce grand laïque devant l’Eternel, avait opposé un net et clair refus. L’enseignement privé était indispensable à un Etat démocratique. Pour 2 raisons:

-d’abord parce l’Etat risquait toujours d’imposer certaines doctrines. Un enseignement qui échappe à l’Etat était la garantie d’un véritable pluralisme des idées. Ce pluralisme supposait la coexistence de systèmes d’enseignements réellement différents.

-ensuite parce que l’enseignement privé pouvait effectuer des « expérimentations » que l’enseignement public, aux contraintes plus lourdes, ne pouvait pas forcément se permettre.

Nous ne sommes plus à la fin du XIX, mais au début du XXIe

L’influence de la télé, dans l’éducation (des enfants comme des adultes) est dominante.

Le risque de dictature provient moins de l’Etat-nation, beaucoup plus du règne sans partage du marché

C’est pourquoi, le même idéal laïque qui voulait, il y a 125 ans, un enseignement privé libre et expérimental doit lutter aujourd’hui pour une télé publique non commerciale, libre et expérimentale.



[1] Vous avez remarqué l’hypocrisie complète : tout le monde est tombé à bras raccourcis sur TF1 quand son directeur a parlé des « morceaux de cerveau disponibles », liés à la pub. Et quand on propose de supprimer la pub sur le service public,…

[2] Vous l’avez remarqué : on ne dit pas « vieux », mais « moins jeune », pas « aveugle » mais « mal voyant ». Etc. Seule exception : on ne dit pas « mal comprenant », on dit encore « journaliste ».

16/02/2008

LA RECTIFICATION DE SARKOZY AU CRIF, C'EST PIPEAU

   Bon, comme l’écrit Le Monde, on n’a pas élu un président, mais un sujet de conversation ! Au dîner du CRIF, il a voulu rectifier le tir, il a voulu soigner le mal par le mal, en lançant une autre énorme bêtise : faire porter à des enfants de 10-12 ans le fardeau de la Shoah. Et Hollande, en train de lire, comme d’hab’, L’Histoire de France pour les Nuls, a approuvé !

   Sur ce sujet, heureusement, beaucoup de gens ont réagi très vite, et ont dit des choses très justes, ce qui me dispense de long propos.

   J’indiquerai simplement mon espoir que les absurdités auxquelles conduisent l’invocation du « devoir de mémoire » entraînent une réflexion sur cette expression elle-même. Elle n’a jamais été intellectuellement travaillée par ceux qui la prônent. Elle permet de dire tout et n’importe quoi. Elle est le cache-sexe de redoutables amnésies.

   Bref s’il existe un « devoir » en matière de passé, c’est d’abord un devoir d’histoire. Un devoir de reconstituer ce passé le plus scientifiquement possible, et sans tricherie. C’est ensuite, d’affronter son passé récent, celui que l’on veut oublier. Pour la France, ce serait de se confronter enfin, à la guerre d’Algérie. C’est, enfin, de construire un avenir qui, autant que faire ce peut tienne compte des erreurs, des fautes du passé pour ne pas infliger, dans un siècle, un autre pseudo devoir de mémoires, par rapport à nos conneries d’aujourd’hui !

 

   Revenons aux propos sur la laïcité, le sujet de ce blog. Au CRIF, le président a d’abord utilisé  la stratégie qui consiste à prétendre ne pas avoir dit ce que l’on a dit. D’après lui, il aurait dit « tout simplement que l’expérience religieuse reste une question importante pour l’humanité ». Si cela avait été son seul propos, seuls quelques dinosaures auraient protesté, bien sûr.

   Puis, il a tenté de rectifier le tir sans véritablement y parvenir.

   En effet, Sarkozy met toujours en scène deux personnages, celui qui enseigne une morale laïque et celui qui enseigne une morale religieuse.

   A Latran, il a effectué la dépréciation du premier et  l’exaltation de l’autre. Peut-être inspiratrice du propos,  Madame Mignon (la dir’cab’), a reconnu, a posteriori, qu’il était « limite »[1] (j’ajouterai : comportait un petit air de revanche du curé sur l’instituteur). Au CRIF, le président a voulu mettre sur le même plan les deux morales : « Quand il est difficile de discerner le bien et le mal, a-t-il précisé, il est bon de s’inspirer de l’une comme de l’autre. »

   Or cette association étroite est précisément celle qui se trouvait réalisée avant 1882, et l’instauration de la morale laïque, quand le cours de morale religieuse faisait partie du programme de l’école publique.

   A l’époque, tous les enseignements se trouvaient imprégnés par une tonalité morale. Les exemples de grammaire, les dictées, même parfois les problèmes de mathématique.

L’instituteur était donc déjà maître de morale. Mais son enseignement avait besoin du complément d’une morale (à prétention) « transcendante ». Et celle là, c’était « le curé » qui la donnait,  à quelques endroits aussi le « pasteur ». Je reprends les mots du discours du Latran.

   C’est d’ailleurs vraiment drôle : alors que partout ailleurs, le discours chanoinesque confond complètement christianisme et catholicisme, là, le « pasteur » est mentionné, comme si la source était un livre d’histoire décrivant l’école publique avant sa laïcisation.

   Donc il fallait « adosser » alors la morale à une morale transcendante. Cela, pour des raisons proches de celles énoncées au Latran : si on ne met pas une « transcendance » au bout du système, il reste quelque chose d’inachevé, une non réponse à « l’aspiration profonde des femmes et des hommes à une dimension qui les dépassent », à quelque chose qui « comble l’aspiration à l’infini ». Il faut « expliquer ce qui se passe avant la vie et ce qui se passe après la mort » pour boucler la boucle, que le système moral proposé soit bien fermé, clôt sur lui-même.

   Président moderne, Sarko Ier utilise des mots, qui connotent l’existentiel, et même une angoisse existentielle, qui est peut être sienne, blottie derrière son côté ‘super actif’.

   Il vaut la peine de citer assez longuement ses propos : « fonder une famille, contribuer à la recherche scientifique, enseigner, se battre pour des idées, en particulier si ce sont celles de la dignité humaine, diriger un pays, cela peut donner du sens à une vie. Ce sont ces petites et ces grandes espérances « qui, au jour le jour, nous maintiennent en chemin » pour reprendre les termes même de l’encyclique du Saint Père. Mais elles ne répondent pas pour autant aux questions fondamentales de l’être humain sur le sens de la vie et sur le mystère de la mort. Elles ne savent pas expliquer ce qui se passe avant la vie et ce qui se passe après la mort. »

 

   Au XIXe siècle on racontait cela de façon plus moraliste, on s’aventurait davantage dans l’au-delà. Ce qui se passait après la mort, je l’ai trouvé raconté dans un cahier d’écolier de l’année 1878-1879, juste avant la laïcisation de l’école publique donc.

