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23/03/2007

CANADA ET FRANCE, multiculturalisme et laïcité

Cheres Amies et chers Amis,

C'est le sprint pour mon nouveau "Que sais-je?" (cf. la Note sur 7 mars dernier), mais je ne saurais vous abandonner et donc, comme les compromis font partie de la vie, je vous livre une Note,... sous forme de notes que j'aurais voulu retravailler avant d'en faire une Note du blog (vous suivez j'espère...). Donc, excusez la forme un peu relaché, moi qui d'habitude est un français aussi soutenu et académique que le défunt San Antonio.

Votre Jean Baubérot

PS: si j'ai écrit des bêtises, je compte sur les internautes canadiens (et autres) pour me l'écrire, gentiment bien sûr!

2ème PS: quand il y a du bleu, cela signifie que j'ai délibérément et honteusement piqué l'info à Wikipédia.

Canada et France semblent être 2 modèles opposés : le multiculturalisme d’un côté et la laïcité républicaine de l’autre(et vu du Canada, les Etats-Unis sont un pays démocratique libéral et non un pays multiculturel ; cf le débat entre Bissoondath et Gwyn d’un côté, Will Kymlicka de l’autre. Ce dernier écrit, qu’aux USA on « met l’accent exclusivement sur l’identité et les valeurs communes » et l’on « s’oppose à toute reconnaissance ou affirmation des différences culturelles », p. 37).

Pourtant Canada et France se sont unis pour être, à l’UNESCO, les co-parrains d’une Déclaration sur la diversité culturelle (contre les Etats-Unis et Israël). Ce qui n’empêche pas de parler de « modèles » différents. 

Par ailleurs, Canada et France étant 2 pays démocratiques, il existe en leur sein des débats internes ; mais le débat est tjrs plus ou moins préformaté.

Et, sauf méconnaissance de ma part, la comparaison est peu faite (ou alors elle se limite au Québec, et si le Québec est intéressant, c’est dans la mesure où il est Canadien et francophone, avec des relations compliquées à l’ensemble du Canada, et à la France aussi d’ailleurs)

 

Bref rappel historique sans aucune prétention sur le Canada :

On parle d’Irlandais venus entre le VIe et le Xe siècle, de Vikings au XIe, qui s seraient mêlés aux Iroquois. Plus systématique à partir du XVe siècle : Jean Cabot, vénitien au service du roi d’Angleterre arriva à une « terre neuve » (1497), où pèchent ensuite des Bretons (français),  anglais, espagnols, portugais, etc. Ephémère colonie portugaise au Cap Breton en 1520s. (cf le chauffeur de taxi !). Verrazano, florentin travaillant pour François Ier se rend compte que c’est ni l’Asie ni l’Afrique, il établit une carte où « Nova Gallia » (1529). Puis voyages de Jacques Cartier. Découvertes du Saint Laurent, rencontres avec des Indiens (Les Iroquois expliquent à Cartier comment se prémunir du scorbut, qui commençait à les décimer). Mais échec d’établir une colonie permanente (entreprise Roberval Cartier) ; guerres de religions détourne France du Canada.

1608 : Samuel de Champlain, géographe et explorateur fonde la (future) ville de Québec ; alliance avec les Hurons-Wendats et guerres contre les Iroquois.

1627, création de la Compagnie de la Nouvelle France par Richelieu.

Quand Champlain meurt en 1635 : 200 habitants sur le St Laurent qui en majorité s’intéressent à la traite des fourrures. Fondation cette année là du collège de Québec par les jésuites (en 1634 : Trois Rivières) ; 1645 : fondation de la Compagnie des habitants qui réunit dirigeants politiques et économiques.

En 1663 : 2500 habitants dont des communautés religieuses. Louis XIV (Colbert) organise le gouvernement de la colonie qui a une forte autonomie et une grande mobilité sociale dans un système seigneurial souple. Arrivée de « Filles du Roy », pour contribuer à peupler la colonie. Adoption en 1664 de la Coutume de Paris. Importance des communautés religieuses inspirés des idéaux réforme catholique qui contribuent à coloniser le St Laurent et évangélisent des Indiens, facteur de continuité quand la métropole délaisse la colonie. Nouvelle guerre contre les Iroquois en 1665.

