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12/01/2008

ENCORE LA LAÏCITE, LA GAUCHE PITOYABLE FACE A LA CULTURE DU RESULTAT

D’abord, intense activité intellectuelle autour de la laïcité :

1) Pas moins de 3 livres passionnants viennent de paraître en ce début d’année 2008.

- La laïcité de Micheline Milot. A lire d’urgence par toutes les personnes qui croient encore que la laïcité est une exception française… et par toutes les autres aussi. Micheline Milot est une sociologue canadienne/québécoise. Depuis de nombreuses années elle travaille à la fois sur la laïcité en général et sur la laïcité dans son pays.

En 128 pages elle répond de façon claire, synthétique (mais comme peut seule le faire une grande spécialiste) à 25 questions qui touchent aussi bien à la manière dont la laïcité s’est construite dans l’histoire, aux différents types de laïcités, aux rapports entre laïcité et démocratie ou laïcité et religions (« un croyant peut-il être favorable à la laïcité ? », « l’expression publique de la laïcité menace-t-elle la religion ? »,…), etc

Je ne sais si on pourra facilement se procurer l’ouvrage en France. Je donne le site Web de l’éditeur : www.novalis.ca

- Pierre-Jean Luizard, Laïcités autoritaires en terre d’islam chez Fayard. En analysant l’histoire de différents pays qui ont connu de forts courants laïcisateurs : Algérie, Tunisie, Egypte, Irak, Iran, Syrie et Turquie (ce dernier étant le seul où la laïcité a été culturellement intégrée), Luizard pose une question clef : « la laïcité peut-elle être un vecteur de démocratisation dans les pays musulmans ? »

- Florence Rochefort (éd.) Le pouvoir du genre. Laïcités et religions 1905-2005, aux PUM (Presses Universitaires du Mirail). Comme son titre l’indique ce livre, issu d’un colloque tenu en 2005, explore de plusieurs manières, les rapports entre laïcités et religion d’une part, la construction sociale de la différence entre sexes de l’autre. On y trouvera, entre autre, des contributions passionnantes sur l’entrée des femmes en politique.

2)Ensuite, un numéro de Cosmopolitiques (n° 16) (www.cosmopolitiques.com) sur  « Une exception si française » avec 4 articles qui se complètent très très bien sur la laïcité : celui de Yan Moulier-Boutang : « Aux origines de l’exception française : la Contre-réforme et la minorité protestante » ; celui de Françoise Lorcerie, « La République aime l’école » (c’est une citation, bien sûr) ; celui de Isabelle Agier-Cabannes : « la laïcité, exception libérale dans le modèle français » (lumineuse démonstration juridique et philosophique que la laïcité française n’est nullement ce que les Rrrrrépublicains en disent) et le mien sur « la représentation de la laïcité comme exception française ». L’ensemble du numéro est à lire, mais j’ai particulièrement apprécié ceux de François Dubet (« le goût national de l’exception ») et de Nacira Guénif-Souliamas (« ‘Sans distinction d’origine, de race ou de religion’…Un certain goût de la distinction en régime d’exception »).

Ensuite, même si l’actualité nous entraîne, dans son flux perpétuel, à passer d’un sujet à l’autre, je continue (et termine) ma Note du 5 janvier sur la « culture du résultat ». Merci aux remarques critiques des internautes. Je répondrai à Wilfred que, chez Sarko, la culture du résultat peut être effectivement aussi ce qu'il dit (et dont il faudrait parler plus longuement: les gens ne sont pas des saints; on ne peut nier que certains glandouillent, ou font leur travail au minimum, dans le système actuel, comme je vais le montrer, il arrive qu'ils soient privilégiés)  mais que sa proposition d’évaluer ses ministres ne peut être balayée, comme l’a fait le PS, en affirmant simplement que c’est « pitoyable ».

Toutes celles, tous ceux, qui me font l’amitié de me lire savent

-         d’une part que je me situe à gauche,

-         d’autre part que tout suivisme à l’égard des partis en général, du PS en particulier m’est étranger.