   Une âme « parfaitement pure », est-il écrit dans ce cahier, peut aller goûter des félicités paradisiaques. Une âme encore « souillée de quelques fautes », la voilà au purgatoire (mais, rassurez-vous elle finira, elle aussi, au paradis). Une âme surprise « en état de péché mortel » et c’est l’enfer assuré, avec des supplices proportionnels au mal qu’elle a pu commettre : elle souffrira d’« autant de tourments et d’angoisses qu’elle a trouvé de délices dans son iniquité. »

   Bigre ! Et il n’est pas impossible que certains « tourments », comme des brûlures des doigts de pied par d’hideux diablotins, ou des morsures sadiques de belles diablesses, soient réservés aux deux fois divorcés.

Mais je taquine mon Président bien aimé, en truquant un peu les cartes. Car, ce même cahier spiritualise les croyances populaires en précisant que le ciel et l’enfer ne sont pas « deux endroits », mais « deux situations de l’âme » ; le ciel indique « la communion de l’âme avec Dieu », l’enfer «les souffrances et les remords de la séparation avec Dieu ». Quant au purgatoire, il a disparu dans le cours du raisonnement.

    Tout cela peut faire sourire, mais avait un sens.

   Un penseur spiritualiste de l’époque, Henri Marion, l’expose en affirmant : « Notre raison exige que l’accomplissement du devoir trouve sa récompense, que la violation de la loi morale soit châtiée. » Or, « cela n’est pas de ce monde » : « l’insuffisance manifeste des châtiments et récompenses de la vie présente est, au contraire, choquante ». Il faut donc que, « dans une vie ultérieure et par la volonté toute puissante d’un juge infaillible, chacun de nous obtienne enfin le sort qu’il mérite. »

Raisonnement redoutable car, partant de la raison, Marion reconnaît qu’il mène aux « croyances dogmatiques ». C’est pourquoi certains pédagogues républicains tel Gabriel Compayré, atténuent la chose. Ce dernier estime que «face aux injustices de la vie présente, il faut en appeler « à l’espoir d’une autre vie ».[2]. Tiens, nous retrouvons « l’espérance » qui est au cœur du propos présidentiel au Latran.

   Tout cela fleure bon nos « racines chrétiennes » : il s’agit de la perspective séculaire de ce que l’on appelait, en théologie, la ‘théodicée’, à la fois justification de Dieu (l’après vie comme réponse au triomphe apparent du mal sur la terre) et justification par Dieu (fondement ultime d’un ordre moral juste).

   Mais précisément, Jules Ferry a demandé de larguer de telles amarres, a voulu couper le cordon ombilical avec ces fameuses « racines », sans les nier pour autant. Cela au profit, non de l’athéisme, mais d’un agnosticisme arbitral, laissant chaque acteur jouer ses propres options métaphysiques.

A tort ou à raison (peu importe) il projette cette coupure dans la pensée de Bouddha : « Dans le bouddhisme, il n’y a pas de peines ni de récompenses. C’est une moralité qui se tient debout toute seule. »[3]. La morale laïque va donc progressivement devenir une morale trouée, structurellement trouée. C’est comme le gruyère, cela fait partie de son être propre.

   Le postulat, qui est au cœur de l’option démocratique, c’est que l’être humain doit être libre et responsable. Il doit opérer lui-même la clôture, la boucle du cercle. Trouver son propre chemin. Il doit faire profession personnelle de foi ou d’athéisme. Si l’Etat, si l’institution école ferme le système moral à sa place, alors on se situe dans un engrenage au bout duquel le risque de totalitarisme n’est pas absent.

***

   Et c’est cela, la véritable séparation, Roger Williams (un pasteur baptiste, le premier qui a réalisé durablement la séparation des Eglises et de l’Etat sur un territoire : c’était le Rhodes Island, futur Etat fédéré américain, au milieu du XVIIe siècle) utilisait une métaphore : celle d’un vaisseau où des voyageurs qui prendront des directions différentes, quand ils arriveront au port, sont embarqués ensemble et doivent accomplir des tâches communes, vivre en bonne intelligence pendant le temps de la traversée.

   Il me faudrait pouvoir raconter cela au moyen d’un petit croquis à trois dimensions. A l’école publique du XIXe siècle, où deux dimensions suffisent et où l’instituteur et le curé (quelquefois le pasteur) se serrent les coudes (le curé bénéficiant, cependant, d’un piédestal), succède l’école publique laïcisée où les trois dimensions s’avèrent nécessaires.

   En effet, et c’est là que l’affaire se corse, le trou de la morale laïque, l’espace que l’instituteur laisse vide, n’est pas rempli sur le même plan. Il faut un autre plan, à distance du précédent.

 

Et là, dans cet autre plan, nous rencontrons tous les personnages qui sont, de façon heureuse cette fois, introduits dans le discours de Riyad : « juif, catholique, protestant, musulman, athée, franc-maçon ou rationaliste ». La liste déborde bien la religion cette fois. Et c’est obligatoire.

   Un plan le public, un plan le privé. Non que par ‘privé’, il faille entendre quelque chose qui n’aurait pas le droit de sortir de la maison. Non, privé cela signifie socialement facultatif, volontaire, libre. Cela veut dire : livré au choix personnel.

***

 

   Toute cette affaire renvoie au problème de la religion civile, concept façonné par Jean-Marie Bigard (qui était au Latran), non par Jean-Jacques Rousseau. Et, significativement, un des « dogmes » de la religion civile rousseauiste est « la vie à venir, le bonheur des justes et le châtiment des méchants ».

