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24/01/2006

La douceur totalitaire I

 

A vos magnetoscopes:

MARDI 31 JANVIER sur France 3 à 24H 45 (soit 0h45 du mercredi matin):

La Case de l'Oncle Tom: Sacrée laïcité

(un reportage passionnant sur la laïcité au quotidien dans la ville de Rennes)

 

UNE EXCLUSIVITE MONDIALE, INTERPLANETAIRE ET INTEMPORELLE

LA FRANCE DE 2006 VUE PAR UNE HISTORIENNE DE 2106

                           LA DOUCEUR TOTALITAIRE

                                                                           PREFACE

Tout le monde a entendu parlé du projet SARKF (Science-Avenir-République-Kolossale-Finesse) impulsé par le grand ministère de la Recherche et de la Technologie créé au cours de l’année 2006, suite à des manifestations de chercheurs. On sait que son but consistait, grâce aux belles découvertes du professeur Francis Blanche, à envoyer dans le futur, en 2106 exactement, une équipe de scientifiques volontaires pour découvrir l’avenir républicain, et ainsi aider la science à mieux le préparer. Cela nécessitait des calculs tout en 'finesse' pour assurer le retour des tempornautes (= explorateurs du temps), bénéficiant d’un financement 'kolossal' pour pouvoir être réalisé.

Hélas, comme chacun sait, bien que les crédits affectés à la recherche pour la période 2006-2086 aient été tous attribués à ce projet, nous étions financièrement très loin du compte. Ayant été choisi parmi les volontaires, au motif que je raconterai dans mon Blog ce que j’aurais découvert, je me désespérais devant un ordinateur-page blanche quand le ministre de l’intérieur (dont j’ai oublié le nom tant il est habituellement médiatiquement discret) reprit le projet à son compte. Il remplaça dans le sigle « République » par « racaille ». Il s’agissait en effet, pour lui, de faire franchir un pas décisif à la mixité sociale en faisant participer, à côté des élites scientifiques, des jeunes des banlieues particulièrement dynamiques.

Tout le monde ou presque applaudit. Même la Ligue des Droits de l’Homme Futur n’y voyait rien à redire. Mais l’ex directeur du programme,  un certain Monsieur Gauchet provoqua le désenchantement du monde entier en révélant que seul le billet aller était prévu pour les moins de 25 ans. Le brillant philosophe Alain Finkstallone eut beau expliquer que cela était une idée géniale qui favoriserait l’ascension sociale : si on donnait un billet complet à ces jeunes, déclarait-il, jamais ils ne se bougeraient pour s’élever dans notre magnifique société égalitaire. Le vulgaire ne compris pas cette pensée subtile et comme le vulgaire est nombreux et qu’il vote,  le dit ministre apparu (pour la première fois) à la télévision et annonça, avec son sourire charmeur, qu’estimant avoir donné assez de gages à la droite,  il remplaçait « racaille » par « ripoux » pour séduire aussi sa gauche. Le matin, en se rasant, expliqua-t-il, il rêvait d’être élu avec un score meilleur que l’actuel président (qui avait obtenu, rappelons le, 80% des voix en 2002). Il ajouta que la « finesse » étant sa qualité principale après la modestie, ce terme  allait sans dire et devait être remplacé dans le titre du projet par « organisation ». Nous eûmes ainsi le programme Science-Avenir-Ripoux-Kolossale-Organisation. « Enfin, voila un programme qui me plait » conclut, tout sourire, le ministre.