 

Si j’approfondis un peu cette question de la « culture du résultat », c’est que je trouve… pitoyable la réponse du PS. C’est avec des réponses de ce genre que ce parti est actuellement en manque de crédibilité, ce qui doit inquiéter non seulement ses membres et ses sympathisants, mais toutes les personnes attachées au jeu démocratique.

Je voudrais, après avoir traité le 5 janvier de ce problème au niveau des principes, l’aborder sous l’angle de la pratique sociale. Cela à partir de ma triple expérience de prof, d’ex président d’un grand établissement et, surtout, d’ex conseiller d’une ministre.

Mais il est clair que je n’engage que moi.

1) L’évaluation (et donc soi disant la culture du résultat) existe déjà, bien sûr et c'est se masquer la face de croire que l'on peut se dispenser de s'interroger sur les résultats. Si vous avez des ponts qui ne s'effondrent pas, c'est notamment à cause de cela, quand même!

Mais l'évaluation est faite de façon particulièrement stupide et pernitieuse  dans l’éducation nationale pour les profs du primaire et du secondaire. En tant que prof du supérieur, j’ai eu beaucoup de doctorants qui étaient ou avaient été profs dans le secondaire.

Certains d’entre eux voulaient, au départ, rester des profs du secondaire. Ils estimaient avoir une « vocation » à s’adresser à des adolescents, à un âge capital pour la formation de leur personnalité.

Ils ont été rapidement écoeurés. Ils se donnaient entièrement à leur profession, complétaient leur enseignement en organisant sorties pédagogiques, la construction d’exposition avec leurs élèves, et d’autres activités. Ces derniers étaient passionnés. Cela marchait du tonnerre, leur chef d’établissement les félicitait… et quand il s’est agi des les noter, il leur a mis 15 ou 16/20, alors qu’un collègue qui faisait le strict minimum, ou même un peu moins, obtenait 20/20.

 

Et quand ces jeunes profs sont allés demander une explication, invariablement on leur a répondu que cela était normal et que, comme les copains, leur note augmenterait au fur et à mesure de leur ancienneté.

On sait aussi, que sont mis dans des collèges particulièrement difficiles de jeunes agrégés, que l’on a pas formé à faire face à ce genre de situation, parce qu’ils ont…moins de points (moins d’ancienneté, schématiquement) que des enseignants ayant plus d’expérience, de bouteille. Certains font face (et se retrouvent avec leur 15, 16), d’autres sont vite dégouttés, parce qu’on les a mis dans une situation impossible.

Une autre forme d’évaluation est l’inspection. J’ai recueilli moins de témoignages à ce sujet, mais quand même plusieurs m’ont indiqué que l’Inspection générale de philosophie est réputée pour son dogmatisme, crossant facilement ce qu’elle qualifie d’ « originalité » et les profs qui intégreraient trop, à son goût, les démarches des sciences humaines, évaluant les carrières au nom d'une orthodoxie souvent étouffante.

Je note d’ailleurs que les philosophes dit républicains nous bassinent depuis 20 ans de la phrase : « il faut un maître pour se passer de maître », citation de l’ancien inspecteur Mugluoni. Mais si ces philosophes en étaient arrivés à « se passer de maître », à réfléchir un tantinet par eux-mêmes, bêleraient-ils encore les formules du Maître ? la sélection par la pseudo évaluation actuelle ne favoriserait-elle pas les disciples conformistes, par rapport aux esprits libres, capables d’examen critique et de novation intellectuelle ?

2) Quand j’ai été président d’un grand établissement de l’enseignement supérieur, j’avais à noter le personnel administratif[1]. J’ai tenté de faire la part du feu entre mes convictions et les habitudes que je connaissais fort bien. Ainsi, j’ai mis 18/20 à une administrative nouvelle qui était sur compétente pour le poste qu’elle occupait, se montrait d’un dévouement exemplaire et ne comptait ni son énergie ni son temps. J’ai mis la même note à quelqu’un qui devait avoir 20 ans d’ancienneté, mais, un peu trop souvent…attendait que cela se passe.