   Que dit ce cher Jean-Jacques à la fin du Contrat social ?[4] Que la religion est nécessaire au bon fonctionnement d’une société, à la morale publique, à la paix civile, tout en réfutant le christianisme comme religion d’Etat. Pour Rousseau, et c’est cela la religion civile, « il importe à l’Etat que chaque Citoyen ait une religion qui lui fasse aimer ses devoirs », et il précise : « les devoirs que [chacun] est tenu de remplir envers autrui. »

   Nous ne sommes pas très loin des déclarations chanoinesques : « un homme qui croit, c’est un homme qui espère. Et l’intérêt de la République, c’est qu’il y ait beaucoup d’hommes et de femmes qui espèrent. La désaffection progressive des paroisses rurales, le désert spirituel des banlieues, la disparition des patronages, la pénurie de prêtres, n’ont pas rendu les Français plus heureux. C’est une évidence. » Et, tout de suite après, cet ajout « s’il existe incontestablement une morale humaine indépendante de la morale religieuse, la République a intérêt à ce qu’il existe aussi une réflexion morale inspirée de convictions religieuses. »

   Et ensuite, une citation laudative des propos pontificaux : « Il paraît évident que l’homme a besoin d’une espérance qui va au-delà. Il paraît évident que seul peut lui suffire quelque chose d’infini, quelque chose qui sera toujours ce qu’il ne peut jamais atteindre » puis« Comme l’écrivait Joseph Ratzinger [= le futur Benoît XVI] dans son ouvrage sur l‘Europe, « le principe qui a cours maintenant est que la capacité de l’homme soit la mesure de son action. Ce que l’on sait faire, on peut également le faire ». A terme, le danger est que le critère de l’éthique ne soit plus d’essayer de faire ce que l’on doit faire, mais de faire ce que l’on peut faire. »

   Certes, le président-chanoine ne va pas jusqu’à chasser de la République les hommes qui espèrent peu et les ménagères désespérées[5] , alors que Jean-Jacques, lui, proposait, carrément, de « bannir de l’Etat quiconque ne croit pas [aux dogmes de la religion civile], non comme impie, mais comme insociable. »

   Mais il établit un continuum entre l’intérêt de la République, donc la ‘sociabilité’, et la croyance. Il fait de l’homme « qui croit (…et) qui espère » en une transcendance, un citoyen plus intéressant pour la République qu’un autre. Etant protestant, je suis inclus dans ceux qui croient et espèrent. Pourtant, si les douteurs sont des citoyens de seconde zone, je refuse ce qui devient un privilège indu.

 

    A Riyad, entraîné par Maître Guaino, son conseiller spécial, le président est allé encore plus loin. Après avoir décrété que « Musulmans, Juifs et Chrétiens (…) C’est bien le même besoin de croire et d’espérer qui leur fait tourner leurs regards et leurs mains vers le Ciel pour implorer la miséricorde de Dieu, le Dieu de la Bible, des Evangiles et du Coran. », il a conclu : « Dieu transcendant qui est dans la pensée et le cœur de chaque homme ».

   Non seulement personne ne l’a élu pour trancher entre un Dieu exclusif d’une religion et un Dieu syncrétique des religions du Livre, mais ce Dieu est bien transformé en un Dieu de religion civile, qui doit se trouver « dans la pensée et le cœur » de chaque citoyen normalement constitué.

   Comment concilier cela avec l’existence d’athées ou de personnes totalement indifférentes en matière de religion, aussi citoyens que les autres dans une République laïque ? (je rougis de honte d’avoir à le rappeler !).

   Le discours du Latran répond : « Même celui qui affirme ne pas croire ne peut soutenir en même temps qu’il ne s’interroge pas sur l’essentiel. Le fait spirituel, c’est la tendance naturelle de tous les hommes à rechercher une transcendance. Le fait religieux, c’est la réponse des religions à cette aspiration fondamentale. »

Notre président Lucky Luke, tire plus vite que son ombre : trois idées en trois phrases. On ne lui en demande pas tant. Mais il faudrait mettre un peu d’ordre dans ces idées là.

   Mentionner que celui qui n’a pas d’appartenance religieuse (comme on dit) s’interroge à sa manière sur l’essentiel, fort bien. Mais pourquoi le dire de façon aussi dépréciative ? Comme si cette personne ne le faisait que malgré lui, en dépit de son non croire religieux ? Et d’un.

   La définition du fait spirituel, je veux bien (quoique le « naturel » me gène). Mais à la condition de comprendre la transcendance de façon beaucoup plus large que l’approche guaino-restrictive. Il faut intégrer ce que les amis que Sarko compte dans le show biz’ appellent la ‘transcendance intériorisée’ ou la ‘transcendance horizontale’, et… ‘le dépassement de l’opposition immanence – transcendance’. La star’Ac est finie. Nicos a donc du temps pour affranchir notre président bien aimé là-dessus.

   Enfin le « fait religieux » comme réponse à l’ « aspiration fondamentale du fait spirituel », peut-être mais à condition de préciser que ce n’est pas la seule et unique réponse. Et c’est parce que cela est loupé (déjà dans La République, les religions, l’espérance) que se trouve emprunté le chemin de la religion civile, qu’elle soit catho-laïque, oecuménico-laïque ou syncrético-laïque, peu importe.

 

   Il faut donc vite faire marche arrière pour pouvoir laïquement redémarrer. La morale publique, dans une démocratie laïque, met à égalité «celui croit au ciel et celui qui n’y croit pas ». Tiens, c’est un poème écrit à propos de la Résistance. Décidément la mémoire de Sarkozy lui joue de sacrés tours !

Moralité : la rectification du CRIF, c’est pipeau !

 

PS: la fréquentation du Blog continue de croître, quand les sondages sur la popularité de notre sublime président continuent de baisser. Je viens de recevoir un SMS, malheureusement non signé, et indiquant: "Dommage que tu sois déjà marié. Cela m'aurait bien plus de devenir la Première dame du Blog" Mes oeuvres complètes à celle ou celui qui trouvera l'auteure.


[1] Propos rapporté par H. Tincq, Le Monde, 15 février 2008.

[2] Les extraits du cahier et le propos des philosophes-pédagogues proviennent de mon ouvrage : La Morale laïque contre l’ordre moral, Le Seuil, 1997

[3] Cité par J. Chevallier, La séparation de l’Eglise et de l’Ecole, Paris, Fayard, 1981, 438.

[4] Chapitre VIII, « De la religion civile » (à des pages différentes selon les éditions du Contrat social !)

[5] Fine et subtile allusion aux Desperate Housewives, célèbre série télévisée américaine. Je me ferai un plaisir de vous offrir les cd, si jamais il vous en manquait.