 

En même temps : Français et Anglais s’installent tour à tour sur la façade maritime (Nouvelle Ecosse), finalement = Acadie (Arcadie= Pelloponnèse ?) La Nouvelle France voulu contrôler le commerce des fourrures  et pour cela s’étendre et confiner les Anglo-américains à la côte Atlantique : extension de la vallée du Saint Laurent jusqu’à la Nouvelle Orléans, et à l’Ouest aux Rocheuses et au Nord à la baie d’Hudson (aujourd’hui : Les Métis, descendants de paysans bretons et d’indiennes, sont venus avec leur curé qui croyait les conduire vers une terre d’abondance et se sont révoltés contre lui quand ils ont  vécus les difficultés climatiques).

Mais en 1700, colonie anglaise comptaient 275000 habitants et les Franco-canadiens étaient 15000.

En 1760 : 85000 (dont 76000 dans vallée St Laurent) et colonies anglo-américaines : plus d’1M1/2Non seulement les français émigrent peu mais vallée du St Laurent a rigueur climat, éloignement des grandes voies maritimes etc

Acadie = les Anglo-américains, après l’avoir +sieurs fois conquise et perdue, occupent définitivement l’Acadie en 1713 (Traité d’Utrecht). Ils demandent un serment d’allégeance et ne l’obtenant pas (divers offres), le gouverneur Moncton déporte  la majorité de ses habitants francophones en 1755 (« Grand Dérangement »),  bcp  périrent. Après Traité de Paris, ils peuvent alors s’installer en Louisiane (colonie française) et ensuite revenir en Nouvelle Ecosse, à condition de ne pas être trop nombreux dans le même endroit.

Guerre de Sept Ans (1756-1763)

Conquête anglaise en 1759 de la ville de Québec : Article 6, libre exercice de la religion jusqu’au traité définitif

1760 capitulation de Montréal = toute la Nouvelle France est aux mains des troupes anglo-canadiennes et l’acte de capitulation comporte 55 articles dont les articles 27 à 35 concernent les questions religieuses = liberté religieuse accordée, sous réserve du jugement du roi sur certaines questions. Proclamation Royale : la Nouvelle France devient « Province of Québec » où Colonie de Québec. (1760). C’est la 15ème colonie après les 13 originelles de l’Amérique anglaise et la Nouvelle Ecosse.

 

Perte pour la France de l’axe Chicago Détroit Montréal : les grands lacs et la vallée du Saint-Laurent : commencement de la fin de l’hégémonie française au profit du monde anglo-saxon (selon certains historiens).

Les élites partent (environ 2000 personnes) sachant que les postes importants seront occupés par des Britanniques et pour les hommes d’affaires qu’ils ne pourraient plus prospérer  sous le régime colonial anglais. Le peuplement anglais est lent (pour des raisons identiques à celles qui avaient limité le peuplement français). Donc les cadres de l’Eglise catholique constituent un interlocuteur, d’autant plus que clergé habitué au régalisme de la monarchie absolue française

L’Acte de Québec (1774) voté par le Parlement de Londres est muet sur l’établissement d’une religion, reconnaît la liberté de culte des catholiques abolit le serment du Test (avant  les futures Etats-Unis), pour permettre leur accès aux fonctions publiques. Alors que les lois britanniques interdisent toute hiérarchie catholique sur les terres de la Couronne, l’ancien évêque est reconnu « surintendant » de l’Eglise catholique ; cela lui permet d’exercer la plupart de ses fonctions. Par contre,  pas d’assemblée élective car la population anglo-catho aurait dominé l’assemblée. Donc sorte de répartition politico-religieuse avec relations de l’ordre de la transaction.  Gouverneur et Conseil. Au fur et à mesure de leur présence sur le territoire, d’autres groupes religieux se voient reconnaître la liberté de culte.

Du coup, lors de la guerre d’indépendance le clergé prend partie pour les Britanniques quand les Américains envahissent le Québec (1775-1776). La participation de la France à la guerre d’indépendance put soulever des espoirs d’un retour de celle-ci dans la vallée du St Laurent, mais les Français qui avaient conservé la Guadeloupe et les îles à sucre, et St Pierre et Miquelon pour pouvoir pécher, avaient renoncé au Canada, ces « arpents de glace » selon Voltaire.