Eh bien l’instance supérieure a rétrogradé la première note et a mis 16. Elle a augmenté la seconde note, en mettant 20 : Motif : on ne peut pas diminuer la note de quelqu’un qui a déjà 20 depuis plusieurs années !

Je croyais avoir fait un compromis qui permette que cela passe. Eh bien, même pas.

Les évaluations, cela existe donc déjà. Mais à la Courteline, pas à la culture du résultat.

Il y a là un système à changer profondément, pour qu’il soit moins injuste, qu’il ne décourage pas les personnes compétentes et qui en veulent. Pour moins produire de gâchis.

Pour que le message ne soit pas : fais en le moins possible, l’essentiel, dans la fonction publique, c’est de vieillir. Et ça, cela vient tout seul !

Certains me trouveront excessif. Mais ces pratiques me révoltent ; elles sont tout sauf de gauche. Et si l’action syndicale est, oh combien nécessaire, si je connais beaucoup de syndicalistes qui la mènent avec passion et intelligence, je regrette d’autant plus le silence radio sur cette question.

Et les personnalités de « gôche », ne pourraient-ils pas mettre ces problèmes sur la place publique au lieu de, tout le temps, avoir des propos convenus, totalement prévisibles. A tel point que souvent, ils pourraient faire du play-back ou se faire avantageusement remplacer par un perroquet.

Mais je dérape, j’insulte les perroquets maintenant !

Exemple sur un sujet différent, mais qui, lui aussi, concerne certaines habitudes. Et tant que j’y suis,… Une femme de ménage faisait les bureaux de 6 à 9. Elle travaillait 15 heures par semaine en étant payé à plein temps. La raison était double : des horaires très matinaux, l’impossibilité de faire le ménage quand les bureaux étaient occupés.

J’ai négocié avec elle et j’ai fait passer son service de 15 à 30 heures, soit de 6 heures à midi. J’ai estimé que des horaires matinaux justifiaient une réduction de son service à 30 heures, mais pas à 15. Et que, de 9 heures à midi, elle pouvait faire des photocopies ou des activités de cet ordre. 

Cela soulageait d’autres agents (certains profs, notamment, sont des spécialistes de demandes de photocopie que des agents, qui sont en train d’accomplir un autre travail, devraient tirer toutes affaires cessantes,). Cela aussi mettait fin à l'idée que certains avaient des "privilèges", ce qui ne favorise pas une bonne ambiance dans un service.

Protestation immédiate d’un syndicat (pas de tous). Je convoque une réunion entre ses représentants, la personne concernée et moi. Cette réunion débute de façon un peu agressive : les avantages acquis, le doublement insupportable des heures de travail et, en plus !, des tâches confiées qui ne correspond pas au cahier des charges d’une femme de ménage. J’ai tout faux !

Je réponds simplement qu’il faut entendre ce qu’a à dire la personne intéressée. Elle prend la parole et dis : « Depuis ce changement, je suis heureuse. Avant, je partais quand les autres arrivaient, je ne voyais personne, je restais seule chez moi à regarder la télé toute la journée. Maintenant, je parle avec des étudiants et des collègues, je déjeune avec des collègues à la cantine,… »

La réunion s’est arrêtée là.

 

Je pourrais donner d’autres exemples de ma pratique de président. Ainsi, on était normalement obligé, pour imprimer notre Annuaire, de passer par l’Imprimerie Nationale. Avec un appel d’offre, j’ai obtenu la même qualité, bien meilleur marché. Je ne respectais pas les règles… bureaucratiques. Mais là, les règles du marché permettaient de mieux utiliser l’argent public. Alors,…

 

3) Allez, je passe à ma troisième expérience, celle de conseiller de la ministre. J’étais chargé de la formation à la citoyenneté. Vaste programme que j’ai abordé avec beaucoup d’enthousiasme. La ministre avait plein d’idées fort passionnantes, et elle se montrait réceptive aux suggestions que je pouvais lui faire.