10:26 Publié dans ACTUALITE | Lien permanent | Commentaires (4)

09/02/2008

LE LIVRE QUE SARKOSY DOIT LIRE ABSOLUMENT POUR EN FINIR AVEC LES "RACINES CHRETIENNES"

Chers Amis,

Je reviens de Montréal où je vais périodiquement, actuellement, pour réaliser de passionnantes interviews sur des débats qui mettent en jeu différentes conceptions de la laïcité.

Et notamment la question de ce que l’on appelle au Canada les « accommodements raisonnables »[1].

Eh bien, vous allez être très surpris, j’avais de la peine à faire parler de ces beaux sujets mes interlocuteurs, des gens très bien au demeurant (magistrats, universitaires, etc). C’est eux qui me questionnaient. D’abord : « Alors Carla et Nicolas, c’est quand le mariage ? » Et à peine le mariage fut-il (mariage futile ?) prononcé que la grande question fut : « Alors, c’est quand le divorce ? »

J’ai répondu : « si vous voulez parler de la France, il y a moult problèmes, celui du pouvoir d’achat par exemple,… » Mais nib de sib, le pouvoir d’achat des Français les laissait encore plus froids encore que la température ambiante. En revanche Nicocarla,… Pourtant, ce n’était même pas encore la Saint Valentin[2]

Et là j’ai eu une révélation : le pouvoir d’achat, c’est particulariste, voire même sans doute « communautariste ». Les Zamours nicoliens-carlatantinesques, c’est universel. Voilà le nouvel universalisme républicain. Et pas complètement abstrait, en plus.

D’accord je suis Le Grand spécialiste du sujet, mais à la fin j’avais l’overdose. Alors je me suis promis, juré à moi-même personnellement, de ne plus parler du couple infernal pendant au moins 3 Notes. Et vlan, à peine rentré à Paris, un colis m’attendait avec un livre qui, immédiatement, m’a obligé à penser de nouveau à Nicolas.

En effet c’est THE livre qu’il doit lire de toute urgence pour ne pas raconter n’importe quoi la prochaine fois qu’il ira chanoiniser. Le moment est d’ailleurs favorable : à un mois des municipales, s’il veut éviter le naufrage, qu’il s’enferme dans son petit 450 pièces-cuisine élyséen, s’adonne à cette admirable lecture et, surtout, ne dise plus rien.

En prenant des notes, il en aura bien pour 8 jours. Il a tellement à désapprendre et à apprendre sur le sujet. Il faut dire que cette somme fait exactement 95 pages, en comptant les annexes toutefois.

Le livre est extraordinaire, prodigieux, c’est la huitième merveille du monde, qu’écris-je la première, la seule ! Pipi de chat que les z’autres !

Pourtant, jusqu’alors je me suis extrêmement méfié de l’auteur, un certain Jean baubérot. Ma grande amie, Caroline F., m’a en effet amicalement mise en garde : « l’humour est sa cup of tea, cela prouve bien son penchant pour la laïcité à l’anglo-saxonne. »

J’ai donc failli ne pas le lire. Et, en fait, il n’y a pas la moindre blague dans le texte. Donc, on peut, à la rigueur et par grande indulgence, penser que le dit auteur n’est pas complètement antirépublicain.

Pourquoi ce livre doit devenir l’ouvrage de chevet du petit Nicolas ? Parce qu’il s’agit d’une Petite histoire du christianisme (Librio)… et que l’on y trouve pas l’expression de « racines chrétiennes ».

En revanche, en 150000 signes (c’est dire que l’auteur a passé plus de temps à sélectionner, modifier pour pouvoir raccourcir tout en étant clair, etc), vous avez vingt siècles (et quelques années en supplément gratuit) pour 3 €. C’est donné, et si votre supermarché n’en a pas au moins 20 exemplaires en rayon, changez immédiatement de crémerie.

Non ce n’est pas la perspective essentialiste des « racines », mais celle, historique, des périodes. S’il est exact d’une société est pétri d’historicité, toutes les périodes de son histoire sont sédimentées dans son présent, et pas seulement ses « racines ».

L’héritage chrétien de la France -qui est un de ses héritages, pas le seul- est façonné par différentes périodes.

Du premier au IIIème siècle, nous trouvons la 1ère période, celle du christianisme persécuté et pourtant de plus en plus présent dans la société romaine, à tel point qu’au IV et Vème siècles (seconde période), il devient affaire d’Empire. L’Empire s’écroule et le christianisme se fait (IIIème période) civilisateur de nations.

Des croisades à la Reconquista (qui ne se termine qu’en 1578), un christianisme sur de lui et dominateur, est à la fois bâtisseur de cathédrales, créateur d’universités et de culture savante, persécuteur de juifs, de musulmans et des multiples hérétiques qu’il produit en son sein (IVème période). Il s’agit du christianisme latin, le christianisme oriental a pris le large.

 

Arrivent, pratiquement simultanément, une Vème période marquée par l’extension mondiale plus ou moins réussie (échec des rites chinois) du christianisme, en même temps que la division du christianisme latin engendre le pluralisme et favorise le début du double processus de sécularisation et de laïcisation.

La modernité est en marche, et rien ne va l’arrêter (VIème période). Elle se produit à la fois dans et contre le christianisme et celles et ceux qui oublient une des deux données du problème, se plantent royalement. La volonté des institutions chrétiennes de rester dominantes engendre un anticléricalisme d’Etat, plus ou moins fort suivant le rapport des Eglises à la modernité. Au même moment, le christianisme participe, par les missions, à la nouvelle vague d’expansion européenne.

La VIIème période se marque par les totalitarismes séculiers qui persécutent chrétiens (communisme) ou entretiennent avec les Eglises des rapports ambiguës (fascisme, nazisme). L’œcuménisme apparaît comme une nouvelle marque de vitalité chrétienne face aux défis de la modernité triomphante. L’individualisation de la religion favorise cependant de nouvelles formes de christianisme. Et de nouveaux défis apparaissent : progression de la rationalité instrumentale, de l’émotionnel médiatique,…

 

Voilà en gros la perspective générale. C’est aussi la justification du livre (outre son aspect vulgarisateur pour un grand public, lié à la collection dans laquelle il paraît). Honnêtement, il me semble qu’une telle perspective, ou du moins l’attention à la modernité, à la sécularisation et à la laïcisation qu’elle suppose, n’existe de façon systématique dans aucun autre ouvrage d’histoire du christianisme en français[3].