 

Arrivée de réfugiés loyalistes au Sud du Québec va amener une population britannique dans cette région. À la fin de la révolution américaine, près de 50 000 loyalistes de l'Empire Uni immigrent au Québec, en Nouvelle Ecosse, à Terre Neuve. Comme ils ne sont guère les bienvenus en Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick se détache de cette colonie pour les accueillir.

L’Acte constitutionnel de 179 sépare le Québec en deux provinces, le Haut Canada, protestant et anglophone et le Bas Canada, catholique et francophone conserve la liberté de culte. Il y a « ni religion d’Etat, ni séparation » mais « le choix de la neutralité.»[1]

Une série d'accords mène ensuite à de longues périodes de paix entre le Canada et les États-Unis, n'étant interrompus que par de brefs raids opérés par des insurgés politiques. L'absence de pouvoirs réels du parlement du Bas Canada, les difficultés sociales et le sentiment de minorisation des francophones mènent à la révolte des patriotes. Sous la direction de Louis Joseph Papineau, ils déclarent l'indépendance de la république du Canada. Cette volonté d'autonomie est violemment réprimée par l'armée britannique. Plusieurs patriotes sont pendus, certains sont déportés en Australie, et d'autres doivent s'enfuir aux Etats-Unis 

1840 : Le Canada Uni fusionne les deux Canadas en une seule colonie quasi-fédérale,  abrogeant une partie des droits octroyés aux Canadiens français

Entente en 1846 pour retenir le 49e parallèle Nord comme frontière séparant les États-Unis de l'Ouest de l'Amérique du Nord britannique, le gouvernement de Grande-Bretagne crée  en 1858 la colonie de la Colombie-Britannique  (ruée vers l’or). Dès la fin des années 1850, les dirigeants canadiens entament une série d'explorations vers l'Ouest,  avec l'intention de prendre le contrôle de la Terre de Rupert ainsi que de la région Arctique. La population canadienne croît rapidement grâce à un taux de natalité élevé ; l'immigration massive de l'Europe vient contrer l'effet de l'émigration vers les États-Unis, particulièrement celle des Canadiens Français migrant en Nouvelle-Angleterre. En 1867 : Création de l’Etat canadien par l’union du Canada uni avec Nouvelle Ecosse et Nouveau –Brunswick : 4 provinces (par retour en 2 désormais Québec et Ontario). Naissance du Canada moderne comme dominion britannique. Rejoint l’Ontario et la Colombie britannique par extension vers l’Ouest, avec la révolte des Métis, dite Rébellion de la Rivière rouge. Manitoba entre (de force) dans le Canada en 1870. Etc. Il s’agit alors d’un Etat semi colonial aux frontières fluctuantes, détenant une juridiction interne mais n’ayant pas sa propre politique internationale et ne pouvant pas accorder la citoyenneté ni modifier sa constitution (qui est du ressort du Parlement britannique) La création de l’Etat canadien en 1867 l’a été à partir de la représentation ethnoculturelle comme fruit d’une négociation entre 2 peuples  canadien anglais [dominant] et canadien français [dominé], dispersé sur l’ensemble du territoire [pas complètement exact]. Les peuples autochtone en étaient alors exclus,

Processus d’indépendance à l’égard du Royaume Uni surtout de 1931 et 1946 (politique internationale) à 1982 ; Encore now le Canada est officiellement une monarchie constitutionnelle dont la souveraine est la Reine Elisabeth II,  représentée par un gouverneur (une femme haïtienne québécoise, qui a fait des déclarations affirmant que les Québécois ne se souciaient pas assez des autres Canadiens en septembre 2006, qui ont fait scandale au Québec)

Origine de la diversité « ethnoculturelle » du Canada, et du fait de l’importance de la représentation en terme « d’ethnicité » (contrairement à la France ; mais évolution de l’utilisation de ce terme : maintenant il fait place à la subjectivité : à chacun de dire à quelle ethnie il veut appartenir, mais on peut se demander si la représentation sociale fait bien place à cet aspect subjectif et personnel) : le fait que 2 catégories de population habitaient ce territoire avant la venue des Britanniques : les peuples autochtones et le Canadiens français, premiers colonisateurs. On été incorporés au Canada à la suite de la colonisation et (pour les second) de la Conquête britannique et sans leur consentement : ces groupes sont des « minorités nationales » qui se perçoivent eux mêmes comme des « nations » au sein du Canada, des peuples dont l’existence est antérieure à celle de l’Etat canadien lui-même.