En gros, cela se passait ainsi : je lui rédigeais, à sa demande (à celle du dir’cab aussi) ou à mon initiative, une Note sur un sujet précis, une action à entreprendre, à réaliser. Si elle avait des remarques, on en discutait et je recommençais ma copie. Sinon, elle validait la Note de façon manuscrite. Et quand cela était fait, je devais travailler avec l’appui des services concernés de l’administration à la réalisation concrète du contenu de la Note.

Comme je l’ai dit, la ministre débordait d’idées et moi aussi.

Et, de plus, je trouvais un peu grisant d’avoir à faire un travail qui pouvait avoir un impact à l’échelle de la France, d’avoir à exercer une responsabilité auprès « des Français » qui, sous un président de droite, avaient élu une majorité de gauche (nous étions en 1997), donc opté pour le changement.

Au début, tout baignait dans l’huile. Mes interlocuteurs de l’administration m’apparaissaient des gens charmants, compétents, expérimentés, et j’était sur qu’on allait, ensemble, faire du bon travail, changer beaucoup de choses.

Dans ma naïveté profonde, je leur ai tenu, en substance, ce discours : Vous aviez à servir une majorité de droite, vous avez fait ce qu’on vous demandait de faire. Fort bien. Je vous en donne quitus. Maintenant, une autre majorité a été élue pour faire une autre politique, et donc je compte sur vous pour m’aider à réaliser le changement nécessaire, dans mon domaine de compétence.

Oui, naïveté profonde ! Je voudrais me garder de mettre tout le monde dans le même sac. Certains, certaines surtout, ont agi loyalement. Je leur en sais gré. Mais j’ai rapidement compris qu’avec mon petit discours j’étais totalement à côté de la plaque. Beaucoup de gens de l’administration se considèrent comme l’Etat incarné. Les ministres passent, eux restent. Ils assurent « la continuité de l’Etat », c'est-à-dire, en français courrant : l’immobilisme, la continuation routinière de l’existant, l’échec de tout changement, de toute réforme.

Pour eux, mettre un pied dans l’eau, quelle aventure !… On ne sait jamais ce qu’il peut y avoir sous 20 cm de flotte, c’est peut être dangereux !

Tout cela se passe dans le non-dit, naturellement. Il a fallu, une fois, en pousser un dans ses derniers retranchements, pour qu’il me dise explicitement qu’il n’allait pas obéir aux « lubies » de la ministre ! Il s’agissait d’un problème extrêmement sérieux, pourtant.

Le plus souvent, deux tactiques  sont utilisées :

. D’abord, la résistance passive, la pièce sois disant qui manque et empêcherait d’exécuter l’ordre reçu, les « on voudrait bien » mais il existe mille et une impossibilités techniques, les retards qui permettent de gagner du temps, et d’user celui du conseiller : après tout, il partira avant nous !

Bref, je suis vraiment injuste en parlant de « résistance passive », certains font preuve, au contraire, de beaucoup d’inventivité et d’énergie pour trouver des raisons qui retardent, qui rendent impossible, qui déforment l’application des ordres reçus, sans jamais s’y opposer explicitement, bien sûr.

. Ensuite, seconde tactique, la moulinette administrative qui a l’art de transformer de vrais changements en… rien du tout. Vous leur donnez une véritable bombe (c’est une image bien sûr !), et…, par des mains très expertes, cela devient un petit pétard inoffensif, quand il n’est pas complètement mouillé. Vraiment, certains s’avèrent de véritables virtuoses en la matière, des magiciens de l’escamotage.

Bref, j’ai du très vite, revoir mes ambitions à la baisse ; faire des compromis (du style des 2 Notes 18 dont il est questions plus haut !), me jurer à moi-même que, sur tel ou tel dossier, je passerai le temps qu’il faudrait, je mettrais toute l’énergie nécessaire, mais que, sur ces dossiers là,  « ils ne m’auraient pas ».

Et même les compromis, cela n’a pas été de la tarte de les obtenir ! Il m’est arrivé de piquer des colères homériques, moi pourtant si gentil, si doux, si délicieux, si agréable à vivre, et si modeste en plus !