Pour la petite histoire, j’ai eu très peur quand a paru, alors que je rédigeais mon propre ouvrage, l’Histoire du christianisme au Seuil dirigé par Alain Corbin. D’abord parce que Corbin est un très grand historien, qui a beaucoup renouvelé l’historiographie, même s’il n’a pas tellement fait école (c’est un ami, en plus). Ensuite, parce que cet ouvrage fait 500 pages et que le mien devait en faire 75 + les annexes. Enfin, parce qu’ils se sont mis à… 57 historiens pour le rédiger.

J’ai trouvé cette Histoire du christianisme excellente, innovante sur bien des points (de très bons chercheurs y résument les résultats de leurs recherches) et, curieusement, d’architecture assez classique. Je dois avoir des chevilles beaucoup trop enflées, cela ne m’a semblé nullement disqualifier ma petite entreprise.

La perspective est autre. Les deux sont donc complémentaires.

Reste aussi que les 2 ne courent pas dans la même catégorie : le mien est fondamentalement un ouvrage de vulgarisation ;

Au sein de la perspective adoptée, l’objectif de cet ouvrage de vulgarisation est triple :

-         présenter clairement les principaux événements, faits de divers ordres, grandes orientations et querelles théologiques, en simplifiant sans déformer, en racontant l’histoire des vaincus comme celle des vainqueurs, en rectifiant au passage, sans avoir l’air, nombre d’idées reçues et d’erreurs communes

 

-         rendre compte de toutes les facettes du christianisme qui est culte et culture, foi et civilisation et qui a été, des siècles durant, religion et politique. D’où une approche du christianisme comme fait de civilisation, allant de l’horrible à l’admirable, et en laissant d’ailleurs le lecteur faire ses jugements de valeur. Ce livre parle non seulement d’histoire de la religion, mais aussi d’histoire de la politique, d’histoire des arts, d’histoire des guerres et des paix, d’histoire des femmes, d’histoire de la colonisation, d’histoire de la modernité (et de la laïcité, naturellement),...

 

-         porter donc un regard d’historien, qui ne soit ni polémique ni apologétique. Pratiquer l’ « agnosticisme méthodologique ». Dans l’exercice de son métier, l’historien n’a pas à se demander si le christianisme est « vrai » ou « faux », de la même façon qu’un médecin examinera les organes d’un accidenté de la route sans se demander s’il s’agit de l’auteur de l’accident ou de la victime d’un chauffard.

Alors, je vous assure, avoir de tels objectifs donne pas mal de sueurs froides. Vous travaillez tard le soir. Vous avez écrit le nombre de pages que vous vous étiez fixé, et (en plus) vous êtes content du résultat!

Et patatras, la nuit les faits que vous n’avez pas sélectionnés, les personnages que vous avez décidé de ne pas mettre vous tirent les oreilles et vous gratouillent les pieds. Alors vous les rajoutez.

Mais du coup, alors que vous aviez passé la journée précédente à réduire votre propos de 20000 à 5000 signes (encore un peu au dessus de la prévision !), au lieu d’avancer et de commencer un nouveau chapitre, vous vous retrouvez avec 8000 signes, le double de ce que vous accorde votre plan ! Il va encore vous falloir travailler pour réduire. Et, au total, nous n’aurez encore pas attaquer le fameux chapitre suivant…

C’est frustrant, mais c’est le passage au réel des merveilleuses idées qui vous trottent dans la tête. Et pour vous donner une petite idée de ce que cela donne, une fois réalisé, je vous livre le début de l’ouvrage (exprès, il ne comporte pas de « vie de Jésus », le problème : Jésus de la foi et Jésus de l’histoire est un autre livre).

Chapitre 1

L’émergence du christianisme

Chrétiens avant d’être citoyens.

  Dans l’Empire romain, où le sacrifice aux divinités protectrices constitue un acte de loyauté politique, des individus bizarres refusent de participer à ce culte. Ils se rendent ainsi coupables d’un crime de lèse majesté et attirent la colère de la foule quand épidémies, mauvaises récoltes et défaites militaires apparaissent la conséquence de leur conduite « impie ». Lorsque le magistrat les interroge, ils affirment s’appeler « chrétiens » et annoncer un « évangile ». Ce terme est familier du monde gréco-romain. Lors de l’accession au trône d’un empereur on proclame son évangile, c'est-à-dire « la bonne nouvelle » qu’il va amener prospérité, paix et justice. Mais ces chrétiens prétendent qu’il n’existe qu’un seul « évangile » incarné par l’enseignement, la mort et la résurrection d’un certain Jésus qu’ils qualifient de Christ. Par extension, ils désignent aussi par ce terme des récits de sa vie destinés à susciter la foi dans ce Christ et le Dieu qu’il révèlerait.

  Le terme de Christ correspond, en grec, à l’hébreu Messie et signifie «envoyé de Dieu ». Les juifs, qui forment des communautés dynamiques en divers endroits de l’Empire, attendent la venue d’un Messie. Les chrétiens affirment qu’il est déjà venu, puisqu’il s’agit de Jésus, et pensent qu’il va bientôt revenir. En soi, cela ne dérange pas l’ordre impérial ouvert à la multiplicité des cultes et les chrétiens, de leur côté, se déclarent soumis aux autorités. Mais ils désobéissent en refusant d’adorer toute autre divinité que leur Christ et son Dieu. Cela met ceux qui sont baptisés à l’écart d’une part de la vie publique : certains métiers ou manières de vivre sont liées aux cultes traditionnels et à la divination. Ceux qui n’ont pas différé leur baptême sont chrétiens avant d’être citoyens. Ils font donc preuve de « haine du genre humain » (Tacite) et forment une « secte » dangereuse qui adore un criminel condamné par le magistrat au supplice infâmant de la croix. Pourtant l’Empire, accommodant, ferme souvent les yeux. En cas de crise, il doit néanmoins sévir.

  Longtemps tolérance et répression alternent ou coexistent suivant les lieux. Commencées à Rome sous Néron en 64 (l’apôtre Pierre en est une des victimes), les persécutions tendent à se généraliser au milieu du III° siècle, à cause du nombre grandissant de chrétiens. On délivre alors un certificat (libellus) à ceux qui participent aux cérémonies sacrificielles. Cela permet d’arrêter facilement les contrevenants. Ils sont emprisonnés, torturés, mis à mort par milliers. En fait, tous les chrétiens ne résistent pas jusqu’au martyre. Certains, les sacrificati, obéissent à l’ordre impérial ou transigent et font brûler quelques grains d’encens devant une divinité (les thurificati). D’autres réussissent à acheter un certificat de complaisance (les libellatici). Ceux qui n’ont pas cédé les considèrent comme des lapsi (ceux qui sont tombés) et se disputent pour savoir si l’on doit ou non réintégrer les repentis.