 

Cependant ces 2 « nations » n’ont pas la même puissance, la même situation ni le même statut.

Les Canadiens francophones dont les Québécois forment + de 80%, mais minorités dans le Nouveau Brunswick et au Manitoba (11% population de Winnipeg). Le Canada a 32,6 M d’habitants dont un peu plus de 8M sont francophones.

Les Canadiens francophones (qui, pour la plupart, sont dans la position ambivalente d’anciens colonisateurs devenus colonisés ; les Métis étant dans une position doublement ambivalente) ont obtenu  en 1969 que le Canada soit officiellement bilingue  (et le multiculturalisme va suivre en 1971); cela est valable pour tous les emplois d’Etat et tous les services de l’Etat. Le respect de cette disposition est une lutte constante pour 3 raisons :

-         d’abord si le pourcentage de francophones est consistant (environ 25%), il diminue (en 1991, 27M dont 7M de francophones). Le Québec est celle des 10 provinces où le taux de natalité est le plus faible (cf l’Espagne, l’Italie, des pays de culture catholique a sécularisation accélérée récente)

-         ensuite parce que les francophones sont essentiellement concentrés au Québec et que si le Québec défend bec et ongle ses spécificités, il me semble que ses rêves séparatistes contribuent à faire qu’il n’a peut-être pas la politique francophone à l’échelle du Canada qu’il pourrait avoir en lien avec les autres minorités francophones (en tout cas reproches effectués par des membres de ces minorités ; en même temps c’est  ces tendances séparatistes qui poussent le Canada à faire attention à ce que l’anglais n’est pas un monopole. Complexe !). Mais tendance à la territorialisation des langues officielles : moins d’anglophones au Q (8%) et attraction forte du français auprès des immigrants avec volontarisme politique pour imposer le français et tendance de l’anglais à s’imposer partout ailleurs.

-         enfin parce que le Canada le plus dynamique est anglophone : Toronto et l’Ontario, Vancouver et la Colombie britannique, Calgary et l’Alberta. D’où l’attirance pour ces nouveaux centres. Le Nouveau Brunswick est la seule province bilingue mais des jeunes francophones y sont attirés par le boom de l’Alberta.

Les Québécois ont également obtenus un fédéralisme moins centralisateur.

 

Les Autochtones  (3,5% se disent Indiens dans le recensement de 2001 ; cela englobe-t-il les 3 « peuples autochtones » Amérindiens, Inuits, Métis ?): Citoyenneté en 1950 (Inuit) et 1960 (Amérindiens). Avec la Constitution de 1982 ont obtenu la reconnaissance de certains droits et notamment le fait de pouvoir négocier comment réaliser ces droits avec le gouvernement (Winnipeg : terres qui revenaient aux Métis par un traité du XIXe siècle et sur lesquelles une partie de la ville de Winnipeg est construite : négociations à ce sujet).

 

Plusieurs langues autochtones ont un statut officiel dans les Territoires du Nord-ouest; l'inuktitut est la langue de la majorité de la population au Nunavut et l'une des trois langues officielles de ce territoire.

 

Depuis le XIXe siècle (développement après la création de l’Etat), arrivée de vagues successives d’immigrants, d’abord européens (irlandais, allemands, ukrainiens, etc) puis, progressivement depuis  XXe aussi Asiatiques et Africains, d’Afrique du Nord et d’Afrique Noire. Actuellement le Canada a le niveau d’immigration le plus élevé du monde occidental. La citoyenneté pour les résidents blancs en 1946, étendue aux minorités noires et asiatiques en 1948. Jusqu’aux années 1960, modèle d’immigration reposant sur une « conformité anglophone », avec restriction pour l’immigration chinoise. Changement en 1971 avec l’adoption du multiculturalisme.