C’est ainsi que se réalisa le programme S.A.R.K.O. et que nous partîment scruter le temps. Là j’ai une bonne et une mauvaise  nouvelle pour mes amis Blogeurs et mes amies Blogeuses. Aller, je commence par la mauvaise. Figurez-vous qu’il n’est possible à aucun des tempornautes de vous faire part de la vie en 2106. On nous a obligé à avaler, juste avant notre retour, une puce électronico-amnésique qui fait que notre directrice  (Jeanne Moreau) a résumé le sentiment général en déclarant lors de notre retour : « J’ai la mémoire qui flanche ; j’me souviens plus très bien ». Cependant grâce à des soins intensifs, et en mettant en commun les quelques souvenirs flous qui affleurent, nous pouvons dire que des événements extrêmement importants semblent s’être produits en un siècle. Le plus considérable d’entre eux est sans conteste la réunification de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes et de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales en une Ecole Sociale et Pratique des Hautes Etudes Scientifiques (ESPHES), ce sigle simplificateur ayant été trouvé au bout de seulement dix années de travail acharné.

Mais il semble que quelques autres changements d’importance nettement moindre se soient également produits, comme la disparition de la France en tant qu’Etat et son intégration comme « province »  (certains l'appellaient : "La belle province 2" ou "le nouveaux Quebec", peut-être à cause de tendances séparatistes)d’une Union européenne allant jusqu’en Biélorussie, Ukraine et Turquie. Par ailleurs, la délégation s’est trouvée quelque peu décalée. Politiquement correcte, elle était blacks-blancs-beurs et paritaire femmes-hommes. Or elle a provoqué beaucoup d’étonnement : « vous en êtes restés au noir et blanc » nous a-t-on affirmé, « vous n’aviez donc pas encore inventé la télé couleur ? » Chacun de nos interlocuteurs était lui-même à la fois black blanc et beur, mais il apparaissait également jaune et vert. Ce dernier trait venait de l’apport de l’immigration martienne, importante dans les années 2070 et ayant d'abord posé quelques problèmes d’intégration aux Terriens de souche. Certains nostalgiques regrettaient encore  le temps où l'immigration était seulement terrienne et donc, disaient-ils, "ne posait vraiment aucun problème". "Les plombiers polonais, les Maghrébins, les Noirs n'ont jamais eu le moindre problème d'intégration m'a-t-on dit , c'est bien normal: ce sont des Terriens comme nous, ils nous ressemblent. Par contre les Martiens sont différents de nous, ils ont d'autres coutumes, leur religion est intergalaxique, ils sont spéciaux". Il me semble me rappeler avoir vu un film sur ce sujet intitulé : ‘Mars attaque vraiment’. Je suis également parfois traversé par d’autres souvenirs comme le fait que nous, tempornautes, n’apparaissions vraiment pas très malins avec notre parité hommes-femmes, dans un monde où six  à sept sexes différents co-existaient. Mais là, je me demande parfois si ce n’est pas mon hétérosexualité qui rêve…

Avant de passer à la bonne nouvelle, il faut que je n’oublie pas un menu incident. Le ministre de l’intérieur avait tenu à nous accompagner, pour « aller sur le terrain » précisait-il, et… nous l’avons ‘oublié’ quand nous sommes repartis. Le commandant de la fusée inter-temporelle, Monsieur Déclinologue expliqua qu’il n’avait pas voulu perturber la campagne électorale qu’avait entreprise le dit ministre. Mais certains le soupçonnèrent de dérive villepino-juppétiste, d’autant plus qu’il semble avoir fait cela avec "humour", mais sans "tendresse" excessive. D’autres le soupçonnèrent de travailler en fait pour un certain Laurent Plus-à-gauche-que-moi-tu-meurs. Ce dernier avait, en effet, aimablement proposé à la royale Ségolène d’être du voyage, lui assurant qu’il "garderait ses gosses pendant son absence". Au parti soc, en tout cas, certains en faisait tout un fromage[1]. Il y avait bien un certain François B. qui assurait en catimini à tous les journalistes qu'il rencontrait qu’il était le seul responsable de ce non-retour. Mais il voulait tellement toujours que l’on parle de lui comme le champion des opposants que personne n’y a véritablement prêté attention.