La suite dans votre grande surface !

Est paru en même temps, une Petite histoire du bouddhisme (Librio) par un immense savant, Jean-Noël Robert, qui a vraiment joué le jeu de la vulgarisation.

Avec la Petite histoire du judaïsme de J.-C. Attias et E. Benbassa et la Petite histoire de l’islam de M. A. Amir-Moezzi et P. Lory (livres Librio dont j’ai déjà parlé), vous n’avez plus aucune excuse d’être ignorants en histoire des religions.



[1] Je crois vous en avoir déjà parlé, mais vous y aurez encore droit.

[2] Dois-je rompre ce mauvais humour en indiquant que les seules personnes qui étaient totalement indifférentes à Carla-Nicolas étaient les femmes musulmanes que j’ai interviewées.

[3] Je suis preneur, bien sûr, de démentis cinglants ! Les 2 ouvrages de synthèse qui me semblent le plus se rapprocher de « ma » perspective sont 2 histoires du catholicisme (ce qui fait qu’ils ne peuvent explorer les rapports différents à la modernité des différentes confessions chrétiennes) F. Cluzel, l’Eglise catholique des origines à nos jours (Privat, 2005) et surtout J.-P. Moisset, Histoire du catholicisme (Flammarion 2006).

02/02/2008

UNE LAÏCITE MEDIATISEE. MONOD, VERDIN, GUAINO, FOUREST,...

C’est le moment de dresser un petit bilan de cette seconde quinzaine de janvier où la laïcité s’est, de nouveau, retrouvée sous les projecteurs médiatiques. Cela ne lui était pas arrivée depuis 2005 et le centenaire de la loi de séparation (eh oui, cette fois, cela démarre sérieux. Vous n’aurez droit à un zeste de Carla qu’à la fin !).

Et encore, en 2005, faute d’un événement (un grand discours de Chirac ou Villepin, des propositions neuves du PS, une cérémonie d’ampleur nationale,….), des médias n’avaient parfois fait que le minimum syndical.

La laïcité avait été, ensuite, particulièrement absente lors de la campagne pour la présidence de la République. On pouvait penser que les débats avant et autour de la loi de 2004 sur les signes zostensibles avaient créé l’overdose.

 

Eh bien nous avons eu droit à ‘Laïcité II, le Retour’ comme dirait Rambo. Mais ce qui est significatif, c’est que ce retour de flamme ne s’est pas passé après le discours du Latran, le 20 décembre. Pour ma part je n’ai eu aucun coup de téléphone de journaliste français ou étranger, alors que j’en reçois périodiquement, dés que cela bouge en matière de laïcité.

Là, silence radio. Les articles de la presse ont été courts, quand ils ont été critiques ; plus longs, ils se montraient plutôt élogieux (ce fut une tendance minoritaire, mais qui a existé).

Les médias se sont déchaînés après le discours de Riyad. Là cela a été l’explosion. Les coups de fils et mels n’arrêtaient plus, et il était impossible de répondre à toute la demande. Même en se disant : « Bon, c’est temporaire. Cela vaut le coup de prendre du retard dans son travail normal et d’y consacrer du temps. C’est en effet l’occasion d’expliquer, de vulgariser certaines choses. »

Bref il s’est produit l’effet boule de neige : un média commence et tous les autres suivent, renchérissent. J’ai vaguement le souvenir d’un certain Panurge et de ses moutons….

C’est donc après Riyad que le discours du Latran a fait événement. Que les médias en ont véritablement parlé, ou parlé de façon plus critique. Comme si le fait de démolir un discours, prononcé dans le pays musulman par excellence, et abordant l’islam, constituait le sésame permettant aussi de critiquer un discours prononcé auparavant à Rome, et concernant catholicisme.

Cherchez l’erreur !

Or à lire finement les propos tenus, si on excepte le début du discours de Riyad, qui est de la même veine que celui du Latran, le reste est moins mauvais.

Je ne vais pas faire une longue exégèse. Mais globalement j’indiquerai ceci : le discours du Latran est uniquement positif à l’égard du christianisme en général et du catholicisme en particulier. Cela, même quand il s’agit de la société de chrétienté, de l’union étroite du religieux et du politique, etc. Silence complet est fait sur ce qu’a donné l’Etat chrétien et le cléricalisme.

Du coup, il n’est pas étonnant que quand la laïcité est abordée, Sarkozy ne puisse pas en parler de façon positive. On ne peut absolument pas comprendre, à l’entendre, pourquoi il a été nécessaire de construire la laïcité, et de réduire le pouvoir politique et social de l’Eglise catholique. Cela apparaît comme une cruauté gratuite, alors que ce fut nécessaire pour établir la liberté de conscience.

Amnésie significative en ce temps où on nous bassine du « devoir de mémoire » !

Du coup aussi, il n’est pas étonnant que le Président en appelle à « l’avènement d’une laïcité positive », comme si, jusqu’à présent, la laïcité était négative, était la négation du passé chrétien-catholique de la France, alors qu’églises et cathédrales sont entretenues sur fond public (pour ne prendre qu’un exemple).

 

Le discours de Riyad comporte, de façon explicite ou plus implicite, des propos critiques. Bien sûr ils sont exprimés en langage très diplomatique. Mais faut pas rêver et, pour Latran, personne ne demandait à Sarkozy d’attaquer bille en tête chrétienté ou cléricalisme. Simplement de la jouer un peu plus dialectique

Les critiques, à Riyad, sont donc exprimées par de fines nuances et loin de moi l’idée que c’est pour cette raison que les journalistes ne les ont pas remarquées ! Vous avez déjà vu un journaliste chaussé de gros sabots. Moi, jamais, main sur le cœur !

 

 

Voici quelques exemples que les Saoudiens, qui savent décrypter, ont du recevoir 5 sur 5 : Sarkozy donne une liste de personnes à respecter dans leur « convictions ». Il aurait pu commencer par les musulmans ou les chrétiens. Non il commence par les juifs. C’est naturellement fait exprès et c’est un message. Il inclus dans la liste « athées, francs-maçons, rationalistes ». Autre message.