 Selon O. Nay (p545) : 10 groupes officiellement reconnus au Canada : Noirs, Chinois, Philippins, Japonais, Coréens, Latino-Américains, Insulaires du Pacifique, Indo-Pakistanais, Asiatique du sud-est, Arabes et Asiatiques de l’Ouest)

Actuellement de grandes villes canadiennes comportent un fort pourcentage de personnes nées à l’étranger : Toronto 43,7%, Vancouver 45,4%, Ottawa 21,8%  Montréal en a moins (18,4%). Le Canada dans son ensemble = 16%, Les Etats-Unis 8%  (la France cela doit être moins dans la mesure où on en est à la 2ème voire 3ème génération). (prendre ces statistiques comme ordre de grandeur JB)

Vancouver : 48,5 % de personnes formées de « minorités visibles »[2] dont 85% proviennent d’Asie, notamment des Chinois d’HongKong quand il y a eu le processus de remise à la Chine.

 

Le Canada continue à accepter une immigration de grande ampleur (considérée comme un facteur essentiel du développement collectif), mais avec 3 caractéristiques qui distinguent le Canada de l’UE et de la France en particulier :

-         la possibilité d’un contrôle qui vient du fait que le Canada est bordé par 3 Océans et une double frontière avec les Etats-Unis et que pratiquement personne ne cherche à franchir illégalement la frontière entre les USA et le Canada, pour immigrer. Il n’y a donc pratiquement pas de porosité des frontières.

-         le critère des besoins du marché de l’emploi est utilisé par la politique de l’immigration pour déterminer le niveau d’entrée. La moitié des immigrants est choisie selon le niveau de scolarité, l’expérience professionnelle, la connaissance de l’anglais ou du français, l’âge. On pose 5 questions et il faut avoir une certaine note.  Rappel qu’en France le problème de l’immigration sélective a soulevé une question qui ne fait pas partie du débat social au Canada : est-il légitime d’attirer régulièrement de la main d’œuvre qualifiée dans les pays occidentaux ? Par contre on trouve dans le débat social les notions « d’intégration équitable » (fondamental dans la pensée de Kymlicka par exemple) et surtout d’ « accommodement raisonnable » (qui est une obligation juridique) et de « discriminations indirectes » (commence à arriver en France par l’intermédiaire du droit européen) qui sont des expressions socialement absentes en France et l’ouverture de la fonction publique aux immigrés (alors que le monopole national dans ce domaine est une constante de la politique républicaine française, juste abolie now pour les universitaires étrangers).Dans années 1990, 40% des immigrés âgés de 25 à 54 ans détenaient un diplôme universitaire et 23% des canadiens de naissance du même âge (il faudrait affiner la comparaison en la spécifiant au niveau des villes car logique que le paysan du Québec ou du Manitoba ne possède pas de diplôme universitaire)

-         enfin, le Canada n’a pas d’anciennes colonies ou protectorat mais est lui-même un ancien Etat colonial (ce qui implique d’autres problèmes) et  (jusqu’au 11 septembre) le Canada était loin des zones de conflit. Ce n’est pas le cas de la France, vue du Canada : Marseille est aussi près de l’Algérie (où guerre civile des années 1990)  que Toronto de Québec et la France est plus prés du Proche Orient que Montréal de Vancouver. Mais depuis le 11 sept influence de la situation états-unienne, des discours de Bush  et des infos telles qu’elles sont propagées par les médias.

 

Selon le recensement de 2001, 34 groupes ethniques regroupent chacun au moins 100000 personnes.

Au contraire des minorités nationales les immigrants ont fait le choix de venir au Canada et de s’y installer, au contraire des Canadiens francophones, ils doivent apprendre une des deux langues officielles (qui n’est pas forcément leur langue maternelle) pour pouvoir avoir des emplois et être autonomes dans la vie courante. Ils jouissent de tous les droits excepté le doit de vote ; ils ont le droit de devenir citoyen canadien après 3 ans de séjour et 80 % le font avant la fin d’une décennie de résidence au Canada

 

La politique multiculturaliste :

Cf.  notamment Denise Helly, « Le multiculturalisme canadien : de la promotion des cultures immigrées à la cohésion sociale 1971-1999 », Cahiers de l’URMIS, n°6, 2000 et « Canadian Multiculturalism : Lessons for the Management of Cultural Diversity ? »,  Canadian Issues, Summer 2004, 5-9.