Et maintenant, pour finir cette préface, la bonne nouvelle : j’ai participé à la fin de la commémoration du bicentenaire de la séparation des Eglises et de l’Etat et, dans l’ivresse de la fête (car, cette fois, cela a été festif), j’ai réussi à subtiliser un manuscrit intitulé : « La douceur totalitaire », sous-titre « quand la France était un Etat-nation ; radiographie de la France au lendemain du centenaire de la loi de 1905 ». Son auteure ? Une historienne huitième titulaire de la chaire d’ « Histoire et sociologie de la laïcité », devenue une chaire de l’ESPHES. C’est un manuscrit inachevé, avec des parties rédigées et d’autres sous formes de notes. Les jugements portés sur notre merveilleuse République sont curieux, voire incompréhensibles (déjà le titre !). J’en avais d’ailleurs un peu discuté avec l’auteure que j’avais rencontrée quand nous étions tous deux à jeun, mais elle avait prétendu être retournée en 1906 avec, dans ses bagages, un ouvrage sur « la Belle  époque » écrit par un historien de 2006 ; ses interlocuteurs lui aurait témoigné d’une identique stupéfaction. Quoi qu’il en soit, je vous en livrerai un épisode chaque mois, en alternance avec les Notes habituelles[2]. Vous prendrez vos responsabilités en surfant sur le Blog à ce moment là. Internautes non avertis s’abstenir !

PS: Bon, on a bien le droit de diversifier un peu les genres littéraires...et il ne faut pas prendre cette préface pour autre chose qu'elle n'est: un moment un peu récréatif dans un Blog en général sérieux... et qui le redeviendra un peu plus dès la semaine prochaine. Que toutes/tous les internautes ne comprennent pas toutes les blagues contenues dans la dite "préface" est logique. Mais la plupart sont généralistes et compréhensible pour celles et ceux qui suivent un tant soit peu l'actualité, seulement quelques unes sont destinées plus spécialement à telle ou telle catégorie de Blogeurs/blogeuses (et différencié: acteur de cinéma, Francis Blanche s'écriait "quelle finesse, quelle Kolossale finesse" dans 'Babette s'en va en guere', réplique culte alors. Marcel Gauchet est, lui, l'auteur sérieux d'un ouvrage sur le 'désenchantement du monde'). Un Blog ne doit pas forcément obéir aux contraintes de la communication de masse. Sinon, quel est son intéret?

Quant au but de la préface, il consiste à précéder d'un peu d'humour quelque chose qui, sans cela, pourrait parâitre prétentieux: TENTER DE PARLER DE 2006 COMME ON EN PARLERA EN 2106. Fiction d'historien, mais manière de voir les problèmes actuels de façon décalée.



[1] De Hollande naturellement, vous l’aviez compris.

[2] Cf l’indication de ces Notes dans la Note qui suit celle-ci

Commentaires

Cher Monsieur Baubérot,

Merci pour votre blog, et pour vos efforts de simplification dans l’explication de vos travaux qui très souvent m’intéressent assez pour chercher à comprendre votre démarche.
Mais là, avec votre histoire de SARKF, de ESPHES, et de « terriens de souche », je dois vous avouer que « je n’ai pas tout compris ». A moins que je me sois fourvoyé dans une lecture « trop globale » - ou trop « idéaliste », puis-je vous demander d’être plus explicite, s’il vous plait ?


Cordialement,

Frigo de Fraizal,
Répétiteur bègue et rouquette-scientiste

Écrit par : Frigo de Fraizal | 24/01/2006

"Le souvenir, ce n'est qu'un regret apaisé."

Humoriste français [ Francis Blanche ]
Extraitdu recueil de poèmes Mon oursin et moi

Écrit par : Chaplin Brown | 24/01/2006

En l'absence de déconneur Lakanal Plus, le manuscrit "la douceur totalitaire" nous reste crypté et donc incompréhensible, même pour les frères Blogdanoff qui ont malencontreusement saisi dans leur nouvelle et célèbre émission scientifric "Blog X" qu'il s'agissait probablement de "la douleur totale sur la terre", peut être bien aussi des "douze beurs totalement égalitaires".
N'en déplaise en ce dixième anniversaire de feu le grand président "Mythe-érrant" qui repose à J'arnaque, il ne faut pas confondre l'idéologue français Cabanis et le canabis.
La question persiste : qu'est ce que tout cela veut dire ?