Il rappelle à ce pays qui se veut comme l’équivalent d’une grande mosquée que « toute civilisation est le produit d’un métissage ». Il ose dire aussi que les changements effectués en Arabie Saoudite ne s’effectuent que « lentement ».

Certes, tout cela est enrobé de compliments. Mais comme c’est la loi du genre, les critiques, même très feutrées ont plus de signification que les compliments convenus et prévisibles.

Dans mon article dans les Inrockuptibles, j’ai noté les discours. Latran a eu droit a un 3/20, Riyad à un 5/20. C’est presque le double. Et comme je suis l’Objectivité Même !

Que Sarkozy ait exprimé des convictions qui sont les siennes (et en même temps tenté de reconquérir un électorat conservateur, un peu dérouté), me parait plausible. Cet homme, au mode de vie « matérialiste » est fasciné par la virtuosité religieuse.

Rappelez-vous, l’erreur de com’ commise entre son élection et sa prise de fonction. Il avait fait annoncer qu’il se retirerait quelques jours pour méditer sur sa future tâche, dans un monastère. Je crois qu’il en avait vraiment l’intention. Et son ami Bolloré lui ayant offert d’aller méditer sur son yacht de milliardaire, il n’a pas pu résister (1)![1]

Accordons lui donc le crédit d’une certaine sincérité. Alors, le meilleur commentaire sur ses discours a été publié par Le Monde (et, un autre jour, le plus mauvais, nous allons en reparler). Le meilleur : c’est une tribune de Jean-Claude Monod (29 janvier 2008). Il a imaginé que les Français élisent président un athée convaincu et que celui-ci imite la pratique inaugurée par Sarkozy : donner es fonction son opinion personnelle.

Cela donnerait ceci (pure traduction en langue athée des propos sarkosyiens) : « Dieu n’est rien d’autre qu’une illusion sous laquelle l’homme s’humilie » ; « la République a besoin d’athées militants qui ne se laissent pas duper par des espérances illusoires et travaillent à l’amélioration réelle, ici-bas, des conditions d’existence » ; la République a besoin d’une « morale débarrassée des fausses transcendances et résolument humaine », la « vocation de prêtre, qui consacre sa vie à un être fantomatique, est de moindre valeur que la vocation d’instituteur. » Etc.

Les croyants seraient alors très choqués. Ils crieraient à l’athéisme d’Etat. Il est même probable que vous auriez des manifestations dans les rues des grandes villes. Bref, la paix civile se trouverait menacée. Eh bien, là ce n’est pas mieux.

Voilà ma réponse à celles et ceux qui se sont étonnés d’une « prise de position tranchée » (mel d’un ami)

« C’est votre dernier mot » me dit Foucault (pas l’auteur des Mots et des choses, le vrai !)

« Oui, Jean-Pierre ».

Je pense, en effet, l’argument imparable. C’est la meilleure réponse à faire à tous ceux qui disent qu’il est vieux jeu, « archaïque », de refuser au président le droit d’exposer ces convictions. C’est l’argument choc que j’ai entendu dans la bouche de Philippe Verdin, jeune dominicain, très télégénique dans son aube blanche (2).

J’ai fait sa connaissance lors d’un débat sur LCI et nous nous sommes retrouvé dans un autre débat sur France-culture. Je vous avais promis quelques confidences, en voici une : j’ai retiré une curieuse impression de ces 2 rencontres et des discussions off que nous avons pu avoir (en sachant qu’il s’agit forcément d’une connaissance superficielle).

Philippe Verdin me semble juxtaposer une culture savante de la pensée de la chrétienté latine, telle qu’elle s’est développée des Pères de l’Eglise (au IIe-IIIe siècle) à la scolastique moyenâgeuse (et Dieu sait si cette pensée est riche philosophiquement et théologiquement ; on pourrait y consacrer plusieurs vies) et un parler jeune, branché et relâché, qui « fait » moderne.

Autrement dit : très cultivé quant à une certaine tradition classique ; et déculturé quant à l’actuel. Le jugement est sans doute en grande partie tronqué car Verdin est certainement plus informé sur la culture moderne qu’il ne le laisse paraître.

Mais je me demande s’il a culturellement vraiment intégré les apports critiques de la modernité. Et j’en doute un peu. Son univers me semble beaucoup plus être Thomas d’Aquin que les « maîtres du soupçon ». Et c’est intéressant de constater, qu’en plus, il maîtrise parfaitement le « parler jeune ».

Vous l’avez compris, c’est moins Verdin comme individu que comme type d’une nouvelle génération de clercs cathos intellectuels qui m’intéresse. On est aux antipodes de la génération un peu tourmentée qui a donné le Concile de Vatican II ; les Congar, Chenu, de Lubac,… si ces noms vous disent quelque chose.

Verdin semble très à l’aise dans sa peau, alliant humour, expressions et attitudes d’aujourd’hui et schèmes de pensée très classique. Est-ce le profil de la nouvelle génération d’intellectuels cathos ?

Guaino, c’est autre chose et les jugements de mes amis (en général de gôche) après l’avoir entendu à l’émission Ce soir ou jamais de FR3 étaient contrastés. Certains ont trouvé qu’il enfilait des banalités avec une parfaite assurance. D’autres ont été impressionnés.

Moi, ce qui m’a frappé, c’est sa prétention à pouvoir parler de tout : économie, Europe, laïcité, Afrique, etc.

Et du coup, j’ai moi-même un jugement très ambivalent. D’un côté, Guaino me bluffe un peu par le fait qu’il arrive à faire cela sans être d’origine grande bourgeoise. Ce sont en général ce dernier type de personnes, énarques de surcroît, qui estiment tout savoir sur tout et sont habitués à ce que personne ne mette en cause leur légitimité omniencyclopédique.

Quant on est, comme Guaino, d’origine très modeste, c’est absolument galère. Non seulement personne ne vous fait de cadeau, au contraire ; mais vous-même vous devez débarrasser votre propre tête de l’intériorisation (beaucoup plus forte qu’on ne le croit) de ce schème de pensée (implicite mais très présent socialement) que le savoir légitime est avant tout réservé à une certaine couche sociale dont vous n’êtes pas de naissance.

D’un autre côté, savoir qu’on ne sait pas est pour moi très fondamental. Et j’ai vraiment un gros doute sur sa capacité à maîtriser autant de domaines différents ; d’avoir une véritable compétence et pas seulement des opinions.