En 1971, adoption, à l’instigation du premier ministre Pierre Trudeau d’une politique de multiculturalisme comportant 4 objectifs :

-          Reconnaissance de l’existence de  groupes culturels et appuyer le développement culturel de ces groupes ethnoculturels, y compris par financement public

-         réduire les barrières ethnoculturelles pour aider leurs membres à surmonter les difficultés qu’ils rencontrent pour participer pleinement à la société canadienne

-         favoriser les rencontres entre groupes en vue de développer la tolérance à la différence culturelle

-         aider les immigrants récents à acquérir au moins une des 2 langues officielles :

« Le multiculturalisme dans le cadre du bilinguisme » était d’ailleurs le titre officiel donné par Trudeau à sa politique. Autrement dit, le multiculturalisme n’était pas le fondement mais une construction sur une fondation culturelle bilingue. Selon certains,  multiculturalisme était un mauvais terme et il aurait mieux valu  parler de « polyethnicité » (Jean Burnet, 1975) ; Trudeau parlait également de « renforcer l’unité canadienne et encourager sa diversité culturelle » (« encouraging cultural diversification »)

Deux programmes sont établis en 1971

-         Ethnic Liaison : préservation et partage des héritages culturels et de la compréhension de tous les canadiens, avec deux volets : la transmission des langues ancestrales et le financement du fonctionnement d’institutions et d’association ethnoculturelles

-         Canadian Identity pour augmenter la participation des immigrés aux institutions canadiennes et renforcer leur identification au Canada.

A partir de 1977-1979 priorité est donnée au financement d’activités multiculturelles ponctuelles plutôt qu’au fonctionnement d’institutions ethnoculturelles.

1982 : Rapatriement de la Constitution du Royaume Uni (dont le parlement avait seul le droit de la modifier) au Canada. Le Québec refuse officiellement de s’y associer mais les décisions prises le concernent quand même.

Charte canadienne des droits et des libertés de la personne dans le préambule de la Constitution La Charte place les droits avant la souveraineté populaire comme principe fondateur du lien sociopolitique au  Canada.

(à suivre)



[1] M. Milot, Laïcité dans le nouveau monde, Le cas du Quebec, 2002, 51.

[2] Définition de Statistique Canada : minorités visibles = « personnes autre que les Autochtones qui ne sont pas de race blanche ou qui n’ont pas la peau blanche »

 

Commentaires

Bravo pour cet article, dont j'attends avec impatience la suite.

Écrit par : Olivier | 25/03/2007

Les bretons ne seront français qu'en 1532

Écrit par : Gilles | 26/03/2007

Tout d’abord merci pour l’excellent survol de l’histoire du Canada. Vous dites ceci :

… parce que les francophones sont essentiellement concentrés au Québec et que si le Québec défend bec et ongle ses spécificités, il me semble que ses rêves séparatistes contribuent à faire qu’il n’a peut-être pas la politique francophone à l’échelle du Canada qu’il pourrait avoir en lien avec les autres minorités francophones (en tout cas reproches effectués par des membres de ces minorités ; en même temps c’est ces tendances séparatistes qui poussent le Canada à faire attention à ce que l’anglais n’est pas un monopole. Complexe !). Mais tendance à la territorialisation des langues officielles : moins d’anglophones au Q (8%) et attraction forte du français auprès des immigrants avec volontarisme politique pour imposer le français et tendance de l’anglais à s’imposer partout ailleurs.
-

Comme vous le dites, la question de la relation entre le Québec et le R.O.C (Rest of Canada) n’est pas simple. Par ailleurs, concernant la politique de bilinguisme au niveau des institutions fédérales : un commentateur avait fait la remarque suivante, que je juge tout à fait pertinente, à savoir que Pierre-Elliot Trudeau a contribué à créer beaucoup d’animosité au sein du Canada-Anglais vis-à-vis des aspirations du Québec en imposant aux institutions fédérales une politique de bilinguisme (cette volonté de rendre bilingue la fonction publique a d’ailleurs largement échoué) peu sensible aux réalités locales. Ayant beaucoup voyagé dans le R.O.C (Rest of Canada) j’ai pu constater moi-même combien cette hostilité était réelle.