Je me souviens d’une réunion où l’on me démontrait par a + b que chacune des actions que proposait ma Note (validée, comme il se doit, par la ministre), était merveilleuse, au plan de l’idée, mais… irréalisable pour les fameuses « raisons techniques ». Je tenais bon, et la séance n’en finissait pas.

A un moment, une interlocutrice me dit : « Monsieur, nous sommes le 13 juillet, il est plus de 20 heures, et j’ai des enfants qui m’attendent chez moi. » J’ai répliqué : « Madame, la réunion ne se terminera pas sans un compromis, je veux bien que tout ne soit pas réalisable, mais je refuse que rien ne le soit. Votre travail consiste à trouver comment réaliser les objectifs politiques du Cabinet.»

Ce soir là, j’ai effectivement obtenu mon compromis. Mais je vous assure, c’est usant, énervant. Et au bout du compte, le changement devient quand même rabougri.

Ceci écrit, j’ai aussi beaucoup circulé à travers la France et rencontré des chefs d’établissements et des enseignants faisant un travail admirable. Je garde de cela un très bon souvenir.

La ministre, elle, m’a toujours soutenu, y compris quand des personnes de l’administration venaient se plaindre de moi auprès d’elle. Mais un/une ministre n’est pas tout puissant, ne peut être partout et ne peut pas tout faire. Et tous les échos que j’ai eus m’ont convaincu que la situation était largement analogue ailleurs, dans les autres ministères.

J’aurais d’ailleurs d’autres anecdotes qui le montreraient, mais peu importe : l’essentiel est que je trouve tout à fait ahurissant que des leaders socialistes qui sont parfaitement au courant de ces problèmes, s’en tiennent à un pitoyable…« pitoyable ».

Si on fait la part de la déformation de présentation médiatique, et on sait très bien que les médias déforment la réalité pour la rendre piquante, on peut interpréter la demande faite aux ministres d’une « culture du résultat » comme étant, pour une part en tout cas, une aide apportée à ces ministres pour faire pression sur leur administration, afin qu’elle soit moins contreproductive.

On peut très bien ne pas être du tout  d’accord (c’est mon cas) avec beaucoup d’éléments du programme de Nicolas Sarkozy. Mais, il a été élu et on ne saurait lui reprocher de prendre des mesures pour réaliser son programme.

On ferait mieux de se demander si ces mesures ne peuvent pas favoriser des changements de mentalité qui aideront la gauche à réaliser un peu plus son propre programme le jour où elle reviendra « aux affaires ».

A moins de considérer un programme politique comme étant de la poudre aux yeux pour gogos, on ne peut pas ne pas se poser la question : comment obtenir des résultats, comment tenir le plus possible ce que l’on a promis ?

Alors, bien sûr, les critères d’évaluation doivent être soigneusement construits, examinés. « Faire du chiffre » ? C’est le gros risque. Il ne faut pas sacraliser les chiffres, car cela est réducteur et conduit souvent à truquer. Il ne faut pas les diaboliser non plus, et parfois les récuser conduit  à refuser d’affronter la réalité.

Donner un chiffre à atteindre pour les reconduites à la frontière, c’est horrible. On est là dans un domaine qui doit être très soigneusement du cas par cas, tenir compte de chaque situation. Un domaine où le qualitatif doit être préféré à tout quantitatif En revanche, connaître la fréquentation gratuite des musées, ce n’est pas idiot, s’il s’agit d’un critère parmi d’autres.

Pourquoi ? Parce que cela met à jour une réalité non médiatique, et que l’évaluation peut précisément servir à cela.

Quand je repense à l’action de « ma » ministre, cette action comportait un aspect médiatisé, un autre ( qui accaparait l’essentiel de son temps) qui échappait à toute médiatisation. Et j’étais parfois en décalage complet avec les gens avec qui je discutais. Ils ne connaissaient que les aspects médiatisés, et pour eux, en fait, sans qu’ils en aient forcément conscience, tout ce qui n’était pas médiatisé, n’existait pas.