Écrit par : Lakanal Plus | 24/01/2006

Bonjour,
Je n'ai découvert votre blog que la semaine derniere et il m a fallu un peu de temps pour me mettre "à jour" enfin ceci fait je tenais à vous remercier pour votre travail d'une part et pour ce texte d'une finesse et d'un gout très "à mon gout" justement ;).
Merci pour tout encore une fois et en espérant que vous continuiez encore longtemps à nous entretenir de vos travaux.
Milamber, un blogueur attentif à son monde.

Écrit par : Milamber | 25/01/2006

Cher Monsieur,

Du peu que je viens de lire de vous et des émules de votre verve humoristo-non-ego-pragmatico-dydactique (je découvre votre blog), je trouve confirmation que le souffle de la vie est effectivement dans l'acceptation critique de la couennerie ambiante. Continuons à discuter aimablement avec les fâcheux ; ça aide à tenir et, mine de rien, ça fait avancer.

Le projet S.A.R.K.O. s'appuie, certes, sur la science du "bourrage", mais - ne l'oublions pas - "de moux", également. Et, de ce dernier, chacun de nous est responsable.

Pour ce qui est de la laïcité, je retiens le projet de société attaché à la loi de 1882. De fait, la République n'enseigne que pouïc à l'avorton citoyen (à part une vague morale judéo-chrétienne qui fait la part belle à la méfiance plus qu'au discernement). Pis, nos édiles nationales font démonstration à l'envi d'une remarquable crasse éthique et philosophique - notamment en s'enkystant dans les ors quand ils n'affichent que peu de succès de gestion et de fraîcheur dans leurs propositions. Mais bon, on fait avec ce qu'on a... et nous continuons à voter pour eux!

Remerciements pour la fraîche justesse de vos propos et cordiales salutations.

S. Lebail
*Vente et poésie*

Écrit par : Sébastien Lebail | 31/01/2006

Sous un pseudo différent, je m'étais risquée à envoyer un commentaire . Retournant à votre blog, je constate qu'il n'y figure pas. Questions:
S'agit-il d'un problème technique?
A-t-il été refusé?
Quels sont dans ce cas les critères d'acceptation et de refus dans un espace dont, somme toute,vous devez avoir la maîtrise ?
Bien certaine que vous attachez autant d'importance à la liberté d'expression qu'à la défense de la laicité, je vous remercie d'avance si vous voulez répondre. Cordialement. Clicillic.

Écrit par : clicillic | 01/02/2006

La raison de la disparition de mon commentaire serait-elle une erreur de ponctuation dans la rédaction de mon adresse électronique comme je viens d'en prendre conscience juste après avoir envoyé le précédent?

Écrit par : clicillic | 01/02/2006

Merci, cher Monsieur Baubérot, pour votre réponse. Quel bonheur pour nous internautes de tous acabits de pouvoir aiguiser notre cervelle au fil des exposés d'un universitaire qui éclaire toujours notre lanterne avec une telle verve jubilatoire, autant de respect, de malice,de franchise et si loin du "prêt à penser"ambiant. Vous faites honneur à l'esprit laîc. (A vous lire, je ne regrette pas d'avoir encadré une meute de louveteaux éclaireurs dans mon jeune temps!).
Vos interventions comme celle de Limours devant un public de lycéens me semblent fondamentales en ces temps troublés ... Nos instituteurs et professeurs de CEG des années 60 avaient si bien rempli leur mission que je suis attristée par toutes les dérives qui éclatent au grand jour dans un pays de droit . Il est donc nécessaire de revenir sans cesse sur les principes de tolérance , de liberté d'esprit , de droit à l'incroyance. je m'y emploie auprès des collégiens qui me sont confiés et vous me donnez des forces.Continuez votre blog, aussi longtemps que vous pourrez . La valeur formatrice de cette forme interactive est irremplaçable.

Écrit par : clicillic | 07/02/2006

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