Toujours selon le même commentateur (j’oublie son nom), Trudeau manifestait une approche au politique qui s’éloignait de la manière anglo-saxonne (pragmatique et portée sur le bricolage…) et qui manifestait l’influence des Lumières et de sa tendance à plaquer sur le réel des catégories « universelles ». La réalité était et est encore que le Canada n’a jamais été et ne sera jamais un pays bilingue. Ainsi les Québécois qui, à la fin du 19ème siècle et au début du XXème ont répondu à l’appel des belles terres vierges des Praires canadiennes, et sont partis au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta, ont du se rendre à l’évidence, très tôt, que les législatures de ces provinces nouvellement fondées feraient tout en leur possible pour marginaliser la culture française. (voir http://www.republiquelibre.org/cousture/PROV.HTM pour se faire une idée d’une partie de l’histoire de notre « far-west »…). La culture française n’a pu véritablement s’épanouir qu’au Québec parce que c’est le seul endroit où les francophones ont été en mesure de contrôler les leviers politiques.

Par ailleurs, l’ imposition du bilinguisme par Trudeau (loi sur les langues officielles voté en 1969) avait pour objectif d’inciter les Québécois à résister à cette tentation que représentait la nouvelle trajectoire dans laquelle leur nationalisme s’inscrivait, soit le mouvement en faveur de l’accession du Québec à l’indépendance. Trudeau croyait que des institutions fédérales respectueuses du fait français contribuerait à diminuer le sentiment d’aliénation que les Québécois éprouvaient par rapport au Canada. Il souhaitait plus que tout que notre nationalisme conserve la forme politiquement beaucoup plus bénigne qu’il prenait auparavant (un attachement profond à notre langue et notre culture mais sans cristallisation autour d’un projet politique précis affectant notre destin d’une manière décisive). Pour Trudeau, le nouveau nationalisme québécois n’était rien d’autre qu’une forme de tribalisme.

Ajoutant l’affront à l’injure, la politique en faveur du bilinguisme a ensuite été en partie remplacée par une politique d’ouverture vis-à-vis la diversité culturelle. Permettez-moi de copier coller (avec de légères modifications) le texte suivant tiré de l’encyclopédie de l’Agora :

http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/Nationalisme--Le_nationalisme_au_Canada_anglais___une_realite_cachee_par_Sael_Gueydan-Lacroix

« (un groupe d’intellectuels québécois qui se sont lancés en politique sur la scène fédérale, soit Gérard Pelletier, Jean Marchand et Pierre Elliott Trudeau)…mettent de l’ avant une nouvelle conception de la citoyenneté canadienne fondée sur une base civique, égalitaire et multiculturelle. Si celle-ci est louable à bien des égards, elle porte également en elle un aspect moins avouable. En plus de noyer la population québécoise et ses revendications dans un multiculturalisme universel, elle sert visiblement les intérêts particuliers d’un des deux « peuples fondateurs » au détriment de l’autre. Selon plusieurs, parmi lesquels..le philosophe Will Kymlicka, le nationalisme pan-canadien s’avère aussi un puissant outil, habilement mis en place pour servir avant tout le Canada anglais. »

Concrètement, le multiculturalisme comme programme politique semble n’avoir été qu’une sorte de colifichet utile pour fidéliser le vote immigrant mais sans réel impact sur le terrain….D’ailleurs, s’il a pu être inclus dans les plates-formes électorales sans créer de remous, c’est qu’il a toujours été perçu comme étant foncièrement convergeant avec l’expérience canadienne. Cette expérience canadienne se caractérise par la combinaison des 3 éléments suivants :

-la très grande décentralisation de nos institutions (la centralisation des institutions françaises n’a de cesse de nous étonner ).
-le passage de vagues successives d’immigrants issues de cultures différentes (on n’a qu’à penser aux Huttérites – essayez d’imaginer des colonies de Huttérites en France!…), -la présence d’un imaginaire marqué par ce sens très profond que nous sommes dans une partie du monde où il y a énormément de « vide » qui demande à être « rempli ».

Cette combinaison contribué à une approche relativement soft dans l’accueil de « l’étrangeté »…

Écrit par : eric Wingender | 03/04/2007

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