Le pire c’est qu’ils lui reprochaient d’être trop médiatique, sans se rendre compte, ni vouloir admettre que :

      -     n’était médiatisée, dans son travail, que la face émergée de l’iceberg

-         la médiatisation est une contrainte de l’action des politiques

-         que cette contrainte, ils en sont eux-mêmes co-responsables en réduisant l’appréciation de son travail à la partie médiatisée.

Morale de l’histoire : je suis désolé mais, en lançant l’idée d’une « culture du résultat », Sarko a lancé un pavé dans la mare, dont il ne faut pas se gausser de manière paresseuse et idiote. J’y en a marre d’avoir la gauche « la plus bête du monde » !

Que, bien sûr, cela ne signifie pas du tout avaler tout cru ce que fait Sarko. Il faut proposer des choses intelligentes, justes (au double sens de justesse et de justice) quand à la méthode et aux critères.

Je rappellerai, quand même, que la candidate, Ségolène Royale, s’était, elle aussi, située dans une « culture du résultat », quand elle avait proposé des « jurys populaires ».

Peut-être que l’expression n’était pas des plus heureuses : no body is perfect. Mais il y avait derrière la belle idée de ne pas réduire l’exercice de la démocratie au rituel du vote. D’avoir à rendre compte, de ce que l’on fait. Et là aussi, créer des instances d’évaluation aurait pu contribuer à changer certaines mentalités. Au lieu de comprendre cela, les pseudos amis de la candidate, lui ont tiré une balle dans la jambe.

Maintenant, ils ont Sarko. Ils peuvent multiplier les critiques. Pour moi (inconsciemment peut-être) ils l’ont voulu, ils l’ont eu.

Nous aussi avec !

Alors maintenant, trions et au lieu d’être dans le réflexe pavlovien de distribuer des noms d’oiseau à chaque occasion, faisons preuve d’un peu de culture (c’est quand même héénorme que tous les énarques du PS ait mis plusieurs jours à apprendre que l’expression « politique de civilisation » venait d’Edgar Morin. Cela aurait été du BHL ou d’autre intello show-biz, ils l’auraient su tout de suite), d’un peu d’intelligence, d’un peu de créativité.

PS : Ce qui est terrible avec sarko, c’est que l’on a toujours un métro de retard : j’ai hésité à continuer ma Note sur « la culture du résultat » ou en faire une autre sur la suppression de la pub à la télé publique. J’en reparlerai peut-être un jour, notamment à partir de mon expérience d’ex-membre de la Commission sur la violence à la télévision. Elle m’a « édifié » !

En attendant, juste dire que j’ai trouvé…pitoyables les propos de Philippe Val sur France Inter (vendredi 11), comparant d’abord la pub à un petit îlot de résistance (implicitement : le village gaulois d’Asterix) contre les valeurs sociales dominantes (à ses yeux) de l’égalité homme-femme, et du non englobement de l’individu par son sexe. La pub, c’est plutôt les légions de césar qui envahissent tout, avec quelques îlots de résistance, Non ?

Ensuite, Val a fait sa chochotte, style la suppression de la pub, cela va être une aubaine pour TF1 et M6. Cette suppression, camarade val, c’est d’abord la condition nécessaire (pas suffisante bien sûr) pour une télé publique enfin un peu intelligente, et qui ne soit pas la sœur de la télé commerciale.

Télé élitiste ? J’assume puisque cet « élitisme » serait offert en permanence à tous, alors qu’actuellement l’élitisme existe et est… la chasse gardée les « élites ».

 

 



[1] Les enseignants du supérieur échappent à une évaluation (sauf passage de Maître de conf. A prof,  prime d’encadrement doctoral, programme de recherches,…). Il est très difficile (il faut être excellent + avoir de la chance) d’obtenir un poste. Mais une fois obtenu, après un an de stage (où, sauf exception, il faut tuer mère et mère, et encore sur le lieu de travail, pour que le stage ne soit pas validé), ils deviennent titulaires à vie.

Je considère depuis longtemps qu’il vaudrait mieux recruter plus et remettre en jeu les postes, par exemple tous les 10ans (puisque des recherches peuvent être de longue durée).

11:25 Publié dans ACTUALITE | Lien permanent | Commentaires (3)