En tout cas, il s’est bien planté dans certains passages de son discours de Dakar, ceux où il essentialise un « homme africain ». L’alter mondialiste qui était à côté de moi sur le plateau lui a dit des choses fort justes. Au début du moins. Et puis, elle a complètement décrédibilisé son discours. Un autre professeur africain, présent sur le plateau, avait un point de vue moins complètement négatif sur le discours. Au lieu d’argumenter, elle s’est énervée et lui a lancé : « Mais enfin, il (= Guaino) te paye ou quoi ? »

Grave ! Terrible même cette incapacité à accepter que l’autre ne soit pas du même avis que vous, sans qu’il soit un traître ou un vendu. Elle m’a fait froid dans le dos. Je me suis dis : une telle personne au pouvoir, c’est, une nouvelle fois l’émancipation qui conduit à l’emprisonnement des opposants, à la dictature du bien. Brrrrr….

J’ai indiqué que le Monde avait publié non seulement le meilleur commentaire, mais aussi le plus mauvais texte. Hélas, c’est celui de Caroline Fourest (1er février). J’écris hélas, car je n’ai rien contre elle, je crois qu’elle pourrait être intelligente et donc depuis longtemps j’espère lire quelque chose d’elle qui puisse me faire dire : « enfin »... Et, à chaque fois, c’est la big déception.

Ce n’est pas un désaccord de contenu qui me chagrine. Il y a des laïques très républicains pour qui j’ai une très grande estime : ils pensent de manière divergente de moi, mais incontestablement, ils pensent. C’est un plaisir renouvelé de lire Catherine Kintzler ou d’écouter, à Montréal - Ottawa, Danielle Letocha.

A chaque fois d’abord, je prends le risque d’être convaincu (frisson intellectuel délicieux garanti !). Ensuite, je dois travailler pour comprendre à partir d’où je ne suis pas d’accord et pourquoi. J’apprends donc des choses. Bref c’est très enrichissant intellectuellement.

 

 

Mais là, sous le titre « une laïcité de chanoine » l’article est une attaque en règle contre le fait que musulmans et protestants évangéliques puissent, peut-être, avec Sarkozy et Alliot-Marie, disposer facilement de lieux de cultes. D’après elle, ils en auraient déjà bien assez, alors que de réels problèmes existent, pointés par la Commission Machelon (3).

Elle croit donner quelques chiffres, mais c'est très sommaire et si on compare avec le travaille effectué par la Commission (dont elle ne tient aucun compte) cela ne tient vraiment pas la route.

Donc il existe un véritable problème de "liberté de culte" que la République doit "garantir" (article I de la loi de 1905), alors que, je l’ai rappelé, beaucoup d’argent public, est consacré à l’entretien des églises catholiques, de certains temples des Eglises protestantes historiques et d’une partie des synagogues.

Sans être partisan d’un financement public des lieux de culte, force est de constater cette disparité, et l’aspect scandaleux des décisions de tribunaux administratifs (à partir d’une plainte du MNR, mouvement de Bruno Mégret) contre les baux emphytéotiques consentis par des mairies pour céder à un prix symbolique des terrains en vue de construire des mosquées, alors que l’Eglise catholique a largement bénéficié de tels baux depuis 1905 (notamment sous le Front populaire !) pour construire de nouvelles églises.

Et puis Caroline Fourest croit avoir tout dit, tout démontré quand elle a utilisé l’expression « laïcité à l’anglo-saxonne ». Autrefois les staliniens parlaient de « science bourgeoise »…

Conclusion de Caroline Fourest : « il ne faut pas assouplir l’esprit de 1905, il faut le durcir. » Pourquoi : A cause de la « remontée des intégrismes ». C’est toujours pareil la dénonciation, sans analyse, des « intégrismes » est son sempiternel fond de commerce.

Aucune réflexion jamais sur ce qu’est la laïcité, invoquée de façon purement incantatoire. Aucune piste pour une solution (autre que la répression). Il est clair qu’avec une telle absence de pensée, « les intégrismes » ont de beaux jours devant eux. Mais c’est logique car si les intégrismes, et la peur qu’ils inspirent, diminuaient, le fond de commerce de Mme Fourest serait lui-même en danger, sa raison d’être médiatique disparaitrait.

Encore une fois, je crois cette femme virtuellement intelligente. Mais concrétiser cette intelligence supposerait pour elle de ne plus se situer uniquement dans la dénonciation. Cela supposerait d’analyser et de « comprendre » (au sens de Max Weber). Et là, manifestement elle a un énorme blocage. Une part d’elle ne le veut pas. Je ne sais pourquoi, et je ne vais pas faire de la psychanalyse de Monoprix ( 4). Je constate, seulement. Et j’en suis attristé.

Comme il faut positiver, cela me donne envie d’écrire une Note sur : « Comment lutter efficacement contre l’intégrisme par la laïcité ». Ce sera bientôt sur vos écrans (d’ordinateur).

Aller, il ne faut pas terminer sur quelque chose d’un peu tristounet. Vous savez que Nicolas chute dans les sondages. Mais le blog, lui, qui avait également un peu chuté (pour cause de non médiatisation de la laïcité ? Je ne sais) à la fin de 2007, passant à 5063 consultations en novembre et 4512 en décembre (avec les « Fêtes »), a retrouvé des couleurs et il a obtenu 4,9 milliards, non 6218 consultations pour janvier, franchissant donc de nouveau le cap des 6000.

Nicolas chute, le blog de Jean progresse. Et Carla qui n’aime pas les loosers ! Mais je lui ai répondu sèchement que je n’étais pas libre….

Et d’ailleurs comme Sarko est malin, il l’a épousé juste au moment où tombaient sur les téléscripteurs les chiffres de la remontée du Blog

Bonne semaine.



[1]Une journaliste m’a dit : « C’est Cécilia qui l’a obligé à changer d’avis ». C’est ça : cherchez la femme !

[2] Co-auteur du discours du Latran avec Emmanuelle Mignon. Ceci dit, comme ses prédécesseurs Sarko change ses discours à sa convenance. Verdin m’en a donné quelques exemples, mais je ne parlerai qu’en présence de mon avocate.

[3]  La Commission Machelon : même en désaccord avec ses conclusions, délégitimer par la seule idéologie son travail qui a été sérieux, c’est du pur obscurantisme

[4]  Magasin qui vend des choses fort utiles au demeurant. Non, ils ne me payent pas pour écrire cela !

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